Marion Clavilier
Doctorante allocataire monitrice en littérature comparée, CELIS (Centre de Recherches sur les Littératures et la Sociopoétique), Université Clermont – Auvergne
marion-charlotte.clavilier@laposte.net
Pour citer cet article : Clavilier, Marion, « Espace typographique, espace chorégraphique dans État d’Anne-Marie Albiach : le texte lu au miroir de la danse. », Litter@ Incognita [En ligne], Toulouse : Université Toulouse Jean Jaurès, n°7 « Territoire et intermédialité », automne 2016, mis en ligne en 2016, disponible sur <https://blogs.univ-tlse2.fr/littera-incognita-2/2018/01/09/la-ville-contemp…ite-au-generique/>.
Télécharger l’article au format PDF
Résumé
Nous nous proposons d’étudier l’écriture d’Anne-Marie Albiach dans État (1971) comme une chorégraphie afin de montrer que la danse est un outil utile pour l’analyse sémiotique du texte poétique. Poésie et danse au XXe siècle envisagent de la même façon l’espace en abolissant les lois de la perspective et en substituant un sens-direction à un sens-signification. Dans la mouvance de Un coup de dés jamais n’abolira le hasard (1897) de Stéphane Mallarmé, la page apparaît comme une scène pour les énoncés textuels mis en mouvement à la lecture, comme un espace dynamique façonné par les interactions entre les caractères et le blanc. La notion de « territoire » nous permet d’envisager l’intermédialité sous l’angle d’une « co-présence » (Rémy Besson) paradoxale de la danse et de l’écriture et de concevoir la spatialisation et l’espacement du texte comme un dispositif chorégraphique dans État. Grâce à la « chora sémiotique » théorisée par Julia Kristeva, est établi un continuum entre le corps et le langage, qui justifie une étude du texte poétique au prisme de la danse.
Mots-clés : intermédialité – écriture – chorégraphie – spatialisation de la poésie – sémiotique
Abstract
We intend to study the writing of Anne-Marie Albiach in État (1971) as a choreography to show that dance is a useful tool for semiotic analysis of the poetic text. Poetry and dance in the XXth century consider in the same way space abolishing the laws of perspective and substituting a sense-direction to a sense-meaning. In the wake of Un coup de dés jamais n’abolira le hasard (1897) of Stéphane Mallarmé, the page appears as a stage for textual statements moved forward in the reading, as a dynamic space shaped by interactions between letters and the blank. The notion of « territory » allows us to consider intermediality in the perspective of a paradoxical « co-presence » (Rémy Besson) of dance and writing, and to perceive the spatialization and the spacing of the text as a choreographic device in État. With the concept of « semiotic chora » theorized by Julia Kristeva is established a continuum between body and language that justifies a study of the poetic text through the prism of dance.
Keywords: intermediality – writing – choreography – spatialization of poetry – semiotics
Sommaire
Introduction
1. Pertinence d’une relation intermédiale danse / poésie
2. Une écriture chorégraphique : sémiotique de l’espace poétique albiacien
Conclusion
Notes
Bibliographie
Introduction
Les notions « territoire » et « intermédialité » peuvent paraître antithétiques. En effet le territoire se définit en négatif par rapport à l’espace de l’autre, tandis que l’intermédialité fait signe vers une mise en relation d’au moins deux territoires – au sens large, « territoire » désignant ici une aire du savoir – distincts. La limitation dont est porteur le « territoire » semble incompatible avec la mise en relation sous-tendue par l’« intermédialité », le préfixe « inter » définissant une zone du milieu, de l’entre-deux. Selon Éric Méchoulan, l’approche intermédiale déconstruit la séparation des objets d’étude caractéristique de l’approche disciplinaire traditionnelle et invite à prendre en compte les relations qui unissent ces objets :
Le préfixe « inter » vise à mettre en évidence un rapport inaperçu ou occulté, ou, plus encore, à soutenir l’idée que la relation est par principe première : là où la pensée classique voit généralement des objets isolés qu’elle met ensuite en relation, la pensée contemporaine insiste sur le fait que les objets sont avant tout des nœuds de relation, des mouvements de relation assez ralentis pour paraître immobiles.1
L’ « intermédialité » mettrait en péril le compartimentage disciplinaire induit par la notion de « territoire » en provoquant une circulation et un brouillage des frontières entre les champs du savoir.
Le territoire, c’est aussi une certaine portion d’espace, et en particulier, une portion d’espace textuel et chorégraphique : en jouant d’une analogie, on pourrait dire que la page conçue comme territoire pour un écrire a la fonction d’espace scénique pour les mots danseurs.
Nous aimerions envisager l’interaction de l’espace typographique et de l’espace chorégraphique, et avec elle, l’interaction entre deux territoires disciplinaires, celui de l’écrire et du danser. Avant même le transfert du poème en danse, le texte projeté sur la page produit une chorégraphie à laquelle assiste et participe le lecteur.
En parlant de territoire, on touche à la mise en espace et à la mise en mouvement du texte à la surface de la page. Si la chorégraphie désigne, au sens large du terme, « l’art de danser»2 , la « chorographie » est un terme vieilli désignant la « [p]artie de la géographie qui a pour objectif de décrire l’ensemble d’une contrée et d’en indiquer les lieux remarquables. »3 Si les deux termes issus du grec se ressemblent en français contemporain, ils ne sont pas issus de la même racine : le premier, orthographié avec un omicron, provient de choreia, la danse, le second, écrit avec un oméga, comporte le formant « choro », « pays, contrée » et signifie littéralement « description d’un pays ». La chorographie sera entendue ici comme l’analyse de la spatialisation du texte poétique dans l’espace en deux dimensions qu’est la page. Quant à la chorégraphie, elle servira à mesurer la mise en mouvement des unités textuelles enclenchée lors de la lecture, du fait de la spatialisation des énoncés poétiques. En confrontant ces deux notions à travers la question de l’espace, nous voudrions contribuer à développer une analyse de la poésie contemporaine au miroir de la danse.
