Luigi STORTO

Luigi Storto est doctorant en cotutelle entre l’Université de Toulouse Jean Jaurès et l’Université d’Udine. Sa recherche est focalisée sur la représentation de la réalité dans le cinéma contemporain de non-fiction, notamment ce cinéma à mi-chemin entre documentaire canonique et narration pure qui a été defini comme hybride.

Pour citer cet article : STORTO, Luigi, « Ré-inventer le vrai : le cinéma contemporain de non-fiction entre réalisme et hybridation », Litter@ Incognita [En ligne], Toulouse : Université Toulouse Jean Jaurès, n°11 « « L’oeuvre comme enquête / l’enquête dans l’oeuvre : création et réception », saison automne 2019, mis en ligne le 1er novembre 2019, disponible sur <https://blogs.univ-tlse2.fr/littera-incognita-2/2019/05/21/re-inventer-le-vrai-le-cinema-contemporain-de-non-fiction-entre-realisme-et-hybridation/>.

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Résumé

Ces dernières années, la vocation narrative déclarée par un ensemble hétérogène de films à mi-chemin entre observation directe et fictionnalisation a mené à parler d’hybridation. L’objectivité est supprimée en faveur d’une foi retrouvée dans la recherche esthétique, dans la valeur de l’expérimentation et du mélange des langages. Le documentaire contemporain pousse les limites de la représentativité jusqu’à défier le concept même de réel.

Mots-clés : Cinéma documentaire – Non-fiction – Postmodernité – Fictionnalisation – Fictionnel – Cinéma hybride – Hybridation – Performance – Performativité – Réalisme – Réalité – Réel – Narration – Hyperréalisme.

Abstract

In the last years contemporary documentary has shown a strong narrative vocation. This new way of narrating the reality has been defined as hybrid, for its recours to a fusion between direct observation and fictional aesthethic. Its main characteristic seems to be the awarness of renouncing objectivity. Contemporary documentary is trying to break all this limits in order to provide new perspectives to the very idea of real.

Keywords: Documentary – Non-fiction film – Postmodernity – Fictionalisation – Fictional – Hybrid cinema – Hybridization – Performativity – Realism – Reality – Real – Narrative – Hyperrealism.


Sommaire

Introduction
1. Poétiques de l’hybridation
2. L’Histoire (im)possible
2.1. Valse avec Bachir (Ari Folman, 2008)
2.2 Kurt Cobain: Montage of Heck (Brett Morgen, 2015)
3. Entre performativité et narration
3.1 Le cœur battant (Roberto Minervini, 2013)
3.2 All these sleepless nights (Michal Marczak, 2016)
Conclusion
Notes
Bibliographie

Si l’artiste, en effet, à toute manifestation nouvelle de la vérité, se détourne de cette clarté révélatrice et contemple toujours avec ravissement ce qui, malgré cette clarté, demeure obscure encore, l’homme théorique se rassasie au spectacle de l’obscurité vaincue et trouve sa joie la plus haute à l’avènement d’une vérité nouvelle, sans cesse victorieuse et s’imposant par sa propre force.

Friedrich Nietzsche, La naissance de la tragédie

Introduction

Vouloir tracer un parcours esthétique désignant les trajectoires à travers lesquelles le documentaire contemporain est en train d’évoluer signifie en premier lieu reconsidérer la fonction sociale et culturelle historiquement accordée à cette forme filmique : dans l’optique d’une opposition idéologique entre narration et document, pendant longtemps le documentaire a été considéré comme un genre qui ne devait pas s’occuper des histoires mais de l’histoire, c’est à dire des faits humains et sociaux certifiés, démontrés – un heritage idéologique de nature positiviste qui a chargé le documentaire de la tâche de certifier ses dicours au nom de la vérité1. D’où le recourt à une logique de nature assertive, qui se sert d’éléments probants en soutien à ses discours. Cette logique de type assertif/informatif peut être perçue comme une forme d’autolégitimation, entendant que le film expose sa vérité à travers des procédés standardisés et « codifiés » immédiatement identifiables en tant qu’appartenant à ce qui s’inscrit conventionellement dans le régime du vrai ; parmi ceux-ci on pourrait citer le recourt à l’interview pour la valeur de témoignage, aux images d’archive qui constituent un document, à l’usage du direct en tant que restitution d’une réalité « non altérée » et aussi, à un niveau de réception immédiate, la grain spécifique, la texture de l’image vidéo qui caractérise souvent le documentaire et qui renvoie à un style de reportage télévisé, donc non manipulé, « vrai ».

