Prospection pédestre et sondages – estive d’Anéou (vallée d’Ossau – 64)

* Aneou (Commune de Laruns, syndicat pastoral du Bas-Ossau). C. Calastrenc et M. Le Couédic (coordination au sein du PCR : C. Rendu)

Les travaux d’archéologie pastorale entrepris à Anéou depuis 2004 sont inclus dans le PCR « Dynamiques sociales, spatiales et environnementales dans les Pyrénées centrales » co-dirigé par Ch. Rendu et D. Galop (CR au CNRS). Ils visent à saisir, à partir d’une zone atelier restreinte (l’estive d’Anéou), l’histoire et les transformations des systèmes d’estivage de la haute vallée d’Ossau dans la longue durée. La première étape de cette recherche comprend la prospection exhaustive des 1256 ha de ce quartier de pâturage (débutée en 2004) et la datation, par sondage, des principaux types de sites observés à partir des relevés de surface (entrepris depuis 2005).

Fin 2006, 11 sondages avaient été réalisés qui documentaient principalement, l’âge du Bronze, la transition Antiquité/Haut Moyen âge  et l’époque moderne. Les travaux 2007 se sont structurés sur les bases des deux campagnes précédentes (2005 et 2006). 18 sondages archéologiques ont été réalisés en première partie de campagne ; la deuxième partie a permis l’achèvement des prospections pédestres systématiques de l’estive avec GPS différentiel.

 

Principaux résultats des sondages

Les 18 sondages réalisés visaient essentiellement à documenter le hiatus du VIIe au XVIIe siècle de notre ère. La difficulté à repérer, d’après les images de surface des sites, une catégorie d’arasement intermédiaire entre les structures à micro-relief et celles conservées sur plusieurs niveaux d’assises a contraint à choisir les constructions apparaissant comme les plus anciennes des structures en élévation. Ces dernières ont fait l’objet de 10 des 18 sondages réalisés. Les 8 autres sondages ont été consacrés à des structures à l’état de micro-relief et visaient à compléter l’approche diachronique des entités et des secteurs abordés.

 

 Cabane La Glère

L’entité 20, un ensemble pastoral homogène et monophasé, est composée de trois structures : la structure 40 (une cabane), la structure 41 (un enclos), la structure 42 (un couloir de traite). La structure 40 a fait l’objet d’un sondage en 2005. En 2007, un nouveau sondage a été réalisé sur la face sud de la structure 42 (structure très arasée, visible par un micro-relief et un alignement de pierre). Tout comme le sondage de 2005, le caractère anthropique de la structure 40 a pu être observé, mais aucun niveau d’occupation n’a été identifié avec certitude.

L’entité 36, hétérogène et polyphasée, comprend 6 structures présentant des états de conservation différents. D’après les observations faites en surface, ces structures pourraient se regrouper en trois ensembles : les structures 101 (une cabane) et 103 (un enclos) ; la structure 102 (un enclos) ; les structures 104, 105 et 106 (sans détermination fonctionnelle sur les seules données de surface). Deux sondages ont été réalisés : un sur la face nord-est de la structure 101 (une structure de 17 m² intérieurs dont les murs à double parement faits par empilement de dalles de calcaire et de pierres boutisses sont conservés sur 6 à 7 niveaux d’assisses) et un sur la face sud de l’enclos 102 (construction de 36 m² intérieurs dont le parement externe est constitué d’une superposition assez frustre de blocs de calcaire ; la face interne étant réalisée avec des dalles posées de chant). Le sondage entrepris dans la structure 101 a permis d’identifier un seul niveau d’occupation (un foyer) sans qui n’ai été possible de percevoir le niveau de circulation associé. Le sondage fait dans la structure 102 a également révélé un seul niveau d’occupation.

L’entité 186, qui se trouve à environ 50 m à l’ouest de l’entité 36, est monophasée. Elle est constituée de la seule structure 487, de 18 m² intérieurs dont les murs sont conservés sur trois niveaux d’assisse et qui a été identifiée en prospection comme un enclos. Un seul niveau d’occupation a été perçu non pas par la présence de mobilier archéologique ou de résidus carbonés, mais par l’étude des relations stratigraphiques.

