Journée d’étude – Le cadavre en procès

Journée d’étude – Le cadavre en procès

 

Mercredi 25 mai 2011 | Marseille (13002)

Cette journée d’étude s’inscrit dans le prolongement du colloque organisé par le GAAF en décembre2010 « Rencontre autour du cadavre ». L’objectif du colloque était d’aborder la mort à travers le corps singulier qu’est le cadavre. Cette manifestation a été délibérément placée sous le signe de la démarche analytique des gestes et des techniques qui président au devenir du cadavre. Il s’agissait de réunir archéologues, historiens, sociologues, praticiens de la mort (légistes, thanatopracteurs, soignants…), anthropologues, psychanalystes, juristes, philosophes, historiens d’art, afin d’engager un dialogue sur le cadavre et sa décomposition, en comparant les pratiques selon les époques et en confrontant les problématiques disciplinaires. Comme toujours au cours de ce type de manifestation, des pistes de réflexion sont apparues et nous avons souhaité en développer quelques unes, afin d’amorcer une série de séminaires qui débouchera sur un THEMA de la revue Techniques et Culture.

1 – La matérialité du cadavre

La prise en compte ou pas de la décomposition du cadavre a des effets proprement épistémologiques. Nos disciplines en escamotent fréquemment certains aspects. Comment penser le cadavre lorsque l’on a plus que les os ? Quid de la vue, de l’odeur, de la pesanteur d’un cadavre en décomposition dans les nombreuses études sur la mort et les rites funéraires ? S’il existe une discipline en sciences sociales où l’on est amené à côtoyer régulièrement des cadavres (certes, dépouillés de leurs chairs), il s’agit bien de l’archéologie. Pour autant, la relation que les archéologues entretiennent avec leur objet d’étude est pour le moins ambigu. En effet, bien que manipulant des concepts directement liés aux phénomènes de décomposition, ils ne sont jamais ou très rarement confrontés à la réalité d’un cadavre. Les psychanalystes pourront nous aider à travailler cet aspect.

2 – Le cadavre pratiqué

Nous aborderons les effets produits par les cadavres et leur décomposition sur les personnes conduites à les côtoyer (fossoyeurs, médecins légistes, public…). Les modes de conservation et d’exposition des cadavres seront nécessairement explorés. Ici, il conviendra de comparer les époques, les lieux, les contextes et de prêter une attention particulière aux gestes et aux techniques.

On s’intéressera aux mots, aux représentations et à la place des activités mortuaires et de ceux qui les développent, dans la société.

Dans un registre proche, nous nous demanderons dans quelle mesure le fait d’envisager le cadavre comme un « déchet potentiel » peut nous aider à penser les élaborations techniques qui visent à soustraire à nos sens ces états du corps. Pour penser cette question nous nous référerons à des situations au cours desquelles les corps morts sont jetés, mis à la poubelle. Nous pourrons également conjecturer que les transformations, les manipulations et les déplacements sont des attitudes qui visent à ne pas les jeter, mais au contraire à leur trouver une place, à les « ranger » au sein d’un ordre culturel, de sorte à atténuer ou éliminer leurs effets perturbateurs (à la fois au niveau du sens et des sens).

La notion de déchet peut-elle nous aider à penser le cadavre quand il surgit en très grand nombre (catastrophe, épidémie, génocide) ? Dans quelles conditions (quantitatives et qualitatives) la mort de masse requière t’elle un traitement « déviant » du cadavre. En corollaire, que se passe-t-il de ce point de vue lorsque la mort est le résultat d’un crime dont la finalité est guidée par l’intention de nier l’identité sociale ou l’humanité de la victime (ou des victimes), lorsqu’il s’inscrit dans une« sortie » de la culture et de l’ordre symbolique. Quel sens prend alors la technique cet « acte traditionnel efficace » lorsqu’il n’y a pas tradition ?

3 – Le cadavre représenté

Nous aborderons la question du traitement du cadavre et de sa décomposition dans le champ artistique (littérature, cinéma, photographie). Quels effets y produit-il ?

Par ailleurs, la thématique de l’effroi à travers les odeurs méphitiques et les Zombies sera explorée.

Nous les considérerons comme des objets permettant de penser non seulement l’entropie du cadavre et en corollaire la menace qu’elle représente pour l’ordre social, mais aussi la dimension temporelle de la décomposition et sa réception sociale.

SÉMINAIRE « ÉLEMENTS D’ANTHROPOLOGIE FONDAMENTALE »

Responsable : Frédéric Joulian

Journée d’étude Le cadavre en procès

25 mai 2011, Centre Norbert Elias, Marseille, Vieille Charité, salle 205, 2ème étage

Organisation : Hervé Guy et Agnès Jeanjean

Programme

9h-10h : Accueil au « Charité café » (immédiatement à droite en entrant dans l’enceinte)

10h-10h15 : Ouverture, Frédéric Joulian (EHESS, Centre Norbert Elias)

10h15-10h40 : Introduction Hervé Guy (INRAP/Centre Norbert Elias) et Agnès Jeanjean (LASMIC Université de Nice Sophia Antipolis/Centre Norbert Elias)

10h40-11h : La « non-sépulture » : essai de définition et présentation de quelques cas, Isabelle Séguy (INED/Cépam UMR 6130), Isabelle Rodet-Belarbi (INRAP/Cépam UMR 6130)
11h-11h20 : Cadavre, pourriture et principe vital : une perspective en cognition incarnée, Joël Candau (Université de Nice Sophia Antipolis, LASMIC, E.A. 3179)
11h20-11h40 : Le cadavre comme indicateur de transgressivité. À propos de la “solution finale”, Florent Brayard (CRH, EHESS, CNRS)
11h40-12h : Transfiguration – Transformation, Elisabeth Ola la Selve (Psychanalyste)
12h-14h : Buffet dans la salle de sociabilité

14h-14h20 : « N » propositions sur le cadavre, le déchet et l’enfouissement, Roland Helié (Critique de cinéma)
14h20-14h40 : Du squelette au cadavre : la recomposition, Lola Bonnabel (INRAP)
14h 40-16h 30 : discussion.

Contact
Agnès Jeanjean
courriel : agnes [point] jeanjean (at) gmail [point] com

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