Dans le paradigme « classique » du cinéma documentaire le niveau de réalisme et d’authenticité est souvent proportionnel au facteur d’enquête/témoignage mis en oeuvre par le film à travers des moyens standardisés comme le direct et l’interview, héritage linguistique du cinéma-vérité qu’ensuite la télévision s’est approprié. En effet, plusieurs modalités de production typiques de ce genre ont été intégrées dans le système des formats télévisuels (par exemple l’utilisation de la voix off, l’expression d’une approche didactique qui dans un premier temps a caractérisé le documentaire dans sa première phase pour devenir ensuite un des traits distinctifs de nombreuses productions sériales ; ou encore, les modalités du cinéma direct qui aujourd’hui sont typiques des programmes d’actualité ou d’enquête).

Déjà, en 1995, Jean-Louis Comolli insistait sur la nécessité d’un cinéma libéré de cette approche où la pratique documentaire se retrouva banalisée par la diffusion des caméscopes, par l’assimilation du langage du cinéma direct opéré par la télévision et par l’insistence de considérer un « effet de réalité » l’enregistrement d’un geste dans sa durée réelle (« en temps synchrone »), l’illusion d’assister à quelque chose qui se passe devant nos yeux à travers ce qu’il définit comme inscription vraie, c’est-à-dire « l’épreuve de modestie du cinéaste »2.

Ce que le théoricien a voulu remettre en cause est l’idée de transparence qui, d’après lui, est une utopie devenue ensuite une tromperie, une illusion, « une aspiration à réduire les outils de la médiation technique, perçus comme faisant écran à l’accès à la chose même »3.

Comolli souligne que :

Le spectateur de documentaire s’appuie à juste titre sur l’assurance d’un lien puissant entre le réel et le représenté. Mais il a besoin de plus : que cette relation certaine soit validée par toutes les apparences d’une adéquation formelle, d’une transparence, d’une conformité de l’un à l’autre4.

Exactement ce lien fort, cette forme de garantie, est l’élément qui commencera à devenir de plus en plus faible jusqu’à disparaître : les limites entre réel et fictif, vie réelle et mise en scène ne seront plus un critère valable pour opérer une distinction entre documentaire et fiction. À mi-chemin entre réalisme et fictionnalisation, le cinéma de non-fiction qui couvre les vingt-cinq dernières années – significativement le passage entre le XXème siècle et le XXIème siècle – sera défini comme cinéma hybride pour indiquer le mélange entre pure mise en scène et observation directe5.

1. Poétiques de l’hybridation

C’est surtout après le début du nouveau millénaire que le cinéma documentaire manifeste une vocation narrative probablement inattendue car en sommeil depuis trop longtemps. La relation entre réel objectif et profilmique se déplace d’un niveau purement mécanique/reproductif (enregistrement d’une donnée immédiate, d’un événement pendant son contexte naturel) à un niveau performatif entendu comme reconstruction – ou plutôt re-création – du même événement, issue de mise en scène voire de récit, dans le refus explicite d’une objectivité de plus en plus mise en crise par l’univers médiatique et par la circulation frénétique des images. L’objectivité est supprimée en faveur d’une foi « retrouvée » dans la recherche esthétique, la valeur de l’expérimentation et du mélange linguistique ; il n’y a pas d’usage de l’interview et l’aspect formel revêt une importance inattendue, surtout après les années de l’esthétique vidéo-tape. Ce cinéma vise à « immerger » le spectateur dans une atmosphère de récit plus confortable, fluide, en quelque sorte « familiale », parce qu’elle donne effectivement l’impression que l’histoire procède par elle-même.

D’après Stella Bruzzi, le cinéma de non fiction a bénéficié d’une grande liberté expressive juqu’à la moitié du XXe siècle, c’est-à-dire quand la théorie a commencé à s’interroger sur la relation entre le film et le réel. La révolution du cinéma direct, avec l’emploi d’un équipement plus léger et moins intrusif, avait donnée l’idée de pouvoir annuler la distance entre réalité et répresentation, de restituer l’authenticité du monde réel au-delà du filtre de la caméra. La théoricienne anglaise remarque que le documentaire contemporain est retourné à sa désinvolture originelle (more relaxed roots), en ce qui concerne l’usage de la fictionnalisation et surtout l’aspect performatif qui constitue à son avis la question centrale de la pratique du cinéma contemporain de nonfiction et aussi la déclaration de l’impossibilité à accéder à une répresentation authentique :

Within such a realistic aestethic, the role of performance is, paradoxically, to draw the audience into the reality of the situations being dramatised, to authenticate the fictionalisation. In contrast to this, the performative documentary uses performance within a non-fiction context to draw attention to the impossibilities of authentic documentary representation6.