 

Caillaoulat

L’entité 181 est un ensemble vaste et complexe de 9 structures qui se répartissent sur 1200 m² : un groupe de 3 enclos accolés (str. 442 à 444) ; un deuxième groupe de 3 autres enclos et d’une cabane imbriqués (str. 445 à 448) ; une quebe légèrement excentrée (str. 441). Les limites nord-est et sud de cet ensemble sont formées par des murs effacés (str. 440 et 449). Un sondage a été réalisé à l’intérieur de la structure 446 (une construction de 6 m² dont les murs sont conservés sur 3 à 4 niveaux d’assise). Un niveau d’occupation y a été identifié dans lequel a été mis au jour du mobilier archéologique (fragments de céramique).

L’entité 182 est monophasée. Elle comprend une seule structure (structure 450) visible par un micro-relief et quelques pierres affleurantes qui délimitent un espace intérieur de 7 m². Le sondage effectué sur sa face sud a permis l’identification d’un seul niveau d’occupation.

 

 La Gradillière

L’entité 38 se compose de trois structures accolées dont les états de conservation sont différents : la structure 113 (un enclos long et étroit), 114 (un possible abri ou annexe inclus dans le périmètre intérieur de la structure 113) et 115 (un alignement de pierres qui laisse entendre la présence d’un possible enclos antérieur aux deux précédentes structures). Un sondage a été entrepris sur la face nord de la structure 113 et a révélé deux niveaux d’occupation, reconnus pour le plus récent par l’étude des relations stratigraphiques et pour le plus ancien par la présence de matériel archéologique (fragments de céramique non-tournée, éclats de silex et des résidus carbonés).

L’entité 41, composée de 5 structures, est complexe et hétérogène. Le premier groupe est constitué de deux structures accolées (les str. 120 et 121 : un enclos et son annexe) et le deuxième groupe, situé à 3 m à l’est du premier groupe se compose des 122, 123 et 124 (de possibles enclos accolés, visibles par un micro-relief et des alignements de pierres). Un sondage a été réalisé au niveau du mur mitoyen des structures 120 et 121. Il a montré, pour chacune d’entre elle, un seul niveau d’occupation.

L’entité 171, située sur un léger « monticule », s’organise autour de deux agencements en connexion, visibles par un micro-relief et quelques pierres affleurantes : la structure 403 (un enclos de 98 m²) et la structure 404 (petite construction de 2 m² imbriquée dans la face nord-est de l’enclos 403). Elles ont livré du mobilier archéologique (fragments de céramique non-tournée et éclats de silex), mais les indices sont trop tenus pour affirmer la présence d’un niveau de fonctionnement. Afin de mieux appréhender l’enchaînement stratigraphique observé pendant la fouille, confirmer et/ou infirmer le caractère anthropique des dépôts, un deuxième sondage a été réalisé à 2,50 m au sud-est de ces deux structures : le sondage 489. Il a confirmé la présence d’un épais niveau de colluvions/alluvions, sans doute à l’origine du « monticule » sur lequel sont établi les structures 403 et 404. La répartition du mobilier archéologique confirme le caractère non structuré des dépôts qui pourrait alors provenir du démantèlement, par le cours du ruisseau, d’un ou de plusieurs site(s) proche(s).

L’entité 172 présente une superposition de structure : la 488 (très arasée visible par un micro-relief et une légère dépression centrale) et la structure 405 (une cabane de 12 m² dont les murs sont conservés sur deux niveaux d’assise). Un sondage a été réalisé dans ces deux structures (sur leurs faces est) et a livré, pour chacune d’elle, un niveau d’occupation. De plus, dans le sondage de la structure 488, une concentration de charbon qui pourrait être le cendrier d’une structure de combustion proche a été identifiée.

 

Tourmont

L’entité 140, monophasée, comprend un abri sous falaise (la structure 333) de 6m² dont les murs sont conservés sur deux niveaux d’assise. Le sondage qui y a été réalisé a révélé un niveau d’occupation et du mobilier archéologique (verre, fragments de toile goudronné, métal).

La structure 334 de l’entité 141, située à 20 mètres au sud-ouest de l’entité 140, est du même type que cette dernière : un abri sous falaise. Trois phases d’occupation y ont été reconnus : les phases 1 et 2, qui ont chacune livré un niveau d’occupation et du mobilier archéologique (verre, métal, céramique, mobilier osseux) ; quant à la troisième phase, il a été impossible de faire la part entre niveau de fonctionnement et niveau de nivellement.

