Appel à contribution

Colloque International du Taur, les 22 et 23 mars 2021 — Appel à communication

Les accélérateurs de développement et de production des projets audiovisuels.
Les « Pitch », « Workshop », « Network » : Pratiques, enjeux et expériences


Le colloque du Taur (anciennement Colloque de Sorèze), organisé au sein de l’équipe LARA de l’unité de recherche LARA-SEPPIA, de l’Université Toulouse – Jean Jaurès, est un lieu d’échanges et de réflexions annuel autour des questions audiovisuelles.
Pour son édition 2021, le colloque du Taur s’intéresse aux pratiques et aux dynamiques qui sous-tendent le processus de développement d’un projet audiovisuel dans sa phase de recherche de partenaires et de financement.
Il se tiendra pendant le festival Cinélatino de Toulouse (19 au 28 mars 2021) pour offrir un cadre privilégié d’observation aux chercheurs présents et permettre à cette occasion un rapprochement des milieux universitaires et professionnels.

Dans l’environnement hautement concurrentiel de l’industrie audiovisuelle, la sélection entre les projets s’organise à la fois de façon structurelle par le biais du réseautage, par les soutiens institutionnels et associatifs, par l’intermédiaire des agents artistiques, mais aussi à l’occasion d’événements ponctuels (festivals, marchés) devenus un terrain privilégié de son exercice.
Le colloque 2021 a choisi de se consacrer à l’exploration du rôle de ces manifestations dans les processus de valorisation et de sélection des projets audiovisuels à travers les dispositifs d’intermédiation (pitch, workshop, network) entre les professionnels.

Alors que les travaux académiques se sont régulièrement intéressés à déterminer ce qu’est un « bon film » sur un plan esthétique (Sciences des arts) ou sur un plan commercial (Sciences de l’information et de la communication et Sciences de gestion), la question centrale du colloque propose de réfléchir à ce que peut être « un bon projet » dans le secteur audiovisuel et à la façon dont ce diagnostic peut être établi. Elle devra, pour ce faire, explorer les notions de création et de talent en mettant en exergue ce qu’il convient d’évaluer pour juger de la valeur d’un projet.
Il s’agira d’approfondir le mécanisme de sélection qui revient à faire un choix et celui de sélectivité qui concerne l’organisation de la sélection par le biais d’outils et méthodes.
Ces deux axes interrogent les déterminants et mécanismes de valorisation des œuvres et leurs instances de légitimation sur des problématiques pluridisciplinaires (économiques, sociologiques, gestionnaires, communicationnelles).

À titre d’exemples, nous pouvons citer quelques événements (parmi les centaines existants) illustrant cette fonction d’intermédiation dans les festivals ou marchés audiovisuels et la diversité de leurs terrains d’activités :

  • « Goes to Cannes » : destiné à déceler les talents émergents à Cannes
  • les « Co-Pro Pitching Sessions » venant faciliter les coproductions internationales à Lille, ou au Sunny Side of the Doc à La Rochelle
  • les « Professionnals Training » à l’European Audiovisual Entrepreneurs (EAVE), à l’ACE Producers, ou au Torino Film Lab (développement, production et distribution).

    En tant qu’accélérateurs de production, découvreurs de talents, outils de sélection et baromètres de la faisabilité artistique et économique des projets, ces dispositifs accompagnent le processus de développement dans ses différentes étapes : trouver des partenaires, un auteur, un producteur, des spécialistes, des experts, faciliter le financement, les coproductions.
    Les différents secteurs de la création audiovisuelle sont concernés (fictions, documentaires, séries) de même que les différents niveaux d’activités (auteurs, scénaristes ou producteurs).

    Dans ce contexte des festivals et marchés cinématographiques, nous souhaitons éclairer les thématiques suivantes :
  • Quel(s) système(s) de valeur(s) sous-tend (ent) cette logique ? On pourra notamment chercher à approfondir les notions de talent et de qualité dans le secteur audiovisuel et s’interroger sur l’arbitrage entre la qualité artistique versus le potentiel commercial dans les critères d’évaluation des projets (dissonance axiologique).
  • Quel profil dans la légitimité et expertise de ceux qui jugent les projets (ressource axiologique) ? C’est toute l’organisation du travail dans l’audiovisuel à travers le rôle de ses intermédiaires dans la phase de développement de l’œuvre audiovisuelle qui va être questionnée.
  • Quelles sont les caractéristiques des œuvres issues des projets sélectionnés par ces dispositifs ?
    On pourra s’intéresser aux processus de standardisation et de labellisation des sujets et aux formats des productions audiovisuelles réalisées grâce à ces dispositifs dans la perspective des contraintes d’une forme de « mise en marché » et d’un « culturalisme de marché » (Romain Leclerc), à l’anglicisation du vocabulaire associé (en attestent les terminologies de pitch, workshop, network) et l’utilisation généralisée de la langue anglaise pour présenter les projets lors de ces événements.
  • Quelle est la légitimité des coûts engendrés par ces dispositifs ? Quelles retombées peut-on escompter ?