D’autre part, comme l’a remarqué Susan Sontag, « To possess the world in the form of images is, precisely, to reexperience the unreality and remoteness of the real »7, un concept que nous pouvons étendre du domaine de la photographie au système entier des médias : l’époque contemporaine est celle où, si d’un côté il est possible de réaliser une histoire universelle grâce au niveau de médiatisation, cette prolifération l’a rendue impossible8.

S’il est donc impossible de saisir le monde réel tel qu’il est, alors une approche subjective est la seule en mesure de satisfaire ce besoin inné de répresenter celle alterité irréductible constituée par ce qui nous apparaît comme la réalité. À cette fin le cinéma documentaire a dû premièrement se dépouiller de l’exigence de « certifier » ce qu’il dit et ensuite se réapproprier ses moyens expressifs.

À travers un aperçu sur quelques uns des titres les plus éloquents de ces dernières années, cet essai propose un parcours d’évolution linguistique – quoique non exempt de paradoxes ou dérives, comme l’on verra – où les formes adoptées diffèrent de plus en plus considérablement des critères esthétiques traditionnels de ce genre.

Le cinéma contemporain de non-fiction s’inscrit de plein droit dans la logique postmoderne du refus d’un réel supposé a priori. Au contraire, il montre comme dénominateur commun l’interrogation constante sur la restitution d’une réalité non considérée comme acquise mais ouverte à l’expérimentation et au mélange linguistique, ce qui implique une redéfinition des catégories de « vrai » et « fictif » dans lesquelles la théorie filmique a souvent contraint œuvres et auteurs.

Il ne faut pas oublier que le cinéma hybride n’est pas l’expression d’une école, d’un mouvement ou d’une avant-garde ; il s’agit d’une approche partagée par plusieurs cinéastes, avec des formations et inclinations esthétiques différentes.

L’analyse proposée se focalisera donc sur la mise en relation entre des matériaux ayant à la fois statut de réel et statut de fiction afin d’identifier de quelle manière cette relation contribue au discours filmique. À cet égard, je considère particulièrement important la réflexion conduite par Pietro Montani sur la relation entre la valeur de témoignage, le monde visible et les formes du documentaire et de la fiction :

[…] en opposition avec l’idée d’une prise directe de l’image sur le monde (idée déjà invalidée par l’haut niveau de médialisation présente dans le monde), et aussi avec la thèse « postmoderne » selon laquelle le monde réel risque de se faire absorber totalement par son simulacre, le paradigme audivisuel auquel je pense repose sur le principe d’une comparaison active entre les différents formats techniques de l’image (optique et numérique, par exemple) et entre ses différentes formes de discours (fictif et documentaire, par exemple) ; je pense que dans ces conditions on peut rendre justice à l’altérité irréductible du monde réel et au témoignage des faits, médiatiques ou non, qui s’y produisent9.

>L’analyse des films prendra aussi en considération deux éléments essentiels du cinéma hybride : le récit de l’histoire et l’aspect performatif.

2. L’Histoire (im)possible

La fictionnalisation d’événements historiques est une pratique typiquement postmoderne ; le croisement entre Histoire et fiction est un moyen de souligner la liberté créative de l’auteur mais aussi la partialité, les limites de l’Histoire en tant que science exacte, objective. L’analyse des titres proposés s’appuie sur la pensée de Paul Ricœur et examine deux procédés : en premier, pour Valse avec Bachir, le croisement (et la fusion, comme l’on verra) entre mémoire personnelle, mémoire collective, autobiographie et Histoire ; ensuite, pour la biographie de Kurt Cobain, la refiguration du « contexte de vie […], le monde qui, aujourd’hui, manque […] »10.

2.1. Valse avec Bachir (Ari Folman, 2008)

Ce film autobiographique est la narration du parcours à travers lequel Ari Folman a rassemblé ses mémoires de guerre avec l’aide de ses camarades. Chacun d’eux contribue avec ses souvenirs à reconstituer ceux du protagoniste. Ce qui en sort est la reconstruction dramatique des événements qui en septembre 1982 ont conduit au massacre de Sabra et Chatila pendant la première guerre du Liban, massacre dont Ari Folman a été témoin mais qu’il a supprimé au cours des années.

Folman a donc travaillé sur une double voie : autobiographie et histoire, d’un côté expérience personnelle/mémoire subjective, de l’autre côté mémoire historique, « objective ».

L’animation est un genre qui traditionnellement ne concernait nullement tout ce qui appartient au domaine de l’enquête, du témoignage et en général du document, au moins jusqu’à la sortie de ce film, qui a utilisé l’animation dans le but de renforcer la narration, constamment au bord du gouffre entre témoignage et hallucination.

