Campagne Octobre 2004 – Prospection pédestre thématique – Estive d’Anéou (vallée d’Ossau – 64)

Cette campagne de prospection inventaire s’est déroulée dans le cadre d’une convention pluripartite entre le Parc National des Pyrénées, les Services Régionaux de l’Archéologie Aquitaine et Midi-Pyrénées, l’INRAP, le laboratoire de Chronoécologie (UMR 6565 CNRS – Université de Besançon) et le laboratoire FRAMESPA (UMR 5136 CNRS – Université Toulouse le Mirail). Cette convention mettait en place, pour l’année 2004, une série de quatre études conjointes, visant à jeter les bases d’un programme sur l’anthropisation et les dynamiques socio-environnementales des régions couvertes par le Parc National des Pyrénées (Béarn et Bigorre).

Pour la vallée d’Ossau, le choix de la zone étudiée a été largement conditionné par la date du début des prospections : le mois d’octobre. Des préoccupations relatives à la sécurité et à l’efficacité impliquaient de travailler sur un secteur proche d’une voie d’accès. Le choix s’est donc porté sur l’estive d’Anéou (territoire administratif de la commune de Laruns) qui conférait le double avantage d’être identifiée comme l’un des meilleurs pâturage de la vallée d’Ossau et d’être très facilement accessible puisque la route départementale 934 le traverse dans sa partie est.

Cette première approche systématique du patrimoine pastoral des hautes estives de la vallée d’Ossau a permis de montrer la richesse et le potentiel de ce secteur : 107 structures archéologiques (dont 27 cabanes, 39 enclos 1 couloir de traite, 3 abris dont 2 sous rocher et 37 structures non qualifiées regroupées en 31 « Entités ».

infographie : C. Calastrenc

infographie : C. Calastrenc

L’analyse comparative de l’ensemble des structures inventoriées a permis de mettre en place une première approche typologique à partie de trois critères discriminants : les degrés de conservation, les superficies et les morphologies.

Trois degrés de conservation ont été définis : conservation sur plus de 3 niveaux d’assises (soit une hauteur minimale d’environ 0,70 cm) ; entre 1 et 2 niveaux d’assises ; structures totalement arasées (visibles par des micro-reliefs et/ou un alignement de pierres). En terme d’estimation chronologique ce gradient d’effacement n’a de valeur que très relative. La diversité des conditions micro-locales d’érosion joue  beaucoup. De façon plus fiable, certains sites montrent des conservations différenciés entre les différentes  structures  qui les composent, laissant ainsi entrevoir de possible utilisation de l’espace sur le temps long. Mais, seul la constatation d’une superposition de structures sur un même site peut véritablement avérer une chronologie relative Ces empilements d’édifices, ces reprises, laissent entrevoir une occupation durable de l’espace. Avec ces différentes nuances, le degré de conservation permet donc de mettre en place une première chronologie relative des structures inventoriées.

Ordonner les sites par leur taille constitue la première étape d’une structuration du corpus sur la base d’une approche fonctionnelle. Ce n’est pas en terme de chronologies que les questions se posent ici ; il s’agit d’abord de repérer des grandes catégories susceptibles de renvoyer à des utilisations nettement différenciées des structures. Trois grandes classes ont pu être distinguées. Entre 1m² et 15 m², c’est la partition entre abri et cabane qui s’ébauche ; c’est aussi la distribution entre couvert et non couvert, entre réservé aux hommes et aux animaux qui s’esquisse. Les structures comprises entre 51 m² et 225 m², qui se rapportent à des lieux de parcage, permettent de distinguer des systèmes pastoraux divergents ne répondant ni aux mêmes besoins techniques, ni aux mêmes codes socio-économiques. Quant à la classe typologique « 16 m² et 50 m² », elle regroupe une catégorie de structures que le prospecteur a du mal à caractériser. Les structures y sont potentiellement cabanes ou enclos, et s’il est parfois possible de trancher, la majorité reste indéterminée.

C’est sous l’angle morphologique que le corpus a ensuite été abordé. En prenant en compte chaque catégorie de vestige, il est alors possible de lui conférer une nouvelle place dans le raisonnement. Cabanes, enclos et couloirs de traite ont été tour à tour interrogés. Leur isolement, leurs relations architecturales et/ou topographiques, l’orientation de leur bâti, l’emplacement des entrées ont été pris en compte pour distinguer des ressemblances et des dissemblances, bases de cette dernière typologie.

Cette démarche analytique qui consiste à morceler les entités en unités élémentaires comparables peut paraître lourde et déstabilisatrice puisque l’on perd, un temps, le niveau de lecture a priori minimal de l’agencement du site. C’est elle pourtant qui permet de s’orienter dans ces ensembles finalement complexes, de détecter les parentés par tailles, par formes, les potentielles concordances temporelles, pour aboutir, malgré les fortes incertitudes fonctionnelles et chronologiques, à des résultats finalement déjà probants. Ce décorticage typologique a abouti à la mise en place de nombreux groupes et assemblages.

Cette campagne de prospection s’est également attachée à faire un premier repérage sur des espaces dits intermédiaires. Durant les journées de mauvais temps, les prospections se sont réorientées sur un secteur situé entre la haute montagne et les villages, la zone du Benou (propriété en indivision des communes de Bielle et de Bilhères), 23 structures appartenant à 11 « Entités » ont été relevées, qui sont toutes à rattacher à des bordes : cabanes, étables, greniers à foin. Les traces de possibles anciens parcellaires ont également été identifiées.

Les bases typologiques sur la patrimoine pastoral d’Anéou sont dores et déjà suffisamment solides pour envisager, parallèlement à la poursuite des prospections, le passage à des fouilles qui auront pour objectif essentiel l’établissement des premiers jalons chronologiques.

 Carine CALASTRENC

Avec la collaboration de Mélanie LE-COUEDIC et de Christine RENDU

 

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