    L’investissement que requiert l’organisation de ce type d’événements doit-il être pensé en fonction des retombées sur l’œuvre elle-même (les futures entrées ou récompenses des films) ou en fonction des retombées sur la fréquentation des festivals et marchés ? Autrement dit ces dispositifs font-ils désormais parti d’un arsenal d’événements venant dynamiser les manifestations audiovisuelles ?

    Plusieurs champs de recherches particulièrement féconds pourront être mobilisés pour aborder ces questions :

– Les travaux des Production Studies (Mayer, Banks, Thornton) qui visent à conceptualiser les pratiques de travail des professionnels en mettant l’accent sur le monde de la production envisagé comme une culture et sur l’étude des pratiques des professionnels
– Le courant des Festival Studies et notamment des Film Festival Studies avec des travaux majoritairement Anglo-saxons (De Valck, Lordonova) qui envisagent le festival de film comme un objet de recherche spécifique, distinct des autres festivals, en raison notamment des enjeux économiques importants du secteur.
– Les travaux sur l’économie de la création qui permettront d’approfondir les débats autour des concepts de qualité et de talent dans le domaine artistique (Menger, De Nora, Shotté, Jeanpierre, Leverrato). Les études relatives aux instances de légitimation et de la valorisation d’une œuvre (Mourreau & Sagot-Duvauroux, Jullier&Leverratto, Benghozi, Duval & Marty, Gimello-Mespomb).
– Les travaux autour du croisement entre les dynamiques artistiques et économiques (Greffe, Benghozi, Roueff, Creton), l’étude du rôle des marchés du film (Laurichesse, Lecler).
– Les travaux en sociologie sur l’industrie du cinéma et de l’audiovisuel (Roueff, Rot, Winceslas) et sur la nature de cette intermédiation basée sur l’expertise (Mourreau, SagotDuvauroux).