La séquence analysée est le final du film où l’animation cède la place à une courte séquence vidéo : du gros plan de Ari (en animation) une coupe de montage nous montre des images filmées, donc réelles, ou qui appartiennent au moins à ce qui conventionnellement fait partie du statut de réel. Il s’agit des images tournées juste après le massacre, des images vidéo, « pixelisées », un exemple typique de reportage télévisé :

Le protagoniste a terminé son parcours, a accompli sa « mission »11, en reconstruisant sa mémoire personnelle qui, par ailleurs, coïncide avec un événement enregistré et diffusé par les médias et qui donc fait partie d’une vérité historique rendue objective par le fait même d’être devenu un document.

À ce propos Paul Ricœur nous rappelle que :

Dans la notion de document, l’accent n’est plus mis aujourd’hui sur la fonction d’enseignement […] mais sur celle d’appui, de garant, apporté à une histoire, un récit, un débat. Ce rôle de garant constitue la preuve matérielle, ce qu’en anglais on appelle « evidence », de la relation qui est faite d’un cours d’événements. Si l’histoire est un récit vrai, les documents constituent son ultime moyen de preuve ; celle-ci nourrit la prétention de l’histoire a être basée sur des faits12.

C’est la raison de l’usage de ces images vidéo, non par opposition mais plutôt en complément d’une narration qui jusqu’à la fin s’est basée essentiellement sur la dimension fictive de l’animation – une « non-réalité », simulacre par excellence – pour raconter une histoire personnelle, subjective.

Valse avec Bachir parle de ce « plan intérmediaire […] où s’opèrent concretement les échanges entre la mémoire vive des personnes individuelles et la mémoire publique »13 ; les dimensions subjective et objective trouvent dans ce film un point de contact surprenant, dans l’esprit de l’hybridation stylistique et idéologiquement très proche du scepticisme postmoderne par rapport à l’exactitude présumée de l’histoire. On dirait en effet que ce film déclare l’impossibilité d’une objectivité historique : la seule façon de parvenir à une « vérité » est sa recomposition, un remembrement collectif rendu possible par la participation de plusieurs individus. À la fin, quand ce travail de reconstitution est terminé, la mémoire pourra revêtir une valeur historique, objective, et devenir réelle dans les images vidéo d’un reportage.

2.2 Kurt Cobain: Montage of Heck (Brett Morgen, 2015)

« Ce film est basé sur l’art, la musique, les carnets, les films et les montages audio fournis par la famille de Kurt Cobain » : ce documentaire a été réalisé à partir du matériel audio du même musicien, un véritable journal qu’il a enregistré sur des cassettes.

Une voix à laquelle manque par contre un corps. L’image de Cobain pourrait nous être restitué tout simplement à travers du matériel d’archive et de témoignages de son entourage, sinon en osant la mise en scène de ce qu’il a enregistré sur ses cassettes, des épisodes spécifiques de son adolescence ; l’animation est donc le moyen utilisé pour donner corps à cette voix.

La mise en scène du point de vue de Cobain est réalisée à travers ce qui peut être considéré comme un double écart : en premier lieu la voix, que nous savons être la sienne, la voix véritable de Cobain, mais surtout l’animation qui fait de ce film la biographie définitive de ce personnage.

Une courte introduction réalisée à travers le témoignage de Wendy O’Connor nous montre des films en Super 8 tournés pendant les premières années de vie de son fils, Kurt. Elle lui demande :

« Qui es-tu ?»

« Je suis Kurt Cobain »

Voici le premier écart : le film, presque aussitôt, pose Cobain comme sujet énonciateur et non comme simple objet du discours ; les différents témoignages, qu’ils soient de ses parents, de sa femme ou de Krist Novoselic ne sont pas suffisants, ou plutôt sont le point de vue de tiers, et bien que pendant toute sa durée le film fera recours à plusieurs entretiens filmés, ce documentaire trouve sa raison d’être dans la volonté de nous restituer Kurt Cobain comme le protagoniste véritable, celui dans lequel le spectateur devra s’identifier. En effet quelques minutes plus tard nous entendons pour la première fois une de ses cassettes enregistrées où il raconte sa frustration, l’angoisse et ce sens d’inadéquation qui seront centraux dans ses chansons.

Cette séquence, introduite par une série de photos de Cobain adolescent, cède la place à l’animation, qui constitue le deuxième écart : la dimension fictive de l’animation, simulacre par excellence, donne finalement corps à sa voix.

À partir de ce moment il sera beaucoup plus facile de nous identifier à un sujet dont nous reconnaissons la voix – une voix qui par ailleurs s’adresse directement à nous spectateurs – mais surtout dont nous voyons la figure bouger, image vivante d’un homme que nous savons disparu en 1994.

