Le traitement de l’Anthropologie dans l’Art et l’Histoire de l’Art des années soixante à nos jours

Exposition du Centre Pompidou – 1989 – Les magiciens de la terre

Il n’est qu’une seule certitude quant aux disciplines scientifiques, c’est par le temps et le partage de leur champ de recouvrement avec d’autres domaines qu’elles peuvent voir l’apogée de leur réalisation. Or c’est à travers leur individualisation, leur renforcement premier qu’à leur genèse, elles se marginalisent et se coupent des autres. L’anthropologie est un paradigme de ce phénomène, son ambition au départ, était de rassembler toutes les données relatives à l’être humain, à toute formes de principes anthropiques, à tout produits, toute gestuelle, tout mécanisme de pensée,issus de l’Homme. La particularité de l’anthropologie sociale, qui est actuellement le coeur du domaine, est de proposer des études relativement monistes. Pour ce faire, l’anthropologie a développé une méthode très encadrée et précise d’observation, d’immersion et d’enquête de terrain. Au cours de ces mutations, la discipline s’est enrichie de spécialités, anthropologie du politique, anthropologie de la parenté, anthropologie de la nature ou encore anthropologie du genre.

En traitant des rapports à l’Art, les recherches actuelles tentent de palier aux manquements passés. Ces études autour des liens entre art et anthropologie ont vus le jour dans les années soixante à quatre vingt, sans délimitation foncièrement marquée, c’est le “tournant anthropologique” qu’a prit l’art, c’est une partie du “tournant contemporain” qu’a adopté l’anthropologie, liée à la postmodernité. Ces apports interdisciplinaires ont tour à tour été théorisés par Hal Foster, historien de l’art, David MacDougall, théoricien en anthropologie visuelle, Jean Rouch, cinématographe et photographe, Sally Price, historienne de l’art, Juan Downey, artiste, et bien d’autres encore. Ici la question fondamentale est de savoir qu’elles ont été les phases de développement de l’anthropologie au sein des études en Histoire de l’Art, ses courants de pensée premiers, ses éclatements et ses nouvelles appréhensions jusqu’à un renouveau dit “postmoderne” et à ses satellites “anti-moderne”, “trans-avant-gardistes”, etc.

Confondue dans plusieurs terminologies différentes telles que l’anthropologie de l’art, l’anthropologie visuelle ou l’ethnographie artistique, la question du traitement anthropologique dans l’Art est aujourd’hui une notion toujours mouvante qui invoque le savoir de plusieurs disciplines toutes aussi complexes et riches les unes que les autres, telles que la philosophie, l’éthique, l’histoire de l’art contemporain, l’archéologie, l’anthropologie sociale, la sociologie, la politique, ainsi que les difficiles cognitions gravitant autour, tout cela portant encore les traces vives d’une historicité omniprésente de la discipline, consciente de sa propre mouvance.

Pour éclaircir ce cadre complexe et pluriel il est nécessaire de retracer une historiographie succincte de ce qu’a été et de ce qu’est aujourd’hui l’anthropologie ainsi que d’aborder son tournant contemporain, ce que l’étude que je ferai permet en traitant des critiques, des théories, des travaux d’artistes ou encore d’institutions culturelles et leurs appréhensions singulières de la discipline et ses apports.