C’est Mallarmé qui a impulsé le principe d’une poésie typographique. Auparavant Aloysius Bertrand dans Gaspard de la nuit avait donné des injonctions à « M. le Metteur en pages » sur la disposition du texte poétique4. Dans Un coup de dés jamais n’abolira le hasard, la nouveauté n’est pas la quantité de blanc utilisée5 mais le principe de « dispersion » du texte imprimé, selon le mot de Mallarmé dans la préface. L’écrivain révolutionne le traitement de la page ; grâce à l’alternance rythmique entre le blanc et le noir, le texte produit l’impression d’être mis en mouvement sur la page.
S’il n’a pas créé un « genre », Mallarmé a bel et bien montré, de façon décisive et virtuellement inépuisable, ce que pouvait être une page, dès lors que l’on commençait à lui conférer un statut poétique.6
Dans la seconde moitié du XXe siècle, les auteurs de la modernité négative réinvestissent l’héritage mallarméen. Anne-Marie Albiach se situe dans une telle mouvance7. Or comme l’a montré Jean-Marie Gleize, il existe un saut qualitatif entre Mallarmé et la poésie albiacienne. La qualité dynamique du texte est désormais exacerbée : le « mouvement est suscité par variations de distance entre différents énoncés textuels » et « la distance est mobile, […] imprévisible, n’obéissant à aucune « règle » apparente ». Le « blanc [est] actif, dynamique » et l’on assiste au « mouvement des éléments dans l’espace (ou le vide). »8 Est prise en compte par Mallarmé et ses continuateurs la matérialité du support, indissociable de la spatialisation du texte poétique : le format de la page, l’emplacement des caractères, mais aussi le grain du papier et les dimensions du livre, qui influent sur la réception du texte.9
Sera envisagée dans cet article la relation intermédiale de la danse et du texte poétique dans État10 . Selon la classification de Rémy Besson11 l’intermédialité peut s’envisager sous trois angles : la co-présence, le transfert et l’émergence12. Le transfert, conçu comme passage d’un médium à un autre, ne concerne pas le cadre de notre étude car notre propos n’est pas d’étudier l’adaptation du poème en danse mais, en amont, quels éléments du texte participent d’une écriture chorégraphique13. La co-présence, second type de relation intermédiale, définit l’inscription d’un médium dans un autre ; sa forme la plus évidente est la citation. La co-présence atteint son stade ultime lorsque l’on assiste à une fusion des médiums14. Dans la poésie albiacienne, il y a lieu de déceler une co-présence des médiums danse et poésie dans le texte. Il ne s’agit pas d’analyser l’insertion de la danse dans le texte, ce qui reviendrait à étudier la danse comme un motif entretenant une relation d’externalité à l’écriture, mais la façon dont l’écriture se fait mode de composition chorégraphique. Il y a ainsi prise en compte de leur convergence, voire de leur chevauchement.
Nous verrons d’abord en quoi il est pertinent d’analyser le texte albiacien au prisme de la danse, ce qui nous amènera à discerner les éléments d’une écriture chorégraphique à partir du traitement de l’espace dans État.
1. Pertinence d’une relation intermédiale danse / poésie
Il convient de se demander d’abord de quelle façon intervient l’intermédialité dans État et en quoi celle-ci implique une co-présence de la danse et de la poésie.
1.1. Un « théâtre du poème » ? (J.M. Gleize)
Il pourrait être pertinent d’analyser la poésie d’Anne-Marie Albiach au prisme de l’art théâtral dès lors que la page fonctionne comme un espace scénique où évoluent des personnages, les mots et les caractères d’imprimerie. C’est l’hypothèse que formule Jean-Marie Gleize, dans la lignée de Julia Kristeva qui traite de l’espace typographique de la poésie mallarméenne comme d’une scène théâtrale :
La disposition spatiale d’Un coup de dés vise à traduire sur une page le fait que le langage poétique est un volume dans lequel s’établissent des rapports inattendus (illogiques, méconnus par le discours) ; ou même une scène de théâtre « exigeant l’accord fidèle du geste extérieur au geste mental ». (préface à Igitur)15
L’usage des termes « monologue », « voix », « chœur » dans État est pointé par le critique pour étayer l’hypothèse d’une théâtralisation de l’écriture. Il y aurait une co-présence de la poésie et du théâtre dans le texte albiacien, par le biais de l’allusion, selon la taxinomie proposée par Rémy Besson. L’autre raison pour laquelle émerge une théâtralisation de l’écriture est que cette poésie articule le vécu d’un corps au langage, le geste à la geste poétique :
La théâtralité implique le corps. Sur la scène les voix sont liées aux gestes de leur corps. De même qu’il y a « l’espace », il y a « le » corps.16
Cependant, du fait que la « théâtralité » du poème touche à « une pratique, un mode de relation au texte, une façon de le réaliser, de le verticaliser, de se l’incorporer, de le respirer, de l’incarner »17, du fait même que l’écriture albiacienne engage le corps, il semble autant pertinent d’analyser cette œuvre à partir du médium danse qu’à partir du médium théâtre.