Pour paraphraser à la fois Roland Barthes et Jean-Louis Comolli, on pourrait dire que devant les photos de Cobain nous savons qu’il a été et qu’il n’est plus14, mais en regardant son image animée nous assistons, littéralement, à une « résurgence, réinstallation, retour. L’homme mort fait retour à l’écran »15.

Le film d’Ari Folman et le film de Brett Morgen utilisent la relation entre animation et matériel appartenant au statut de réel en faveur de la logique narrative mais dans des directions opposées. Si dans Valse avec Bachir l’animation cède la place à la séquence vidéo pour marquer le passage de la sphère subjective à la sphère historico-objective, dans le film sur Cobain le procédé est inversé : nous passons d’une série d’interviews (des « inscriptions vraies », pour reprendre Comolli) à une séquence qui nous montre des photos d’un Cobain adolescent (séquence commentée par sa voix), jusqu’à arriver à son point de vue, c’est-à-dire une séquence animée toujours avec sa voix off.

Ces deux films suggèrent un point de contact remarquable entre l’acte de témoignage et la narration pure, en accord avec la pensée de Paul Ricoeur : alors que le conte historique doit respecter une reconstruction véritable des faits, la fiction narrative n’est pas soumise à cet engagement. Cependant l’historien est de quelque manière forcé à utiliser des artifices narratifs fournis par l’univers de la fiction. Dans le troisième volume de Temps et récit, Ricoeur mentionne explicitement l’engagement éthique qui oblige l’historien dans la reconstructions des faits, ce que lui définit comme dette16. Ces films accomplissent les tâches d’une reconstruction véridique avec un effort ultérieur : le choix du point de vue. Dans Valse avec Bachir c’est Folman lui-même (en tant qu’auteur, personnage agent et narrateur) qui met en jeu son point de vue sur son histoire personnelle qui coïncide avec un épisode de l’Histoire collective17. Dans la biographie de Kurt Cobain le réalisateur ne se contente pas des témoignages présents pendant toute la durée du film mais décide de « fair parler » le protagoniste, de mettre en scène sa voix et son point de vue avec son simulacre animé – imitation de la réalité, sûrement, mais probablement la seule façon de conférer de l’authenticité à la mémoire du musicien.

3. Entre performativité et narration

Dans sa forme traditionnelle, le documentaire se rend immédiatement reconnaissable au spectateur à travers la relation que l’acteur social établit avec la caméra pendant l’acte même de témoignage. L’absence de cet acte implique une reformulation du discours filmique en termes éminemment narratifs. Cet élément introduit les deux prochains films, dans lesquels n’importe quel moyen lié à l’idée d’épreuve ou d’inscription vraie (interviews, images d’archives ou documents en général) est totalement absent. Étant donné ce refus, les enjeux changent radicalement et le résultat esthétique ramène de plus en plus considérablement au potentiel que ce genre a exprimé pendant sa phase « primitive ».

Stella Bruzzi nous rappelle que :

[…] the new performative documentaries herald a different notion of documentary ‘truth’ that acknowledges the construction and artificiality of even the non-fiction film18.

3.1 Le cœur battant (Roberto Minervini, 2013)

Ce film révèle une âme double, en tant que conte de formation intime et délicat sur les premiers troubles d’adolescence de Sara et dans le même temps observation d’inspiration anthropologique par la façon d’exposer les contradictions de l’Amérique rurale au milieu de ce que l’on appelle Bible Belt (dans laquelle vit un nombre élevé de personnes qui se déclarent d’un «protestantisme rigoriste», terme recevant la désignation de fondamentalisme chrétien dans la sphère américaine).

Le travail des familles paysannes, la religiosité archaïque et dans le même temps naïve, la virilité des hommes démontrée à travers le rodéo et l’omniprésence des armes à feu : tels sont les éléments à travers lesquels se déroule ce film, qui est surtout un des meilleurs portraits sur l’adolescence vues sur l’écran.

Le tournage s’est étalé sur deux mois pendant lesquels le réalisateur a travaillé sur un simple brouillon, pas même un véritable scénario, en demandant à ses personnages de jouer eux-mêmes. Le film – caractérisé par une attention particulière réservée à la photographie et au montage – ne renonce pas à des moments lyriques qui renvoient au cinéma de Terrence Malick et à Pique-nique à Hanging Rock (Peter Weir, 1975).

La structure narrative est simple et linéaire et le discours filmique est tellement naturel et fluide qu’il est facile oublier que, « derrière », il y a un metteur en scène. Cela est dû au fait que, contrairement à ce qui se passe normalement dans les documentaires traditionnels, ce film ne recourt presque pas au dialogue en mettant l’accent sur les images : le style filmique de Roberto Minervini se caractérise par l’utilisation constante de la caméra à l’épaule – jamais intrusive bien que toujours très près des personnages – et par un regard non seulement respectueux et impliqué, voire « de rêve ».

