La géohistoire, terme créé par Fernand Braudel (Braudel, 1949), s’intéresse à la construction des espaces et des territoires sur la longue durée. Dans le monde anglo-saxon (Angleterre, Etats Unis, Canada,…), le terme recouvre plutôt celui de géographie historique (historical geography). Néanmoins, les définitions de ces termes fluctuent sensiblement d’un auteur à l’autre et d’un pays à l’autre (Chouquer, Watteaux, 2013). Schématiquement, la géographie historique cherche à appliquer à des époques passées les méthodes de l’analyse géographique tandis que la géohistoire s’intéresse à l’évolution historique de configurations spatiales/territoriales. La géohistoire correspondrait à « l’histoire diachronique des sociétés à travers leur espace » alors que la géographie historique classique « se contente d’étudier synchroniquement des situations du passé, et sans considérer l’espace comme facteur primordial » (Chouquer, Watteaux, 2013).

Depuis leur émergence, ces termes se sont largement diffusés dans le champ disciplinaire de la géographie et de l’histoire. Si le terme de géohistoire ou géo-histoire est de création récente, la réalité qu’il recouvre est, elle, au moins en partie, beaucoup plus ancienne et coïncide pour partie avec le champ de la géographie historique. En France, les reconfigurations académiques depuis les années 1950 ont conduit à une longue éclipse de la géographie historique (Grataloup, 2015).

Ce colloque sur la Géohistoire de l’environnement et des paysages, organisé par le laboratoire GEODE (UMR 5602 CNRS), entend dresser un bilan des nombreux travaux menés dans une perspective géohistorique. Ce colloque pluridisciplinaire portera également une attention particulière aux emboîtements d’échelles de temps et d’espace qui caractérisent le fonctionnement géohistorique des environnements et des paysages. Les organisateurs souhaitent favoriser les approches et les études de cas aussi bien à l’intérieur que hors d’Europe, afin de multiplier études comparatives et retours d’expérience.

 

Thématiques abordées :

Champs et concepts de la géohistoire de l’environnement et des paysages.

La géohistoire appliquée aux termes d’environnement et de paysage connaît un certain succès de la part de nombreux chercheurs. Mais existe-t-il une spécificité de la géohistoire de l’environnement et des paysages au regard de la géohistoire classique ? Aujourd’hui, on peut considérer qu’elle correspond à l’étude des rapports entre une société et son environnement naturel, le tout en évolution perpétuelle. De nombreuses notions sont alors mobilisées comme héritage, trajectoire environnementale et paysagère, résilience, co-évolution, analyse régressive, analyse rétrospective,… qui doivent faire l’objet d’une mise au point conceptuelle. Les recherches en géohistoire sont souvent « bornées » du point de vue chronologique. Existe-t-il réellement une frontière chronologique ou des bornes temporelles en géohistoire de l’environnement et des paysages ?

Nouveaux outils, nouvelles données, nouvelles pratiques ?

Dans l’approche géohistorique, il est possible de définir des sources classiques et des sources « innovantes ». Les premières correspondent aux sources textuelles et figuratives. Elles sont les plus fréquemment mobilisées (textes d’archives, cartes anciennes, plans, photographies obliques et aériennes anciennes). Le recours aux sources discursives est plus rarement réalisé. Plus rarement encore, le géohistorien construit ses sources à partir de la mémoire vivante. Enfin, certaines sources peuvent être qualifiées « d’innovantes ». La question de la participation des habitants à la constitution de fonds archivistique géohistorique est peu développée aujourd’hui (collection de cartes privées, recueil d’images « habitantes »,…). Existe-t-il des sources innovantes (archives audio et vidéo) qui permettraient de constituer de nouveaux corpus d’archives ?

Géohistoire, patrimoine et patrimonialisation : la construction du patrimoine par les sources géohistoriques.

La notion de patrimoine, souvent associée au terme « historique », s’intéresse aux biens matériels, immatériels, ayant une importance historique et/ou artistique et/ou culturelle. En quoi l’approche géohistorique peut-elle contribuer à la constitution d’un patrimoine ? Aujourd’hui nombre de territoires ont la volonté de valoriser leurs patrimoines. L’approche géohistorique peut-elle contribuer à faire resurgir les environnements passés, les paysages et leur mémoire ?

Quel rôle pour les approches géohistoriques dans la gestion actuelle de l’environnement et du paysage ?

Ce colloque s’adresse également à l’ensemble des gestionnaires de l’environnement et des paysages et nous souhaitons lui donner une portée opérationnelle. Aujourd’hui, les politiques de gestion intègrent assez peu la durée et la temporalité dans leurs pratiques. Le passé qui intéresse les gestionnaires dépasse rarement les 10, voire les 30 dernières années. Pourquoi et comment intégrer des temporalités plus longues dans des opérations de gestion actuelle ? Quelle contribution possible de la géohistoire au débat sur les « états de référence » ? Au contraire l’intégration de la durée ne permet-elle pas de replacer les environnements et les paysages, non pas par rapport à un état de référence, mais dans une trajectoire temporelle qui permet de définir des scénarios prospectifs. Peut-on faire une bonne prospective sans une analyse géohistorique préalable ? Les organisateurs seront sensibles à des communications montrant l’intérêt de l’intégration de la durée dans des opérations ou politiques de gestion et seront attentifs aux démarches associant géohistoire et prospective.

Approche thématique et territoriale – Géohistoire des risques, géohistoire des zones humides (cours d’eau,…), géohistoire urbaine, géohistoire des forêts, géohistoire des montagnes, territoires et thématiques émergentes.

Les approches de géohistoire des environnements et des paysages ont porté traditionnellement sur plusieurs thématiques et objets : risques, cours d’eau, ville, forêts,… Dans le cadre de ce colloque, une attention particulière sera apportée à la contribution des démarches géohistoriques appliquées aux domaines des risques naturels (inondations, avalanches, crues torrentielles,…) mais aussi de la vulnérabilité. La géohistoire des cours d’eau pourra être abordé pour sa contribution à la paléohydrologie et à l’évolution des usages. La contribution de la géohistoire à la connaissance et au fonctionnement des espaces urbains est également attendue en relation avec les dynamiques environnementales. Une place particulière sera accordée au rapport entre ville/fleuve. Des contributions sur d’autres thématiques comme la géohistoire des forêts, des littoraux ou des montagnes sont également attendues.

Enfin, nous souhaitons mettre en avant les territoires et les thématiques où la dimension géohistorique est nouvelle et émergente : Europe centrale et orientale, Amérique du sud, …

 

Communications :

Les propositions de communications (en français et en anglais) doivent être adressées par voie électronique à l’adresse du coordinateur du colloque (philippe.valette@univ-tlse2.fr) ainsi qu’aux membres du comité d’organisation (jmcarozza@yahoo.fr, melodie.david@etu.univ-tlse2.fr, colloque_geohistoire@univ-tlse2.fr).

Date limite de dépôt des propositions : 31 mars 2016.

Les auteurs seront informés de la décision du comité scientifique à partir du 30 juin 2016. Les résumés acceptés ainsi que le programme seront publiés sur le site du colloque dédié et envoyé aux auteurs retenus.

Les travaux du colloque seront publiés sous deux formes : une sélection d’articles fera l’objet d’une publication dans une revue spécialisée et les actes du colloque feront l’objet d’une publication spécifique.