Jean-Marie Gleize applique une analogie théâtrale à la poésie d’Albiach en appréhendant les mots et les signes graphiques comme des personnages anonymes, sans épaisseur psychologique et à peine humains. Les héros en sont les catégories de la grammaire, noms et adjectifs, affectés par des changements d’état. Selon le critique, la poésie se donne à lire comme un combat agônistique entre des protagonistes abstraits relatifs à l’écriture : le noir et le blanc, la présence et l’absence, le tracé et le vide. Ainsi est perceptible « [t]oute une « scénographie » en somme, une théâtralité sans théâtre, réduite peut-être « à sa simple expression ». ».18 Or parler de « théâtralité sans théâtre » revient à mettre en doute la qualité dramaturgique d’une telle poésie. À la différence du théâtre, cette écriture ne met pas en jeu de véritables personnages aussi l’art chorégraphique nous semble-t-il un outil plus pertinent pour éclairer le texte albiacien que le théâtre.
En employant l’expression « théâtre du poème », le critique met l’accent sur la spatialisation du texte poétique. Dans État la page devient une scène métaphorique où s’accomplit une performance pour le lecteur. Or le théâtre comme la danse scénique impliquent un dispositif spectaculaire et un espace prévu pour la représentation. Au-delà des allusions explicites au théâtre, dans sa forme même, la poésie albiacienne apparaît davantage apparentée à la danse, en raison de la présence du corps et de l’usage d’une scénographie originale.
1. 2. La musicalité du texte
Le deuxième médium dont Jean-Marie Gleize relève la présence dans la poésie d’Anne-Marie Albiach est la musique19. Une analyse du lexique confirme cette observation. Ainsi le terme « mouvement », qui relève du domaine musical, est employé par Albiach20. Or il appartient également au champ sémantique de la danse qui partage une grande partie des termes servant à la désigner avec la musique. Ce constat nous conforte dans l’idée que la poésie albiacienne est empreinte d’une qualité non seulement musicale mais aussi chorégraphique.
Historiquement, en Occident, la musique a toujours détenu une suprématie sur la danse21. Elle possède par rapport à la danse « un statut institutionnel dominant, dominateur, et même hégémonique » :
En raison de sa structure mathématique, scripturaire, et par là, permanente et relativement objective, la musique a connu un essor théorique considérable que n’a malheureusement jamais manifesté la danse.22
La danse emprunte à la musique son vocabulaire : le nom « cadence »23, par exemple, dénote la « [m]esure qui règle le mouvement de celui qui danse » aussi bien que la « [s]uccession d’accords selon certaines règles harmoniques, terminant une phrase musicale».24 Dès lors, la musicalité de la poésie albiacienne semble être le corollaire de sa teneur chorégraphique. En effet, pour Anne-Marie Albiach, la musique marque de son empreinte le corps ; selon Jean-Marie Gleize la musique « est dans le corps, la mémoire. Elle est le corps – la mémoire. »25 Un passage d’État que nous reproduisons sans reproduire fidèlement la mise en espace du texte l’illustre bien : « Non la musique nous concerne / avenue elle offre / de sa poitrine à la taille / ceinte. »26 Au cours d’une procession rituelle, des jeunes filles forment un « CORTÈGE » rythmique, sans discrimination entre la musique et la danse. Un tel passage met au jour l’ « orchésalité »27de la poésie d’Anne-Marie Albiach, en d’autres termes, sa dimension syncrétique, à la fois musicale et chorégraphique.
S’il convient de souligner chez Anne-Marie Albiach l’importance de la musicalité, héritée des conceptions de Mallarmé sur l’écriture comme Musique, il semble qu’il faille néanmoins nuancer l’importance de cette dernière. En effet la vue prime sur le son dans la poésie post-mallarméenne et l’on assiste à la résorption des qualités musicales et sonores du verbe dans la disposition spatiale du poème. Comme le souligne Laurent Mattiussi, avec Mallarmé, la musique devient irréductible à la mélodie et à l’euphonie puisque c’est le texte qui se change in fine en musique :
Orphée est encore poète et musicien mais non comme aux temps premiers : pourquoi persister à chanter la poésie quand le poème est le chant même ? Mélodie, harmonie, rythme, rien de ce qui fait la musique n’est plus appelé à venir compléter la parole d’Orphée quand le verbe poétique est censé incorporer et mettre en jeu à lui seul tous les moyens de l’expression musicale. […] La grande, la vraie Musique, même si elle commence par là, ne se réduit pas au concert, qu’il soit de syllabes ou d’instruments.28
C’est aussi le cas pour Anne-Marie Albiach qui partage avec Mallarmé l’idée que la « musique » désignerait l’« Idée ou [le] rythme entre des rapports »29. Chez Mallarmé et Albiach le verbe poétique constitue pour ainsi dire une musique épurée de la musique. Si celle-ci les intéresse, c’est pour l’abstraction qu’elle renferme et parce que les processus de composition – musical aussi bien que chorégraphique – demeurent les horizons absolus de l’écriture30.
La polyvalence des termes relatifs à la musique et à la danse montre que l’auteur d’État brouille la différenciation des territoires médiumniques. La présence de la musique dans le poème semble étayer l’hypothèse d’une écriture chorégraphique dès lors que, selon Michel Bernard, danse et musique procèdent d’une souche commune. En raison de sa filiation mallarméenne, la poésie albiacienne serait aussi bien chorégraphique que musicale.
1.3. Présence de la danse dans État
Pour Jean-Marie Gleize, l’écriture albiacienne recèle un potentiel chorégraphique mais la danse en est une composante intermédiale parmi d’autres :
de façon chorégraphique-abstraite, musicale-algébrique là (l’écriture albiacienne), c’est la poésie comme telle qui se trouve mise en cause, en question, durablement.31
Le critique décèle l’importance du mouvement32, pourtant il n’analyse pas à proprement parler la poésie albiacienne comme une « chorégraphie »33, se contentant d’affirmer qu’elle se rapproche de la danse : « Quelque chose s’accomplit là de l’ordre de la danse […] et d’un rituel dont le code nous échappe […]. » 34Nous estimons qu’il convient d’affirmer avec plus de fermeté cette proposition.