À un tiers du film il y a la séquence d’une petite fête paysanne avec une compétition de rodéo. La caméra commence à « vagabonder » parmi la foule jusqu’à s’arrêter sur un homme qui parle avec son fils. C’est maintenant que la troupe déclare sa présence : le garçon se rapproche de la caméra dans un « jeu » qui associe simultanément les acteurs sociaux, l’auteur et le spectateur, qui à ce point est directement mis en cause.

À travers cette séquence dans le style du cinéma direct, Minervini précise sa pratique de cinéaste : il se rend finalement « visible » (avec ses collaborateurs) en brisant donc la magie d’une « fausse fiction », c’est-à-dire l’atmosphère suspendue de la partie précédente, qui par ailleurs sera reprise dans les séquences successives. Le regard en caméra des deux garçons, la voix de leur père qui les encourage à parler directement à la caméra (à nous spectateurs) constituent l’écart entre les deux niveaux auxquels ce film travaille : le premier, prédominant, relatif au monde intime de Sara et marqué par ce regard « de rêve », plus proche aux formes de la fiction, presque un degré zéro où l’auteur prétend de se cacher en se mettant sur le même plan des personnages ; le deuxième niveau, à caractère anthropologique, est lié aux rituels du rodéo, à la vie fermière et à la culture réactionnaire du Texas, caractérisé par des choix formels plus typiques du cinéma-vérité et du direct, où paradoxalement (surtout si mises à côté de celles relatives à l’intimité de Sara) par contraste font « sentir » la présence de la caméra, comme dans la séquence mentionnée.

Il s’agit d’une approche qui bouleverse l’utopie de la transparence au nom de laquelle le direct s’est développé (avant d’être dépouillé par la télé-réalité) ; en acceptant le fait que le monde réel, en tant que autre, est probablement insaisissable à travers les moyens dont nous disposons, un film comme Le cœur battant nous propose des séquences où les stratégies de fictionnalisation servent à rendre poétique ainsi que véridique la confusion d’adolescent de la protagoniste et nous montre comment peut être interprété le genre non-fiction en termes d’auctorialité, en outre sans renoncer à une approche esthétique remarquable à travers une pratique qui renvoie à l’idée de jeu proposée par Comolli, peut-être la seule possibilité d’un compromis entre les deux instances du cinéma, sa nature mécanique et reproductive (visée à la transparence) et l’aspiration humaine à l’expression personnelle ; une approche grâce auquel les deux natures opposées de machine et d’être humain peuvent coexister créativement19. Dans cette optique la définition de documentaire donnée par John Grierson – the creative interpretation of actuality – semble acquérir à nouveau sa valeur et nous aide à reconsidérer le statut, les prérogatives ainsi que le rôle du cinéma de non-fiction.

3.2 All these sleepless nights (Michal Marczak, 2016)

Le dernier film analysé est basé sur une expérience réelle des deux protagonistes qui ont vécu un été entier entre rave parties, discothèques et boîtes de nuit au nom de l’hédonisme et à la recherche d’eux-mêmes.

Ce film a gagné au Sundance Festival 2016 le prix pour la meilleure mise en scène. En effet, c’est exactement la mise en scène qui surprend si on pense assister à un documentaire « normal » ; on pourrait penser qu’il s’agit plutôt d’une dérive, d’un excès d’expérimentation dans l’espoir d’imprégner un documentaire d’éléments même incompatibles avec le cinéma du réel, au nom d’une sorte d’hyperrealisme de la simulation. Le réalisateur n’accorde rien au langage canonique du genre documentaire. Nous ne parlons plus du refus de l’interview ou de caméra à l’épaule, nous parlons de mettre en scène une histoire que l’on suppose être vraie avec le langage le plus effrontément esthétisant qu’on puisse imaginer – un langage arty, pour utiliser un terme à la mode – avec un usage copieux et peut-être exagéré d’évolutions vertueuses de la caméra, non plus une idée de cinéma performatif mais une véritable chorégraphie, par exemple dans la séquence du rave party sur la plage. Si d’un côté il est indiscutable que cette séquence est le résultat d’un tournage effectué pendant une situation réelle, de l’autre côté on peut difficilement nier que l’interaction entre les protagonistes et la caméra a été recherchée méticuleusement afin d’obtenir ce sens d’harmonie et de fluidité. Il est légitime de penser que rien n’a été laissé au hasard, au point de remettre en question la nature véritablement documentaire de ce film qui va bien au-delà (et peut-être détruit) la démarcation entre réel et fictif, en se servant d’une esthétique appartenant même pas au cinéma traditionnel narratif mais plutôt un langage que l’on dirait typique de la publicité et du vidéoclip20.