L’Entité 149 complexe et polyphasée, se compose de sept structures de conservation identique (micro-reliefs) dont deux enclos, mitoyens de trois alvéoles, et d’une structure en élévation (une cabane, postérieure à ce premier ensemble, qui a fait l’objet d’un sondage en 2006). La structure 350 (l’une des 3 alvéoles) avait livré en 2006 un niveau de sol bien marqué avec des fragments de céramique non tournée. Ce sondage, poursuivit en 2007, à confirmer la présence d’une seule et unique phase d’occupation. Un autre sondage a également été ouvert sur la structure 348 (une alvéole de 6 m de diamètre) qui a livré un niveau d’occupation (un sol et de nombreux éléments de mobilier archéologique -céramique non tournée, verre, matériel osseux, métal-).

 

Les datations obtenues en 2007

Les 22 niveaux d’occupation repérés lors de ces 18 sondages ont été, à 76 % (soit 17 niveaux) datés. 14 niveaux d’occupation l’ont été par analyse au 14C (les entités 36 et 186 du secteur de La Glère ; les entités 38, 41 et 172 du secteur de La Gradillière ; la phase 3 de la structure 334 et l’entité 149 du secteur de Tourmount ; les entités 181 et 182 du secteur de Caillaoulat) et 3 d’après l’étude du mobilier archéologique (la structure 333 et les phases 1 et 2 de la structure 334 du secteur de Tourmount). 5 structures n’ont pas été datées soit par manque de résidu carboné soit parce-que la détermination du niveau d’occupation a été trop litigieuse.

Ces datations commencent à éclairer la transition Moyen âge/Epoque Moderne. Outre, la structure 334 dont l’occupation moderne repose sur un niveau datée des XVe-XVIIe siècles qui peut être soit une occupation, soit un remblai, cette transition est essentiellement documentée par les entités 36 de La Glère (dont la structure 102 datée du XIIIe siècle et la structure 101 datée des XVIIIe-XXe siècles) et 172 de La Gradillière (la structure 488 datée des XVe-XVIIe siècles et la structure 405 datée des XVIIe-XXe siècles). Quant aux structures de l’époque Moderne/contemporaine (XVIIe-XXe siècles), elles sont de mieux en mieux cernée : entité 38 (1er phase de la structure 113), l’entité 41, l’entité 140 et la structure 446 de l’entité 181.

Les occupations anciennes ont également été documentées : à La Gradillière (2ème phase de la structure 113 datée des XVIIIe-XVIe siècles avant notre ère ; le mobilier archéologique découvert céramique non-tournée et fragments de silex d’allure protohistorique dans le sondage effectué dans les structures 403 et 404 et le sondage 489), à Caillaoulat (la structure 450 de l’entité 182 datée des XVIe-XIVe siècles avant notre ère) et à Tourmount où la reprise des sondages de 2006 ont confirmé l’occupation du site aux IVe-VIIe siècles de notre ère.

 

Principaux résultats des travaux  2005-2007

Au terme de l’année 2007, il est possible de considérer que la phase de prospection-inventaire d’Anéou est achevée. Les 40% restant du territoire à parcourir (soit les zones les plus hautes et les plus pentues) n’ont livrée aucun site ou indice de site.

Les trois campagnes de sondage 2005-2007 auront permis de sonder 27 structures appartenant à 17 entités et de documenter 29 niveaux d’occupation qui éclairent trois périodes principales : l’âge du Bronze (5 dates), Antiquité-Haut Moyen âge (4 dates) et époque Moderne/contemporaine (13 dates). Reste une date pour la fin de l’âge du fer, une date pour le Moyen âge central et deux dates correspondant à la transition Bas Moyen âge/époque Moderne. La date néolithique appartient à un contexte a priori remanié. Les deux dates obtenues sur les structures 40 (III-Ve siècles de notre ère) et 487 (IX-VIIIe siècles avant notre ère) ne caractérisent pas une occupation mais donne simplement des terminus post-quem.

Le référentiel chronotypologique issus de ces sondages archéologiques est maintenant suffisant pour clôturer cette première phase et envisager le passage à des fouilles extensives.

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