Paradoxalement, Albiach ne fait aucune allusion explicite au médium danse dans ses poèmes35. Il ne s’agit pas d’un phénomène de surface mais d’une irrigation souterraine, l’auteur n’ayant pas reconnu de son vivant de dette à l’égard de la danse alors qu’elle a emprunté consciemment les ressources du théâtre, pratique artistique marquante de son apprentissage36.
Des relevés lexicaux détaillés permettent de déceler l’importance du mouvement dans État. De tous les termes relatifs à cette notion, la fréquence du nom « mouvement » est la plus élevée37. D’autres termes du même paradigme sémantique sont employés : « vélocité » (p.37), « trajectoire » (p.59), « pas » (p.60), « élan » (p.83), « attitudes » (p.97-98), « MAINTIEN » (p.97), « descente » (p.97), « vitesse » (p.98). Parfois, l’énergie du mouvement est décrite, comme dans le passage suivant qui développe une interrogation sur la qualité du « déplacement » :
Quelle est la compacité du déplacement
(le mouvement)
(sa rébellion
opaque)38
Plus loin est fait mention d’un état de « compacité », « énergie / dont le mouvement ne nous concerne / rétractile».39 Dans un autre passage, comme en danse, la puissance poétique du geste passe par la « justesse » de son expression car « la justesse / du geste / nous forme infirme ».40 Le sujet poétique accomplit aussi une danse intérieure : « je bougeais donc en moi-même / à son rythme et refusait-il la déchirure ».41 Intervient de surcroît dans État une réécriture du motif de la descente d’Igitur, qui montre qu’Albiach réactive le principe de la spatialisation mallarméenne :
par la descente
ne peut
sans sensualité42
Se donne ici à voir une écriture en cours de tracé, tour à tour « descendance » et « courbe » : « en descendance et non irréductible / cette courbe qu’elle forme en gratuité ».43 La courbe est modulée sous la forme de la spirale : « des spirales / l’élément de / la parturition ».44 Le recueil met aussi en jeu une inclinaison de la lettre, avec la lettre E penchée du titre. Une continuité surgit entre les ordres du langage et ceux du corps : la lettre est pareille à un buste en torsion. Il existe dans le langage poétique une impulsion qui prend son départ et aboutit dans le corps en mouvement.
La convergence entre la corporéité et l’espace textuel est étayée par l’usage de termes référant aussi bien à la grammaire qu’au corps dansant, à l’écriture poétique qu’à l’écriture chorégraphique, tels la « coordination seconde »45 dénotant la syntaxe d’une poésie littérale et l’harmonisation des mouvements des différentes parties du corps, faculté nécessaire à tout danseur. Le mot « lapsus » issu d’un mot latin signifiant « action de trébucher, erreur »46 témoigne d’une même collusion entre le corps et le langage. Dans État, le lapsus se manifeste en son sens étymologique comme glissement :
j’ai commis envers toi
de par mon insuffisance
ce lapsus47
Le passage est ensuite repris à l’identique48 sur une autre page, entre guillemets. Les deux passages étant séparés par deux pages blanches, il s’agit pour le lecteur d’opérer un glissement, de franchir à grandes enjambées un seuil, le blanc matérialisant la distance à traverser. Ce faisant Anne-Marie Albiach redéfinit l’enjambement. Ce dernier n’est plus le « [r]ejet au début du vers suivant d’un ou plusieurs mots indispensables à la compréhension du sens du premier vers »49 car l’auteur recourt à une poésie qui récuse les formes traditionnelles que sont le vers et la strophe. À la qualité statique de l’ancien enjambement est préféré l’élan dynamique, la mobilité d’une enjambée physique à travers l’espace de la page50.
Ainsi l’intermédialité est au cœur de la poésie albiacienne qui possède une qualité théâtrale et musicale, néanmoins, la primauté du corps et le traitement de l’espace justifient que l’on examine en détail sa teneur chorégraphique.
2. Une écriture chorégraphique : sémiotique de l’espace poétique albiacien
Si la poésie albiacienne ne mentionne pas explicitement la danse, la disposition des caractères sur la page s’apparente à une écriture chorégraphique. Le texte conçu comme dispositif visuel statique est mis en mouvement lors de la lecture : l’œil du lecteur circule entre le blanc et les caractères imprimés, injectant du volume à un espace en deux dimensions. La chorographie, entendue comme l’analyse des mécanismes de la spatialisation du texte poétique sur une surface en deux dimensions, cède donc la place à une étude de la teneur chorégraphique du poème, à celle de sa dynamique et de ses rythmes spatiaux.
2.1. Chorégraphie de l’espace albiacien
Dans État, l’« espace graphique »51 a une fonction prépondérante parce qu’il produit du sens, jouant le rôle d’une scène. Les mots sont projetés sur la page et semblent danser sous l’œil du lecteur. C’est sans doute pourquoi Jean-Marie Gleize a relevé la qualité « théâtrale » de cette poésie : étymologiquement, le mot « théâtre » désigne le lieu de la représentation52. En fait la dimension spatiale de la poésie albiacienne peut être analysée au miroir de l’art chorégraphique car la danse comme le théâtre supposent un espace scénique.
Pour Julia Kristeva, la langue courante obéit au principe de linéarité du discours. Les unités sont déplaçables sans altération du sens. En revanche, la poésie, et plus précisément la poésie mallarméenne, est tributaire de la configuration spatiale choisie : « L’énoncé poétique n’est lisible dans sa totalité signifiante que comme une mise en espace des unités signifiantes ».53 De cette façon chez Mallarmé et ses successeurs la page acquiert un volume, ainsi pour Albiach fonctionne-t-elle comme un espace en quatre dimensions :
leur présent deux dimension
l’éternité quatre54
Le mouvement est suscité par des modulations de distance entre les différents énoncés poétiques : « la distance est mobile, […] imprévisible, n’obéissant à aucune « règle » apparente ».55 La variation de l’espacement entre les mots génère l’impression d’un mouvement. Ceux-ci semblent apparaître et disparaître dans le blanc, circuler à la surface de la page. La poésie d’Anne-Marie Albiach parachève donc les recherches mallarméennes sur la poésie comme dynamique spatiale.