Avec ce film, un renversement total semble être franchi : si le cinéma fictif se sert depuis longtemps d’une esthétique proche des territoires du documentaire et du reportage pour donner une empreinte de crédibilité à la narration, et si le documentaire à son tour s’est approprié le langage de la fiction, il est fort probable que les formes traditionnelles de fictionnalisation ne soient plus suffisantes. Ainsi le film de Marczak fait une utilisation continue, voire fatigante, de la musique et se sert d’une steadycam pour rendre « invisible » le travail de la caméra (glissement remarquable si aujourd’hui la transparence est poursuivie avec un moyen esthétisant comme la steadycam, qui permet de ne pas sentir la présence de la caméra).

Avec ce film nous arrivons à une étape où non seulement la réalité imite la fiction (Augé21) et redouble ses discours avec « un effet de réalité » (Baudrillard22) ; désormais on voit comme possible une évolution du documentaire (si d’évolution on peut parler) vers une phase hyper-réelle, c’est-à-dire une étape où le naturel est tellement fasciné par l’artificiel jusqu’au point de vouloir lui ressembler, même au prix de définir « documentaire » un long – ainsi qu’un peu monotone – vidéoclip.

Conclusion

Avec ce bref aperçu j’ai essayé de donner une idée la plus claire possible du fait que la désignation même de documentaire pourrait bientôt ne plus être suffisante à définir ce langage, ainsi que le genre non-fiction semble en train de devenir une macro-catégorie prête à englober une infnité de sous-genres constamment en évolution, bien sûr avec la complicité des langages virtuels, d’internet, du numérique.

Malgré le fait que cela puisse justement créer de la perplexité ou même un refus catégorique des puristes, il faudrait être conscient que la condition sine qua non pour l’évolution de tout langage en tant que formes de création est l’expérimentation continuelle, la mise à l’épreuve voire la torsion des formes ; le cinéma hybride, dans ses expressions les meilleures, montre d’avoir absorbé tout signal culturel, politique et social de notre époque avec toutes ses contradictions, et d’avoir eu la capacité de les reformuler de manière remarquablement critique. Dans ce sens, Pietro Montani a souligné que pendant longtemps une des tâches principales des langages artistiques a été celui de nous aider à comprendre ce qui se passait dans le relation entre les images et le monde ; à ce propos il nous invite à considérer l’art selon sa déclinaison originaire, c’est-à-dire comme une techne, une technique de l’imagination23.

En essayant de lire en filigrane les titres proposés dans cette analyse, au-delà des différences substantielles des thèmes et de style, nous pouvons entrevoir une interrogation implicite portée directement à nous qui regardons : c’est un appel à participer activement, à prendre position là où le film se refuse de trop montrer, de tout expliquer.

Libérer le regard et restituer à la vision ce potentiel d’inachèvement trop souvent mortifié par les dogmes de la narration conventionnelle : en définitive cela semble être le but du cinéma hybride.


Notes

1 « C’est au dix-neuvième siècle que l’historiographie a défini son orthodoxie actuelle. En évacuant la poétique au nom de la vérité, l’historiographie basa sa méthode scientifique sur la stricte relation des faits dans l’ordre de leur occurrence, avec la conviction que la vérité émergerait de cette représentation “fidèle” de la réalité des phénomènes. Les historiens abandonnèrent scrupuleusement, en les considérant comme techniques de fiction, les procédés et les figures de la réthorique classique, que l’histoire comme art avait longtemps partagés avec la littérature d’imagination. Ils cherchèrent à les remplacer par un langage sans artifice – un médium de représentation transparent, par lequel le discours historique pourrait transformer le phénoménal en verbal sans perte ni distorsion. […] L’invention de la photographie et a fortiori de la cinématographie porte témoignage du goût qu’a la civilisation occidentale pour le réel (apparent), de sa prédilection pour l’évidence documentaire, exempte de subjectivité humaine. La transparence supposée de l’image cinématographique a le notable avantage d’effacer, plus qu’il ne serait jamais possible dans un texte écrit, ce qu’André Bazin reconnaît être « l’intervention créatrice de l’homme » ». GUYNN, William. Un cinéma de Non-Fiction. Le documentaire classique à l’épreuve de la théorie. Aix-en-Provence : Publications de l’Université de Provence, 2001, p. 15-16.

2 COMOLLI, Jean. Voir et pouvoir. L’innocence perdue : cinéma, télévision, fiction, documentaire, Paris, Verdier, 2004, p. 256-262.

