L’exposition est à la fois l’attestation et le témoignage de deux histoires, différentes mais entremêlées, qu’elle vous invite à découvrir. Elle porte d’abord les traces de la « grande » histoire, celle d’une discipline, les Sciences de l’éducation qui, en cette année 2017, fêtent leur 50 années d’existence et vous êtes invités à partager cette histoire à partir des controverses, débats ou démêlés qui l’ont jalonnée. Ces controverses ont été retenues comme significatives par une « sélection » de figures marquantes de notre communauté et, à leur manière, elles racontent cette histoire.
Cette sélection se présente comme une équipe de rugby [1] ce qui nous conduit à la seconde histoire, la « petite » sans doute, riche de doutes et d’enthousiasmes, de coup de blues et de coups de cœur, de partage et de rencontres. C’est l’histoire de l’expérience partagée d’un colloque, par les différents collectifs de l’UMR toulousaine EFTS qui l’ont organisé [2], par le biais des échanges et des collaborations avec les partenaires qui l’ont soutenu mais au travers, surtout, de l’engagement effectif des quelques 200 participants qui ont contribué à sa réussite.
Je vais donc m’autoriser quelques lignes pour vous permettre de mieux connaître et, j’espère, d’apprécier la préparation et la réalisation du colloque, c’est-à-dire, en fait, de positionner l’exposition par rapport aux conditions de son élaboration. En effet, organiser un colloque, surtout comme celui de « Mêlées et démêlés. 50 ans de recherches en Sciences de l’éducation » constitue une activité scientifique au plein sens du terme et je suis d’ailleurs très heureux que cette activité, qui est rarement valorisée, puisse l’être aujourd’hui, au travers de l’édition de l’exposition.
Au départ, ce colloque a correspondu à un choix politique très fort de l’UMR EFTS, tant au niveau de ses orientations (un hommage aux Sciences de l’éducation, l’année de leurs 50 ans, avec la spécificité du site toulousain) qu’au niveau de son financement (avec celui d’un contrat post-doctoral [3] sur le budget, pourtant restreint, d’EFTS). Il est l’aboutissement d’un travail « au long cours » qui s’est déployé sur près d’une année (d’octobre 2016 à octobre 2017), qui a demandé un travail collectif, intense et assidu. Ce travail collectif a d’abord concerné EFTS, avec ses différentes instances (le Conseil d’Unité, le Conseil Scientifique, le Comité d’organisation), avec le « labo Junior » (LJEFTS) qui vient de se créer et qui a eu la charge, en particulier, de la première soirée et la multiplication (avec une autonomie assumée) de différents groupes de travail (ceux des symposiums, de la séance d’ouverture, de l’exposition, de la séance de clôture). Un principe fort, auquel nous tenons, celui à la fois de « lâcher la bride » aux initiatives et aux inventions qui garantissent la dynamique de la recherche, et, en même temps, le souci constant de « tenir le cap », d’éviter la dispersion ou les approximations. C’est un mode de fonctionnement qui se retrouve, avec des contraintes institutionnelles supplémentaires bien sûr, dans la gouvernance de l’UMR EFTS. Cette gouvernance joue sur la tension entre la capacité d’initiative des 4 entrées thématiques qui font vivre la recherche au quotidien et la structuration du projet scientifique de notre Unité et la construction d’une identité toulousaine. L’analogie est forte et clairement assumée. Ce travail collectif s’est ensuite ouvert à une diversité de partenariats [4], locaux d’abord avec l’UT2J, l’ENSFEA et l’ESPE qui nous ont soutenu financièrement (ainsi d’ailleurs que le Conseil Départemental de Haute-Garonne), tout comme l’UFR SES et le Département des SEF de l’UT2J, sans oublier l’appui du CPRS [5], du laboratoire LLA-Créatis et des Vice-Présidences Recherche, Valorisation et Diffusion de l’UT2J. Les partenariats se sont aussi étendus au niveau régional (avec l’engagement du LIRDEF de l’Université de Montpellier et l’appui financier de la Région Occitanie) et au niveau national [6], avec le CIRNEF [7] (des Universités de Caen et de Rouen), avec l’AFIRSE et avec l’AECSE.