Il ne serait pas possible de lire le texte albiacien avec une autre configuration spatiale. Ainsi plutôt qu’un sens-signification, il y aurait à chercher dans cette poésie un sens-orientation ou un « sens-direction ».56 La lecture est une affaire de parcours, de trajectoire à se frayer parmi les énoncés poétiques. Le lecteur a la possibilité d’aller et venir dans toutes les directions possibles. Selon le sens (direction) choisi, le texte acquiert un sens (signification) différent :
première énigme
brutale de toute57
En pareil cas, une lecture horizontale de gauche à droite « Première énigme brutale de toute » est possible, mais une lecture en colonnes « Première brutale énigme de toute » est tout aussi pertinente, de même qu’une lecture en diagonale. En l’absence de fléchage par le texte et du fait que chaque segment d’énoncé soit un constituant du groupe nominal, la lecture est multidirectionnelle. Une fois celle-ci terminée, il est nécessaire de la reprendre « en sens inverse ».58 Comme dans les chorégraphies de Merce Cunningham où le spectateur peut à sa guise fixer son attention sur tel ou tel danseur, la poésie albiacienne instaure une lecture in-sensée et décentrée. Les lois de la perspective sont bouleversées puisque chaque segment du texte constitue un centre possible de la page.
La spatialisation du texte poétique incite le lecteur à être actif dans sa réception du poème. Le décentrement de l’espace, l’abolition de la perspective et la substitution d’un sens-orientation à un sens-signification révèlent la proximité de la poésie dite « littérale » avec la danse contemporaine.
2.2. L’unité du sujet poétique grâce au continuum corps-langage
Le continuum entre le corps et le langage dont fait montre la poésie d’Anne-Marie Albiach est un dernier élément justifiant qu’on analyse celle-ci au miroir de l’art chorégraphique.
La poésie albiacienne fait voir une tension entre le charnel et l’abstraction59. L’identité humaine s’efface au profit d’un pur agir : « il s’est passé / quelconque chose / dont l’anonymité / monstrueuse / me fascine ».60 Comme un chorégraphe, la poétesse cherche à appréhender les catégories fondamentales de l’esprit humain, temps, espace, « substance »61 et nombre, en les incarnant dans le vécu du corps. Chacun de ses textes comporte une dimension métapoétique puisque ces paramètres interviennent dans tout processus de composition. L’abstraction ne se départit pas de l’expérience concrète : la mathématique issue d’un espace mental est « incorporée, « inhérée » au corps de celle qui écrit ».62 Cette poésie prend son départ dans le corps : « le corps qui prend / de savoir / les poses »63, mais les traits physiques sont gommés grâce à des termes au sémantisme imprécis et au présent générique. Le corps n’exclut pas l’épure comme on le voit dans le passage suivant : « ils s’allongent […] / dans le langage pratique mental / des images dimensionnelles / d’harmonie / et le blanc ».64 De même, dans l’énoncé « c’est encore le contact qui abstrait / le charnel de la terre »65, le toucher fonctionne paradoxalement comme un opérateur d’abstraction.
Ailleurs le sujet poétique se dédouble en deux instances, l’une corporelle et ignée, l’autre abstraite et « vide », désincarnation de la première présence : « tandis que / « je » persiste avec le feu, né / mouvement / l’apparition est vide de moi ».66 Pour Anne-Marie Albiach il existe un conflit entre le corps et le langage dès lors que le mouvement, issu du corps, est antérieur à la parole poétique. Il demeure « un rythme muet, un mouvement antérieur à la voix, ou vide de voix […] ».67 Le risque consiste à le dénaturer en voulant s’en emparer par les mots « dans le mouvement / que tu oses dénommer […] ».68 À ce stade où le langage achoppe, dans la zone de l’indicible corporel, naît la qualité dansante du texte. La poésie est pour Anne-Marie Albiach tentative d’inscription de la corporéité du sujet dans le langage, c’est pourquoi elle peut dire : « en fait je vis le texte comme un corps, comme la projection d’un corps et de son image ».69 Aussi peut-on appliquer à État les analyses de Julia Kristeva qui a théorisé la chora poétique en élaborant une sémanalyse70. Contre la théorie du sujet unaire de la psychanalyse lacanienne, Julia Kristeva a développé une théorie du sujet en procès71 « dont la représentation est un espace de la mobilité, la chora sémiotique », esquissé par les pulsions72. Or la chora affecte le texte poétique. En effet
Telle un « corps dansant » (le grec khoreia signifiant « danse »), la chora sémiotique est en perpétuel mouvement. Elle dynamise le signe (ainsi que le sujet) en disposant le rejet au cœur de sa structure. Tout comme la danse permet au danseur d’explorer une infinité de mouvements corporels, la chora sémiotique est un potentiel infini de mouvements signifiants réalisables.73
Dès lors la chora pourrait être cette matrice corporelle et dynamique que le poème ne fait qu’approcher en creux par les mots et par le détour de la spatialisation du texte. L’enjeu de l’écriture poétique post-mallarméenne serait d’essayer de reconstituer un mouvement que le langage élude.
Ainsi la théorie de la chora sémiotique de Julia Kristeva qui pose un continuum corps-langage et étudie le texte poétique comme un objet dynamisé étaye-t-elle l’hypothèse de l’écriture chorégraphique d’Anne-Marie Albiach.