3 Ibid, p. 256

4 Ibid, p. 287.

5 Roger Odin avait indiqué comme hybrides les films « à l’intersection de deux (ou plusieurs) ensembles cinématographiques, des films qui entrelacent deux (ou plusieurs) consignes de lecture » ; cf. ODIN, Roger (dir.). Cinémas et Réalités, Saint-Etienne, CIEREC, 1984, p. 274. Plus recemment la presse anglosaxonne a repris ce terme pour indiquer le mélange de réalité et fiction. Pour un aperçu sur le cinéma hybride voir : MOODY, Luke. Act normal: hybrid tendencies indocumentary film, 11polaroids [en ligne]. Disponible sur : https://11polaroids.com/2013/07/02/act-normal-,hybrid-tendencies-in-documentary-film/ (consulté le 09/03/2019) ;  SVETVILAS, Chuleenan. Hybrid Reality: When Documentary and Fiction Breed to Create a Better Truth, documentary.org [en ligne]. Disponible sur : http://www.documentary.org/feature/hybrid-reality-when-documentary-and-fiction-breed-create-better-truth (consulté le 09/03/2019) ; LIM, Dennis Lim. It’s Actual Life. No, It’s Drama. No, It’s Both, New York Times [en ligne]. Disponible sur : http://www.nytimes.com/2010/08/22/movies/22hybrid.html?_r=0 (consulté le 09/03/2019) ; ROBERTSON, Zoë. Hybrid Film. Blending fact and fiction, and the act of memory as authenticity, povmagazine [en ligne]. Disponible sur : http://povmagazine.com/articles/view/hybrid-film (consulté le 09/03/2019).

6  BRUZZI, Stella.New Documentary. 2ème éd. New York : Routledge, 2006, p. 185.

7 SONTAG, Susan Sontag. On photography.  New York : RosettaBooks, 2005, p. 128.

8 À ce propos je renvoie au concept de fin de l’histoire proposé par Gianni Vattimo  dans l’introduction à son ouvrage La fine della modernità (Milano : Garzanti, 1985) et à son analyse de la société de la communication dans le premier chapitre de La società trasparente (Milano : Garzanti, 1989).

9 MONTANI, Pietro. L’immaginazione intermediale. Perlustrare, rifigurare, testimoniare il mondo visibile. Roma-Bari : Laterza, 2010, p. XIII [traduction du redacteur].

10 RICŒUR, Paul. Temps et récit. Tome III : Le Temps raconté. Paris : Points, 1991, p. 334-335 [1re édition Paris : Seuil, 1985].

11 J’utilise le terme « mission » dans l’acception fournie par Christopher Vogler dans The Writer’s Journey: Mythic Structure For Writers, 3ème éd, San Francisco, Michael Wiese Productions, 2007.

12 RICŒUR, Paul. Op cit., p. 213-214.

13 RICŒUR, Paul. La Mémoire, l’histoire, l’oubli. Paris : Points, 2003, p. 161 [1re édition Paris,Seuil, 2000].

14 BARTHES, Roland.  La Chambre claire. Note sur la photographie. Paris : Gallimard, 1980, p. 133.

15 COMOLLI,Jean-Louis. Op cit., p. 600.

16 « […] à la différence du roman, les constructions de l’historien visent à être des reconstructions du passé. A travers le document et au moyen de la preuve documentaire, l’historien est soumis à ce qui, un jour, fut. Il a une dette à l’égard du passé, une dette de reconnaissance à l’égard des morts […] » in RICŒUR, Paul. Op Cit., p. 253.

17 « Autant la notion de mémoire collective doit être tenue pour une notion difficile, dénuée de toute évidence propre, autant son rejet annoncerait, à terme, le suicide de l’histoire » in RICŒUR, Paul. Op Cit., p. 216.

18 BRUZZI, Stella. Op Cit., p. 186.

19 « Jouer avec la figure humaine telle que le « réalisme ontologique » du cinéma la représente, tenir l’image du corps pour identique au corps réel et, mieux, avec lui confondue, jouer avec l’effet de réel du corps filmé, voilà ce qui est en promesse dans l’utopie cinématographique » dans  Jean-Louis Comolli, Op Cit., p. 599.

20 À ce propos je renvoie à JULLIER, Laurent, PEQUIGNOT, Julien Péquignot. L’effet-clip au cinéma. Kinephanos [en ligne], 2013, Vol. 4, No. 1, p. 64-80. Disponible sur : https://www.kinephanos.ca/2013/effet-clip/ (Consulté le 14/03/2019).

21 AUGE, Marc. La Guerre des rêves. Exercices d’ethno-fiction. Paris : Seuil, 1997, p. 16.

22 BAUDRILLARD, Jean Baudrillard.  L’Echange symbolique et la mort. Paris : Gallimard, 1976, p. 112.

23 MONTANI, Pietro. Op Cit., p. 63.

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Bibliographie

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