Le colloque, au-delà de l’exposition, comportait deux séances originales (l’ouverture et la clôture)[8] scénarisées par des collectifs de statutaires et de doctorants, la soirée du Labo Junior (exposition et concert), le repas d’anniversaire (et son gâteau aux 50 bougies), une séance de posters mais, surtout, 11 symposiums en parallèle, polarisés par les controverses qui, vu depuis Toulouse, ont balisé l’histoire des Sciences de l’éducation. Ces symposiums étaient co-pilotés (par des chercheurs d’EFTS, du LIRDEF et du CIRNEF), autour des « démêlés » relatifs aux questions scolaires (didactique, pédagogie, méthode d’enseignement, savoirs), à la formation d’enseignants et d’adultes (professionnalisation, développement professionnel, compétences, ingénierie), à des thèmes plus transversaux (évaluation, innovation, changement, dispositif, pratiques, activité) ou à des interrogations épistémologiques sur le rapport des Sciences de l’éducation et du social (logique d’action / logique de connaissance, recherche / militance). Ces controverses ont été le fruit d’un long travail de maturation : elles ont été esquissées lors des journées d’études d’EFTS en 2016, elles ont été développées par les binômes de coordonnateurs des symposiums (et leur triple origine), elles ont été soumises à la discussion de grands témoins lors de trois séminaires ouverts (année 2017) avant de servir de base aux échanges durant le symposium, sur la base d’écrits provisoires (largement discutés et bousculés) qui seront ensuite repris (l’opération est en cours) pour que chaque symposium produise en ouvrage collectif (ou la livraison d’une revue). Il s’agit là d’une modalité particulière d’écriture scientifique qui, sur la base d’une proposition individuelle, s’enrichit des apports, tant sur la forme que sur le fond, des membres du groupe. Cet ensemble de publications scientifiques constituera la contribution toulousaine à la célébration des 50 ans des Sciences de l’éducation[9].
Chaque colloque constitue un espace de formation et de développement, principalement, le plus souvent, pour ceux qui y participent. Ici, ce colloque va plus loin et met à disposition des étudiant-e-s une partie de son travail au travers de l’édition d’un livret sur les 15 grandes figures. Dans la logique du rugby, il fait montre d’un souci de « faire la passe » pour permettre aux destinataires, promus coéquipier-e-s, de porter l’ovale le plus loin possible voire, pourquoi pas, jusqu’à la ligne blanche. Dès lors, la lectrice ou le lecteur que vous êtes, se voit confier la mission de prolonger le message, sans oublier que ce prolongement n’a de sens que dans une version collective et partagée et que, même si l’essai est marqué, il restera encore à le transformer et puis il y aura le match à remporter, et encore un autre match à jouer, et encore, et encore … Vous avez l’honneur de porter le maillot des Sciences de l’éducation, défendez-le fièrement, farouchement, quelle que soit votre catégorie, de l’étudiant-e de licence au (à la) professeur-e émérite, et emmenez-le toujours plus loin, toujours plus haut et toujours ensemble.
Jean-François Marcel
Professeur en sciences de l’éducation
Directeur de l’UMR EFTS
[1] Car cette métaphore a été tirée tout au long du colloque pour assumer l’ancrage toulousain de cet hommage
[2] Je voudrais saluer le rôle déterminant des personnels de notre UMR, Christelle Herraud et Sébastien Reynes, dans la réussite de la manifestation.
[3] Christiana Charalampopoulou a assumé cette mission avec une rigueur, un sourire et une efficacité unanimement salués.
[4] Je profite de ces quelques lignes pour renouveler à toutes et à tous nos plus sincères remerciements. Je distinguerai toutefois ces remerciements pour deux personnes. Marguerite Altet, d’abord, qui a accepté et brillamment réussi la difficile mission du coach et du sélectionneur parmi ses pairs. Ses réserves de patience, de finesse, de rigueur et de diplomatie ont été irremplaçables. James Colomina, ensuite, un sculpteur toulousain qui a permis que sa création, « L’enfant au bonnet d’âne » entre à l’Université et nous tienne compagnie pendant tous le colloque.
[5] CPRS : Benoît Colas a réalisé la conception graphique de l’exposition.
[6] Nous pourrions rajouter la dimension internationale avec l’obtention du label ESOF : EuroScience Open Forum
[7] Précisons que le CIRNEF a organisé (avec l’AECSE) un colloque consacré aux 50 ans des Sciences de l’éducation quelques semaines après et que la coordination forte et constructive des deux manifestations a largement contribué à leurs réussites et à leurs succès. Le CIRNEF s’est d’ailleurs engagé dans le financement de l’édition d’un livret qui sera ainsi distribué aux étudiant-es de Caen et de Rouen.
[8] « On a décidé de s’en mêler » pour la première et « Coup de pied à suivre : les Sciences de l’éducation dans 20 ans » pour la seconde (voir le programme du colloque).
[9] N’oublions pas de rajouter les numéros spéciaux que consacreront les revues scientifiques à ces 50 ans, la revue caennaise (« Les Sciences de l’éducation pour l’ère nouvelle », la revue montpelliéraine (« Education et Socialisation. Les Cahiers du CERFEE ») et la revue toulousaine (« Les Dossiers des Sciences de l’éducation »).