Conclusion
Il semble qu’il faille prolonger les analyses de Jean-Marie Gleize sur la poésie albiacienne et affirmer avec plus de vigueur le postulat d’une écriture chorégraphique dans État. Le texte est informé par le théâtre et la musique, mais plus profondément il entretient une relation de co-présence avec la danse, comme le montrent la dimension corporelle de cette poésie et sa scénographie. La relation intermédiale poésie / danse est une co-présence paradoxale : le texte ne fait pas d’allusions explicites à la danse, il n’y a donc pas imbrication d’un médium dans un autre, mais concordance ou coïncidence.
Il y a lieu de parler d’une écriture chorégraphique dans la mesure où le mouvement est au cœur d’État. La torsion de la lettre à l’initiale du titre du recueil, la redéfinition de l’enjambement comme enjambée spatiale entre deux zones de blanc, enfin l’ambiguïté du mot « lapsus », pris au double sens de glissement physique et linguistique révèlent la poétique chorégraphique du recueil. La théorie de la chora sémiotique de Julia Kristeva est de surcroît pertinente pour l’analyse chorégraphique du texte albiacien, Julia Kristeva montrant que la corporéité du sujet est inscrite dans le langage et que le texte est un ensemble dynamique, ce qui concorde avec la vision albiacienne du texte comme corps.
La paronomase « chorégraphie » / « chorographie » est féconde pour une analyse de la spatialisation du poème au miroir de la danse. Par une chorographie des territoires du poème, en d’autres termes, en décrivant la disposition du texte dans l’espace en deux dimensions qu’est la page, nous avons vu comment l’espacement du texte poétique produit volume et mouvement lors de la lecture. De partition chorégraphique, le texte devient danse. L’espacement du texte poétique participe également à l’élaboration du sens. Le centre n’existe plus et l’espace est co-construit par l’auteur et par le lecteur-spectateur. Au sens-signification se substitue un sens-orientation ou un sens-direction. C’est au lecteur de se frayer un trajet parmi les unités textuelles, au gré des figures chorégraphiques tracées par l’alternance des caractères et des espacements et incorporées en son for intérieur. Au-delà d’un dispositif pictural, le texte poétique post-mallarméen peut donc être envisagé comme une danse.
Contre une cartographie des disciplines considérées isolément, en plaçant la réflexion sur l’intermédialité au centre de notre réflexion, nous avons tenté d’esquisser une étude du texte poétique contemporain au prisme de l’art chorégraphique, en considérant les interactions de ces deux territoires qui tendent actuellement à être redécouvertes par les chercheurs en littérature et en danse.
Notes
1 – Éric Méchoulan, « Intermédialités : histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques », Literature and Technologies, n° 1, 2003, p. 9-27, p.4.
2 – Définition donnée par le site du T.L.F.I.
3 – Ibid.
4 – « Règle générale – Blanchir comme si le texte était de la poésie. L’ouvrage est divisé en six livres, et chaque livre contient un plus ou moins grand nombre de pièces. M. le Metteur en pages remarquera que chaque pièce est divisée en quatre, cinq, six et sept alinéas ou couplets. Il jettera de larges blancs entre ces couplets comme si c’étaient des strophes en vers. » Aloysius Bertrand, « Instructions à M. le Metteur en pages», Œuvres complètes, Helen Hart Poggenburg (éd.), Champion, 2000, p.373.
5 – Mallarmé observe qu’« un morceau, lyrique ou de peu de pieds, occupe, au milieu, le tiers environ du feuillet : [il] ne transgresse cette mesure, seulement la disperse. » Stéphane Mallarmé, Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1945, p.455. Ainsi « D’un point de vue quantitatif, l’emploi des blancs ne met pas en cause la tradition typographique (un tiers d’imprimé pour deux tiers de blanc) » Ildikó Szilágyi, « Significatif silence » : le blanc typographique en écriture poétique », Écritures du silence, 5, 2009, 105-118, p.107.
6 – Jean-Marie Gleize, Le Théâtre du poème : vers Anne-Marie Albiach, Paris, Belin, 1995, p.87.
7 – « La poésie d’Anne-Marie Albiach appartiendrait à la descendance mallarméenne. » Ibid, p.86.
8 – Ibid, p.57.
9 – La matérialité du support différencie l’intermédialité de l’interartialité : « l’intermédialité est, en quelque sorte, une approche culturaliste et « matérialiste » de l’interartialité », Rémy Besson, Op. cit.
10 – La publication du recueil en 1971 a été précédée par celle de trois textes poétiques Haie interne (n°1 de la revue « Nothing doing in London », Londres, 1966), Flammigère (éditions de la revue « Siècle à mains », Londres, 1967) et delà En dépit (n°4/5 de la revue « Le temps des loups », Paris, 1969).
11 – Rémy Besson, « Prolégomènes pour une définition de l’intermédialité à l’époque contemporaine », rapport de recherche publié sur l’archive ouverte HAL-UTM, juillet 2014.
12 – La dernière modalité envisagée par Rémy Besson, l’émergence, est définie comme un phénomène où « des séries culturelles se fédèrent pour donner lieu à un média à un moment donné », Ibid. Elle ne touche pas au cadre de notre étude.
13 – En fait, l’œuvre d’Anne-Marie Albiach n’a pas été encore adaptée en danse, ce qui excluait une telle investigation.
14 – « L’extension maximale de la notion de coprésence est lui atteint, quand le niveau d’hétérogénéité maintenu entre les formes qui sont associées conduit, à ce que l’artefact produit ne soit plus assignable à un média en particulier. », Rémy Besson, Op.cit.
15 – Julia Kristeva, « Poésie et négativité », L’Homme, 1968, tome 8 n°2. p. 36-63.
