Prospection pédestre thématique et sondages à chrono-typologie – Estive d’Anéou (vallée d’Ossau – 64)

C’est dans le cadre d’une convention pluripartite entre le Parc National des Pyrénées, le Service Régional de l’Archéologie d’Aquitaine et le laboratoire FRAMESPA (UMR 5136 CNRS – Université Toulouse le Mirail) que s’est déroulé une campagne de prospection pédestre et des sondages archéologiques en haute vallée d’Ossau (Territoire du syndicat pastoral du Bas-Ossau – Territoire administratif de Laruns – Pyrénées-Atlantiques). Cette convention reconduisait les travaux entrepris en 2004 sur ce territoire et prolongeait la série des quatre études qui visaient à mettre en place les bases d’un programme sur l’anthropisation et les dynamiques socio-environnementales des régions couvertes par le Parc National des Pyrénées (Béarn et Bigorre).

Pour la vallée d’Ossau, trois volets ont été abordés : la poursuite des prospections pédestres (entreprises en 2004) sur l’estive d’Anéou (prospection dite fine) ; la réalisation d’une campagne de prospection pédestre destinée à évaluer le potentiel quantitatif et qualitatif du patrimoine pastoral des estives de Bious et de Pombie (prospection dite rapide) ; l’exécution de cinq sondages archéologiques sur des structures pastorales de l’estive d’Anéou.

Cette deuxième campagne d’approche systématique du patrimoine pastoral des hautes estives de la vallée d’Ossau a permis d’enrichir le corpus de 81 structures archéologiques à Anéou (dont 16 cabanes, 32 enclos, 9 couloirs de traite, 5 abris, 5 murs, 2 sépultures et 12 structures indéterminées), de 90 structures archéologiques à Bious (dont 1 abri, 21 cabanes, 11 couloirs de traite, 41 enclos, 1 gouffre aménagé, 1 mur, 1 québe et 13 structures indéterminées) et de 109 structures à Pombie (dont 7 abris, 1 abri à agneau, 17 cabanes, 10 couloirs de traite, 28 enclos, 6 murs, 9 québes, 4 sépultures et 27 structures indéterminées). La richesse pastorale du Haut Ossau a été confirmé et les travaux ont permis de poursuivre la constitution de la base documentaire ; base qui comprend actuellement 387 structures archéologiques.

La mise en place de cette double technique de prospection (prospection fine sur Anéou et prospection rapide sur Bious et Pombie) avait pour objectif d’enrichir, dans un laps de temps court et avec une précision dans la prise d’information permettant le croisement des données, la connaissance sur le patrimoine pastoral du haut Ossau (dans l’ensemble de ces composantes et de ces variétés structurelles, fonctionnelles et techniques) et par la même de passer d’une analyse faite sur un territoire restreint (un quartier d’estive) à de plus grandes superficies. C’est donc le changement d’échelle qui était ici en jeu ; agrandir le regard pour appréhender des espaces plus grands tout en conservant la qualité de l’information recueillie. En 2005, l’augmentation du corpus de parfaire les classements typologiques débutés en 2004 et de réaliser les premiers croisements des données sous Système d’information géographique (Arcgis 9) destinée à faire l’objet d’analyses spatiales (analyses réalisées avec Mélanie Le Couédic – Doctorante à l’Université de Tours – UMR 6173 – CITERES/LAT).

Cinq sondages archéologiques ont également été réalisés sur des structures identifiées en 2004. Les critères de choix des structures sondées repose sur la volonté de couvrir un vaste étagement altitudinal (entre 1800 et 2100 mètres d’altitude) et de prendre en compte un éventail typologique le plus large possible.

Crédits photo : C. Calastrenc

Crédits photo : C. Calastrenc

Des sondages manuels de 2m² ont été effectuer, ainsi que des prélèvements de résidus carbonisés destinés à des analyses anthracologiques (études réalisées par Marie-Claude Bal de l’UMR 5602 – GEODE) et à des datations au radiocarbone par AMS (faites par le Poznań Radiocarbon Laboratory).

Ces sondages ont permis de disposer d’information sur les chronologies et les modes architecturaux des structures pastorales étudiées. Les datations AMS faites sur des charbons provenant des niveaux identifiés comme les niveaux d’occupation de trois structures (la structures n° 8 -US 308-, la structure n° 9 -US 404- et la structure n°14 -US 205-) montrent que ces constructions ont fonctionnées entre la fin de l’Âge du Bronze Moyen et l’Âge du Bronze Final (des XIVe au Xe siècle av. J-C). Ces trois datations ne permettent pas d’affirmer une contemporanéité exacte d’occupation, mais plutôt un fonctionnement durant une même phase chronologique. Quant à la structure n° 40, le seul charbon récupéré durant la fouille a été daté de l’Antiquité Tardive (IIIe – Ve ap. J-C). Au vu de la localisation de la zone de prélèvement de cet élément et de la stratigraphie (notamment des problèmes d’identification du niveau d’occupation), il serait trop hasardeux de dater le fonctionnement de la structure sur cette seule base. En ce qui concerne le dernier sondage (celui de la structure n° 1), il s’est avéré négatif.

Infographie : C. Calastrenc

Infographie : C. Calastrenc

Différents modes d’édification de ces constructions (dans ce qu’ils ont de visibles, c’est-à-dire sur un mètre linéaire) ont également pu être perçu : murs de pierres (calcaire) sèches fait avec deux rangées de blocs et un remplissage intérieur de pierres de plus petites tailles (structures n° 8 et n° 14) ; des dalles posées de chant qui forment les parements interne et externe d’une rangée centrale constituée de gros blocs (structure n° 9) ou bien des blocs de grandes tailles doublés sur la face intérieure de dalles posées de chant (structure n° 40) . Les variations techniques de construction, cumulées aux observations stratigraphiques et aux connaissances acquises sur d’autres terrains de haute montagne, apparaissent comme des indicateurs qui pourraient renvoyer à de possibles fonctionnements différents des structures ou à une hiérarchisation technique et/ou sociale de ces édifices pastoraux.

Quant aux analyses anthracologiques, parce-qu’elles ont révélées (pour les structures n° 8, 9 et 14) des fragments de hêtres (espèce non présente à l’âge du Bronze à de telle altitude) et du pin (pour la structure n° 40), interrogent à la fois sur les pratiques d’approvisionnement en bois, sur l’utilisation de ces matériaux (bois de chauffe, bois de construction ?) et plus largement sur les modes de gestion de l’espace.

Ces cinq sondages, cumulé à la connaissance apportée par les prospections pédestres et les découpages typologiques réalisés, posent donc les premiers jalons d’une chrontypologie des structures pastorales et permettent de disposer des premiers éléments qui pourrait documenter les variations des techniques et des pratiques pastorales du Haut Ossau sur le temps long.

 Carine CALASTRENC

Avec la collaboration de Mélanie LE-COUEDIC et de Christine RENDU

Fouille archéologique, Multi-méthode, SIG , , , , , , , , , , , , ,

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