Sara Rogiers et Frédéric Truyen

L’enseignement de l’histoire dans une salle informatique : le concept mis en place au Centre Maerlant

Cet article est un résumé de l’exposé présenté lors de la Table Ronde : « Histoire et E-Learning », en mars 2005 à l’Université Toulouse-Le Mirail. Après une présentation du Centre Maerlant, nous expliquons le concept d’E-Learning en Histoire développé au Centre Maerlant. Nous terminons par un exemple emprunté à un cours existant..

Le Centre Maerlant est né dans le sillage d’un projet d’innovation didactique lancé à l’Université de Leuven (Katholieke Universiteit Leuven) en 1997. Le projet avait pour objectif d’étudier la façon dont les nouvelles technologies de l’information et de la communication pourraient être utilisées pour améliorer la qualité de l’enseignement en Histoire. Le centre lui-même a été fondé en 1999. Il porte le nom de Jacob van Maerlant, un savant du XIIIe siècle qui a traduit en néerlandais, c’est-à-dire en langue vernaculaire, des textes scientifiques contemporains. En ce sens, on peut le considérer comme un précurseur de notre vulgarisation scientifique.

Le Centre Maerlant cherche à concevoir et à mettre au point des applications pédagogiques numériques afin d’aider les utilisateurs ou les étudiants à acquérir et à renforcer les compétences cognitives nécessaires à l’interprétation correcte de données historiques. Dans la pratique et jusqu’ici cette démarche s’est traduite par la conception et la production de neuf CD-ROMs portant sur diverses matières historico-culturelles et par le développement de nombreux sites Web et de plusieurs plates-formes en ligne pour l’enseignement à distance.

Le concept Maerlant

Le Centre Maerlant cherche à appuyer la réalisation de ses produits d’E-learning sur des bases scientifiques solides. L’approche scientifique des sources historiques présuppose avant tout la lecture critique de ces sources. Pour utiliser les sources de façon didactique, nous avons besoin d’une approche systémique qui d’une part enseigne aux étudiants des compétences critiques et qui d’autre part apprend comment réutiliser et mettre en application ces compétences dans des situations bien différentes. Le concept Maerlant pour un usage didactique des sources historiques consiste en une méthode à  trois niveaux.

Il y a d’abord le niveau descriptif de la lecture, puis le niveau de l’interprétation du contexte, enfin le niveau de l’explication complète. L’inspiration de cette approche des sources historiques vient, d’une part, de la méthode historique et, d’autre part, du champ de l’iconologie.

En utilisant le terme de « lecture », notre intention n’est pas de suggérer que cette méthode d’analyse est  une   méthode strictement               « textuelle ».. En fait la méthode Maerlant a été introduite aussi avec grand succès dans l’étude de sources visuelles.

Le Centre Maerlant a développé plusieurs publications électroniques ou petites plates-formes d’étude consacrées à plusieurs types de sources relatives, elles, à plusieurs types de sujets. Ces publications ont été réalisées sous la forme soit de CD-ROMs, soit de sites Web.  Le travail avec les publications électroniques permet une certaine organisation des cours mais aussi et surtout de l’aide aux étudiants, que les publications traditionnelles sur papier sont incapables de fournir. Le soutien didactique aux  étudiants par ces publications électroniques s’effectue aux trois niveaux de lecture et de compréhension du concept Maerlant.

Au niveau descriptif, la source est lue pour qu’on découvre ce qu’elle dit littéralement. On cherche le sens grammaticalement correct de la représentation textuelle ou visuelle et ensuite on analyse la structure de l’énoncé. Grâce aux moyens hypertextuels, toutes les données nécessaires à la compréhension de la source à ce niveau descriptif sont jointes à la source.

Le deuxième niveau est le niveau contextuel : l’interprétation de la source. C’est en partant du contexte de la source que l’étudiant peut arriver aux bonnes conclusions sur l’information contenue dans la source. Ici le plus important est que l’étudiant comprenne toutes les implications temporelles, spatiales et sociales du contexte de production de la source.

Le troisième et dernier niveau est celui de l’interprétation globale, où la signification et le message caché ou implicite de la source peuvent être mis à jour. La plate-forme didactique fournit ici les éléments requis pour retrouver le sens et la signification de la source, comme par exemple : la mentalité de l’époque, l’idéologie et les idées générales sur l’homme et la société dans son ensemble.

Un exemple concret

L’exemple suivant décrit la mise en pratique du concept Maerlant dans un CD-ROM didactique sur la vie et le milieu social de Nicholas Rockox, maire de la ville d’Anvers au XVIIe siècle.

Le CD peut être utilisé de plusieurs manières. Il peut se lire comme un livre électronique. Il peut aussi être mis à profit pour réaliser des ateliers pratiques où s’exercent des compétences historiques. Les professeurs peuvent l’employer comme outil de référence. Enfin, les étudiants peuvent l’employer dans un processus d’auto-apprentissage. Dans l’exemple suivant, il est utilisé comme outil pour l’enseignement de l’Histoire dans une salle de classe informatisée.

Pour reconstruire l’environnement mental et physique de Nicholas Rockox, nous disposons de trois sources : d’abord sa maison qui est devenu  un musée, l’inventaire de son mobilier d’intérieur par un notaire après sa mort, enfin la peinture d’une pièce de sa maison, par un peintre contemporain bien connu.

Dans un premier temps, tous les étudiants sont invités à se familiariser via quelques lectures avec le personnage Nicholas Rockox et son époque. Ils peuvent faire un tour virtuel de la maison, regarder l’inventaire et sa transcription, puis regarder la peinture de la plus grande salle dans la maison de Rockox. Après, ils sont invités à jouer un quiz basé sur une ligne chronologique interactive, ce qui leur permet d’assimiler et de synthétiser l’information recueillie. Ils sont également invités à comparer la salle dans l’excursion virtuelle et la salle représentée dans le tableau.

À la fin de ce parcours didactique ils ont compris que toutes ces sources sont des artefacts construits dans des buts très différents et que toutes montrent non seulement différents aspects mais aussi différents points de vue de l’objet historique.

Le but de cet exemple emprunté à un cours concret est le même que celui des autres publications numériques du Centre Maerlant : aider les étudiants à développer des compétences cognitives critiques qu’ils peuvent employer par la suite pour évaluer non seulement la valeur historique des sources, mais aussi toutes sortes d’informations.

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