16 – Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.100.
17 – Ibid, p.27.
18 – Ibid, p.69.
19 – Sa poésie a été adaptée musicalement par les compositeurs Jean-Pascal Chaigne, Walter Feldmann et Franck Yeznikian. On se situe cette fois du côté de l’adaptation, sous-catégorie de transfert intermédial selon Rémy Besson. Outre le fait que les textes d’Anne-Marie Albiach aient été adaptés par des compositeurs, ils mettent en jeu une vocalité. État a d’ailleurs été composé sur magnétophone, la disposition spatiale du texte traduisant par le passage de la sphère sonore à la sphère visuelle, du temps à l’espace, la respiration et les silences entre les énoncés prononcés à haute voix. (Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.91). Le titre du recueil Mezza voce [1984] dévoile également l’importance de la musicalité dans la poésie d’Anne-Marie Albiach.
20 – Le mot désigne d’après le TLFI « Chacun des morceaux composant certaines œuvres musicales. » (définition du terme « mouvement »).
21 – Le philosophe de la danse Michel Bernard relève ainsi : « au cours de l’histoire, la danse et la musique ont été enchaînés inexorablement comme les partenaires d’un couple sado-masochiste », Michel Bernard, « Danse et musicalité – Les jeux de la temporalisation corporelle », De la création chorégraphique, Paris, éditions du Centre national de la danse, 2001, cité in Gérard Mayen, « Repentirs d’un spectateur de danse », Accents online.
22 – Ibid.
23 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.55.
24 – Définition de « cadence », dictionnaire du TLFI.
25 – Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.91.
26 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.71.
27 – Alors que le terme « danséité », qui pourrait servir à pointer la spécificité d’un mouvement de danse, n’existe pas, on parle couramment de « musicalité » du geste. La danse demeure tributaire de la musique pour son vocabulaire. En réaction à l’assujettissement de la danse à la musique, Michel Bernard a créé le néologisme « orchésalité » pour mettre en avant les soubassements communs à la musique et à la danse et délivrer cette dernière de l’ombre de la musique. « Orchésalité » vient du mot grec « orchesis » (la danse). Voir Michel Bernard, Op.cit.
28 – Laurent Mattiussi, « La Musique sans musique : Mallarmé, Valéry », in Jean-Louis Backès, Claude Coste, Danièle Pistone (dir.), Musique et littérature dans la France du XXe siècle, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2001, p.199-207, p.199.
29 – Stéphane Mallarmé, Lettre à Edmund Gosse du 10 janvier 1893, Correspondance 1862-1871. Lettres sur la poésie, Bertrand Marchal (éd.), Gallimard, coll. « Folio classique », 1995, p. 614.
30 – Comme l’affirme Pierre Brunel « La musique, la littérature commencent à partir du moment où l’enchaînement des sons, l’enchaînement des mots ne sont pas laissés au hasard. À partir du moment où il y a composition. » Pierre Brunel, Les Arpèges composés, musique et littérature, Paris, Klincksieck, 1997, p.12.
31 – Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.36.
32 – « (ces livres sont des gestes, chaque énoncé est un mouvement du corps, d’une partie du corps, ou bien un mouvement interne, un mouvement immobile, dans la chambre nue, dans la cage mentale, dans la boîte thoracique) » Ibid, p.39.
33 – Jean-Marie Gleize dit seulement qu’on y observe une « alternance choré-graphique du masculin et du féminin » Ibid, p.92.
34 – Ibid, p.101.
35 – Elle consacre pourtant une section d’Anawratha à évoquer une adaptation théâtrale des Noces d’Hérodiade de Mallarmé, drame dédié à l’une des figures de danseuse les plus fameuses de la culture occidentale. Voir « Le jeu divisé : miroir » (Les Noces d’Hérodiade par Gilbert Bourson), Anawratha [1984], in Anne-Marie Albiach : Cinq le chœur 1966-2012, Paris, Flammarion, 2014, p.323-325.
36 – Anne-Marie Albiach a étudié le théâtre au cours Simon à Paris et a lu les dramaturges classiques, Racine et Corneille, dès l’adolescence.
37 – On compte une occurrence du substantif « dynamique », une de « rythme » au singulier, une du verbe « bouger » à l’infinitif, deux occurrences du nom « déplacement » et du verbe « déplacer » en emploi verbal, participial, conjugué ou à l’infinitif. Les termes « corps » et « geste » sont usités chacun à quatre reprises. Le terme « mouvement » est employé à trois reprises au pluriel, et à treize reprises au singulier à l’intérieur du texte. On compte en outre dans la table des matières trois occurrences de « mouvement » uniquement au singulier, soit un total de dix-neuf occurrences de ce terme.
38 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.36.
39 – Ibid, p.75.
40 – Ibid, p.83.
41 – Ibid, p.95.
42 – Ibid, p.97.
43 – Ibid, p.128.
44 – Ibid, p.134.
45 – Ibid, p.129.
46 – Définition donnée par le site du T.L.F.I. Un « lapsus linguae » est la substitution fautive d’un mot à la place d’un autre. Pour Freud dans Psychopathologie de la vie quotidienne, le lapsus est la manifestation inconsciente d’un contenu latent. Le mot « lapsus » est issu d’un verbe latin signifiant « glisser ».
47 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.56.
48 – Ibid, p.59.
49 – Définition donnée par le site du T.L.F.I.
50 – L’ « enjambée » est par métonymie l’ « Écart entre les deux jambes, pris comme mesure. » (Définition d’ « enjambée », Ibid).
51 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.69.
52 – Le mot « théâtre » est issu du latin « theatrum » venant du grec « theatron » (θέατρον) formé à partir du verbe grec theaomai qui signifie « regarder, contempler ». Apparu au XIIIe siècle, le mot a d’abord désigné le lieu de la représentation puis à partir du XIVe siècle, l’art théâtral.
