l’IRP GOCHE « GéOarchéologie des CHangements Environnementaux dans la zone du bas Danube” réunit sous un même dispositif un collectif des spécialistes des géosciences de l’environnement, de la bio-archéologie, des archéologues, des historiens et des géographes, afin de constituer un pôle international et interdisciplinaire de recherche, formation et information scientifique autour de la problématique des changements environnementaux et de leur impact pour les sociétés dans la zone du bas Danube, en Roumanie.
Ce projet vient consolider des collaborations déjà établies de longue date entre ces deux pays dans le cadre 1- du Site d’Etude en Ecologie Globale “SEEG Danube” de l’Institut Ecologie Environnement du CNRS et 2- de la Mission “Archéologie du delta du Danube” portée par Laurent Carozza (CNRS UMR 5602 GEODE, Toulouse) et Cristian Micu (ICEM, Tulcea) . Il a pour objet de permettre l’organisation de réunions de travail ou de séminaires, le développement d’activités de recherche communes y compris des recherches de terrain, et l’encadrement d’étudiants.
Résumé du projet scientifique :
Les littoraux et les deltas sont des “hot spots” pour la biodiversité. Ces milieux, soumis aux changements globaux, constituent des écosystèmes sensibles dont la gestion requiert de comprendre les mécanismes de formation et de fonctionnement. L’objectif du Laboratoire international Associé est de reconstituer, dans la longue durée historique, les trajectoires d’évolution de l’un des plus vastes ensembles hydrologiques : le Bas Danube et son delta.
Il s’agira de mettre en évidence le rôle des forçages hydro-climatiques comme facteur de contrôle, et l’impact des interventions humaines anciennes ou récentes sur la construction de la plus vaste zone humide européenne. Les travaux récents montrent que les premières interventions humaines apparaissent dans le delta du Danube vers 7000 BP. L’enjeu est d’appréhender les modalités du passage d’un système naturel anthropisé (paléo-anthropocène), défini comme un système co-construit, vers un anthropocène dans lequel l’anthropisation devient le facteur de forçage déterminent.
La manière dont la Mer Noire a évolué au cours du Post-glaciaire est un objet de controverse aussi bien en ce qui concerne la date de reconnexion avec le système méditerranéen via la Mer de Marmara, que l’ampleur des transformations que cette reconnexion à induit ou encore sur les conséquences sur les dynamiques de peuplement des rivages occidentaux et orientaux de cette mer marginale. Les tentatives de reconstitution antérieures se basent principalement sur l’étude des enregistrements marins- aussi bien des données de carottages que des données de sismique réflexion pour la période ancienne (< 6000 BP). Ces modèles ont peu mobilisé les données continentales, i.e. les deltas, pour mieux contraindre cette évolution alors qu’ils sont susceptibles de fournir des données de première importance. Ce projet se propose de discuter les différents scenarii qui ont été proposés à partir des connaissances sur l’évolution d’un système deltaïque, le delta du Danube, tel qu’elle peut être reconstituée par une approche couplant données géomorphologiques, archéologiques et paléo-écologiques. Les données sur l’évolution des paysages, du peuplement et des écosystèmes ainsi recueillies seront ensuite utilisées pour tester des scenarii d’évolution du peuplement du delta du Danube au cours de l’Holocène et permettre ainsi une validation.
Dans ce projet, l’ensemble de l’histoire du delta Holocène, depuis la reconnexion avec la Mer Méditerranée jusqu’à la période contemporaine est prise en considération. Loin d’être un espace naturel, le delta du Danube est une mosaïque d’écosystèmes anthropisés (chenaux principaux et secondaires, lacs, dunes, zones humides interdunaires…) dont le processus de production reste encore largement sous-estimé par les gestionnaires (Commission Protection du Danube, CPD, créée en 1994 à Sofia et effective depuis 1998 ou Réserve du Delta du Danube).
L’enjeu de ce projet sera de reconstituer l’évolution géo-historique environnementale de cet espace et de mettre en lumière le rôle des interventions humaines anciennes ou récentes dans le fonctionnement du milieu, son altération et son éventuelle dégradation dans l’optique de sa prise en compte dans la gestion de ce milieu. Son originalité est de se positionner à l’interface entre approche géo-historique et approche géomorphologique, c’est à dire de coupler l’approche par la documentation ancienne aux sources de terrain en les validant et les complétant. Il s’appuiera pour les approches géo-historiques sur une documentation exceptionnelle et inédites issues des archives communistes en cours de déclassification et sur la connaissance du delta par l’équipe support et les organismes partenaires pour le volet terrain.