Bibliographie indicative
Alexandre Olivier, La règle de l’exception, Écologie du cinéma français, Éditions EHESS, 2015.
Benghozi Pierre-Jean et Nenert Claire, « Création de valeur artistique ou économique. Du festival international du film de Cannes au marché du film », Recherches et Applications en marketing, 10 (4), p. 65-76.
Benghozi Pierre-Jean et Michelle Bergadaà, « Chapitre 10. Produire de la connaissance et mettre en cohérence les registres de la création scientifique : la démarche du pitch », Paul Beaulieu éd., La création de connaissance par les managers, EMS Éditions, 2015, p. 197-216.
Bourdieu Pierre, « Qu’est-ce qui fait le talent ? », Sciences Humaines, vol. 258, n° 4, 2014, p. 7-17.
Caves Richard, Creative industries: contracts between art and commerce, Cambridge (MA), Harvard University Press, 2000.
Creton Laurent, Économie du cinéma, Paris, Armand Colin, 6ème édition, 2020.
De Valck Marijke, Brendan Kredell and Skadi Loist, Film Festivals: History, Theory, Method, Practice, London, New York, Routledge, 2016.
De Verdalle Laure, Rot Gwenaelle, Le cinéma, travail et organisation, La dispute, 2013.
DeNora Tia, Beethoven et la construction du génie, Paris, Fayard, 1998.
Duval Julien, Marty Philippe, « Cinéma et intellectuels. La production de la légitimité artistique », Actes de la recherche en Sciences Sociales, p.161-162.
Duval Julien, Le Cinéma au XXe siècle. Entre loi du marché et règles de l’art, paris, CNRS, 2016.
Elsaesser Thomas, «Film Festival Networks: The New Topographies of Cinema in Europe» in European Cinema: Face-to-Face with Hollywood, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2005, p. 82-107.
Forest Claude, (dir.), L’internationalisation des productions cinématographiques et audiovisuelles, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2017,
Gimello-Mesplomb Frédéric, « Le prix de la qualité. L’état et le cinéma français (1960-1965) », Politix, 16, 61 (1), 2003, p. 95-122.
Iordanova Dina, The Film Festivals Reader, St Andrews, St Andrews Film Studies, 2013.
Jeanpierre Laurent, « De l’origine des inégalités dans les arts », Revue française de sociologie, vol. 53, n° 1, 2012, p. 95-115.
Jeanpierre Laurent, Roueff Olivier, La culture et ses intermédiaires, Archives contemporaines, 2014.
Jordan Jennie, « Negotiating values in the creative industries: fairs, festivals and competitive events », Cultural Trends, vol. 23, n° 1, 2014, p. 37-41.
Jullier Laurent, Leverratto Jean-Marc, Cinéphiles et cinéphilies, une histoire de la qualité cinématographique, Paris, Armand Colin, 2010.
Karpik Lucien, L’économie des singularités, Paris, Gallimard, 2007.
Laurichesse Hélène, (dir.), « Marchés du film : évolutions, mutations et perspectives », Entrelacs n° 14, 2018.
Lecler Romain, Sociologie de la mondialisation, La Découverte, 2013.
Leveratto Jean-Marc, La mesure de l’art, Sociologie de la qualité artistique, Paris, La Dispute, 2000.
Lizé Wenceslas, Delphine Naudier et Olivier Roueff, Intermédiaires du travail artistique. À la frontière de l’art et du commerce, Paris, La Documentation française, 2011.
Mauger Gérard, Droits d’entrée : modalités et conditions d’accès aux univers artistiques, Paris, Maison des sciences de l’Homme, 2006.
Mayer Vicki, Banks Miranda J., Thornton Caldwell John, Production Studies, Routledge, New York, 2009.
Menger Pierre-Michel, Portrait de l’artiste en travailleur. Métamorphoses du capitalisme, Paris, Le Seuil, 2002.
Menger Pierre-Michel, « Talent et réputation. Ce que valent les analyses sociologiques de la valeur de l’artiste, ce qui prévaut dans la sociologie », in Alain Blanc et Alain Pessin (éd.), L’art du terrain. Mélanges offerts à Howard S. Becker, Paris, L’Harmattan, p.105-161, 2004.
Menger Pierre-Michel, Profession artiste. Extension du domaine de la création, Paris, Textuel, 2005.
Menger Pierre-Michel, Le travail créateur. S’accomplir dans l’incertain, Paris, Gallimard/Le Seuil, 2009.
Mourreau Nathalie, Sagot-Duvauroux Dominique, Le marché de l’art contemporain, Paris, La découverte, 3ème édition, 2016.
Naudier Delphine, Wencelas Lizé, Sofio Séverine, Les stratèges de la notoriété, Archives contemporaines, 2014.
Quemin Alain, Les stars de l’art contemporain. Notoriété et consécration artistiques dans les arts visuels, Paris, CNRS Éditions, 2013.
Schotté Manuel, « Le don, le génie et le talent. Critique de l’approche de Pierre-Michel Menger », Genèses, vol. 93, n° 4, 2013, p. 144-164.
Schotté Manuel, « Vous avez dit “talentueux” ? », Fondation Copernic éd., Manuel indocile de sciences sociales. Pour des savoirs résistants, La Découverte, 2019, p. 706-716.
Sorignet Pierre-Emmanuel, « Un processus de recrutement sur un marché du travail artistique », Genèses, n° 57, p.64-88, 2004.
Taillibert Christel, Tribulations festivalières : Les festivals de cinéma et audiovisuel en France, Paris, Harmattan, 2009.

Comité scientifique
Laurent Creton, Professeur à l’Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle.
Frédéric Gimello-Mesplomb, Professeur à l’Université d’Avignon.
Réjane Hamus-Vallée, Professeure à l’Université d’Évry – Université Paris Saclay.
Christel Taillibert, Maîtresse de Conférences à l’Université de Nice Sophia-Antipolis.
Bérénice Bonhomme, Maîtresse de Conférences à l’ENSAV, Université Toulouse – Jean Jaurès.
Hélène Laurichesse, Professeure des Universités à l’ENSAV, Université Toulouse – Jean Jaurès.

Comité Organisateur
Bérénice Bonhomme, Maîtresse de Conférences à l’ENSAV, Université Toulouse – Jean Jaurès.
Hélène Laurichesse, Professeure des Universités à l’ENSAV, Université Toulouse – Jean Jaurès.