53 – Julia Kristeva, Op.cit., p.51.
54 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.37.
55 – Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.57.
56 – Voir le commentaire par Jean Tortel d’un poème d’Alain Veinstein où il parle du « sens (direction-signification) de la poésie qui se fait ». Cité in Ibid, p.39.
57 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.98.
58 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.103.
59 – Cette remarque n’est pas de notre fait, elle émane de Jean-Marie Gleize : « Il s’agit d’une poésie musicale sans musicalité, personnelle-impersonnelle, lyrique-non lyrique, ou d’une poésie qui parviendrait à quelque chose comme une neutralité ou une objectivité lyrique. ». Op.cit., p.25.
60 – Anne-Marie Albiach, Op.cit., p.47.
61 – Ibid, p.112.
62 – Ibid, p.44.
63 – Ibid, p.53.
64 – Ibid, p.140.
65 – Ibid, p.91.
66 – Ibid, p.107.
67 – Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.52.
68 – Anne-Marie Albiach, État, p.43.
69 – Anne-Marie Albiach, cité par Jean-Marie Gleize, Op.cit., p.72.
70 – La sémanalyse est l’inscription du sujet dans un système de signes.
71 – « Le sujet en procès s’attaque à toutes les strates d’un sujet « unaire ». Il s’attaque à toutes les structures qui disent « Non » (censure) aux pulsions et à la complexification du sujet et l’érigent en tant qu’unité. » (Lyne Légaré, Johanne Prud’homme, « Le sujet en procès », dans Louis Hébert (dir.), Signo, Rimouski (Québec), 2006.)
72 – Ibid.
73 – Ibid.
Bibliographie
CORPUS PRIMAIRE :
ALBIACH Anne-Marie. « État » in Anne-Marie Albiach : Cinq le chœur. 1966-2012. Paris : Flammarion, 2014, 592p.
CORPUS SECONDAIRE :
ALBIACH Anne-Marie. Figurations de l’image. Paris : Flammarion, 2004, 100p.
ALBIACH Anne-Marie. Mezza Voce. Paris : Flammarion, 1984, 168p.
BERNARD Michel. De la création chorégraphique. Paris : Éditions du Centre national de la Danse, 2001, 270p.
BERNARD Michel. « Une évidence ambiguë – Esquisse d’une problématique des rapports de la danse et de la musicalité » [en ligne]. Disponible sur <philagora.net> (consulté le 29 janvier 2016).
BERTRAND Aloysius. « Instructions à M. le Metteur en pages ». Œuvres complètes. Paris : Champion, 2000, 1184p., p.373.
BESSON Rémy. « Prolégomènes pour une définition de l’intermédialité à l’époque contemporaine ». Rapport de recherche publié sur l’archive ouverte HAL-UTM [en ligne]. Disponible sur <haluniv-tlse2.archives-ouvertes.fr> (consulté le 29/01/2016).
BRUNEL Pierre. Les Arpèges composés, musique et littérature. Paris : Klincksieck, 1997, 302p.
GLEIZE Jean-Marie. À noir : poésie et littéralité. Paris : Seuil, 1992, 240p.
GLEIZE Jean-Marie. Le Théâtre du poème : vers Anne-Marie Albiach. Paris : Belin, 1995, 132p.
KRISTEVA Julia. La Révolution du langage poétique. L’avant-garde à la fin du XIXe siècle. Lautréamont et Mallarmé. Paris : Seuil, 1974, 646p.
KRISTEVA Julia. « Poésie et négativité ». L’Homme [en ligne], 1968, tome 8, n°2. p. 36-63. Disponible sur <persee.fr> (consulté le 29/01/2016).
LÉGARÉ Lyne et PRUD’HOMME Johanne dans Louis Hébert (dir.), Signo [en ligne]. Rimouski (Québec). « Le sujet en procès » [en ligne]. Disponible sur : <signosemio.com> (consulté le 29/01/2016).
LOUPPE Laurence. Poétique de la danse contemporaine. Bruxelles : Contredanse, 2004, 392p.
MALLARMÉ Stéphane. Correspondance 1862-1871. Lettres sur la poésie. Bertrand Marchal (éd.), Paris : Gallimard, coll. « Folio classique », 1995, 688p.
MALLARMÉ Stéphane. Igitur, Divagations, Un coup de dés. Paris : NRF, 2003, 528p.
MARINIELLO Silvestra. « Commencements ». Intermédialités : histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques [en ligne], 2003, n° 1, p. 47-62. Disponible sur <http://id.erudit.org/iderudit/1005444ar> (consulté le 29/01/2016).
MATTIUSSI Laurent. « La Musique sans musique : Mallarmé, Valéry. » Jean-Louis Backès, Claude Coste, Danièle Pistone. Musique et littérature dans la France du XXe siècle, Strasbourg : Presses universitaires de Strasbourg, 2001, 232p., p.199-207.
MAYEN Gérard. « Repentirs d’un spectateur de danse ». Accents online. Disponible sur <ensembleinter.com> (consulté le 29/01/2016).
MÉCHOULAN Éric. « Intermédialités : le temps des illusions perdues ». Intermédialités : histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques [en ligne], 2003, n° 1, p. 9-27.
Disponible sur <erudit.org> (consulté le 29/01/2016).
RIFFATERRE Michael. Sémiotique de la poésie. Paris : Seuil, 1983, 256p.
SZILÁGYI Ildikó. « Significatif silence » : le blanc typographique en écriture poétique ». Écritures du silence [en ligne], 2009, 5, p.105-118. Disponible sur <grupoinveshum733.ugr.es> (consulté le 29/01/2016).