Dorel OBIANG NGUEMA
Docteur en langues et littérature françaises au Centre Interdisciplinaire d’Étude des Littératures d’Aix-Marseille (CIELAM) de l’Université d’Aix-Marseille, obiangdorel@gmail.com
Pour citer cet article : OBIANG NGUEMA Dorel, « Circularité et linéarité du temps dans deux romans contemporains : Olivier Rolin, Le météorologue ; Patrick Deville, Kampuchéa », Litter@ Incognita [En ligne], Toulouse : Université Toulouse-Jean Jaurès, n°13, « Temps à l’oeuvre, temps des oeuvres », saison automne 2023, mis en ligne le 13 octobre 2023, disponible sur https://blogs.univ-tlse2.fr/littera-incognita-2/2023/10/10/circularite-et-linearite-du-temps-dans-deux-romans-contemporains-olivier-rolin-le-meteorologue-patrick-deville-kampuchea/
Résumé
L’objet de cet article est l’analyse des modes de représentation du temps chez deux auteurs français contemporains : Olivier Rolin et Patrick Deville. Lorsque l’on croise les deux romans des auteurs, nous voyons émerger la mise en évidence de deux conceptions du temps très différentes. Le temps semble être en mouvement chez Rolin avec une chronologie dans la narration des événements. Tandis que chez Deville, on constate un éternel retour des événements. Autrement dit, il semble que chaque événement raconté ait déjà eu lieu dans le passé.
Mots-clés : circularité – linéarité – Rolin – Deville – représentations – temps – événements – romans.
Abstract
This article aims to analyze the modes of representation of time in two contemporary French authors: Olivier Rolin and Patrick Deville. When we compare the two authors’ novels, we see the emergence of two very different conceptions of time. Time seems to be in motion in Rolin’s novel, with a chronology in the narration of events. In Deville’s novel, however, there is an eternal return of events. In other words, it seems that each event narrated has already taken place in the past.
Keywords : circularity – linearity – Rolin – Deville – representations – time – events – novels.
Sommaire
Introduction
1. Du temps, de la longue durée en histoire : approches théoriques
2. Les formes du temps : entre la ligne (Rolin) et le cercle (Deville)
Conclusion
Notes
Bibliographie
Introduction
La linéarité et la circularité sont deux termes que nous associons aux romans d’Olivier Rolin et Patrick Deville. Nous avons choisi ces deux romans parce qu’ils représentent le temps de plusieurs manières différentes en dévoilant au passage deux conceptions du monde distinctes. Certes les deux termes sont souvent utilisés dans les domaines de la science (physique, mathématiques), mais nous n’en retiendrons que leur usage courant pour notre proposition. En effet, la linéarité désigne le caractère de ce qui est linéaire, c’est-à-dire qui a un sens de progression constant et unique. La circularité désigne le caractère de quelque chose qui fait revenir au point de départ et ne progresse pas. Les deux romans ont un rapport étroit avec l’Histoire. Le roman1 d’Olivier Rolin porte sur l’assassinat d’un météorologue, Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, tué par le régime de Staline pendant la Grande Terreur (1937-1938). Le roman2 de Patrick Deville relate plus d’un siècle et demi de l’histoire du Cambodge depuis la découverte d’Angkor par le naturaliste Henri Mouhot, jusqu’au procès des Khmers rouges qui fait suite à la dictature imposée dans les années 1970 par ce régime épris d’une utopie meurtrière. Les deux ouvrages organisent de manière différente l’inscription de l’histoire et du temps dans le roman : le premier (Rolin) choisit d’étudier un cas à la fois singulier et exemplaire, au moyen d’un riche matériel documentaire découvert dans les archives. Il le fait pourtant d’une manière qui diffère de celle d’un historien, par exemple par la place qui est faite au personnage de l’auteur, ou en s’autorisant des aperçus qui sont de purs produits de l’imagination. Lorsqu’il écrit, nous constatons que le temps se perçoit comme une ligne droite qui part de la naissance à la mort du personnage principal. Le second (Deville) brosse une sorte de fresque qui s’étale sur plus d’une centaine d’années. À nouveau toutefois, comme chez Rolin, l’auteur se met en scène, sous les traits d’une espèce de journaliste baroudeur, personnage éminemment romanesque, qui adopte ici un ton singulier, vaguement cynique, très éloigné du registre adopté par Rolin. Le temps se perçoit alors comme un cercle qui revient sur lui-même. Autrement dit, les événements racontés par le narrateur semblent se répéter sans cesse. Dès lors, quelle forme prend le temps dans chacune de leurs œuvres ?
1. Du temps, de la longue durée en histoire : approches théoriques
Pour penser et comprendre les événements historiques qui ont eu lieu dans le passé, il faut les inscrire dans un temps long, et cette approche s’oppose à une histoire qui peut être déterminée dans l’instant présent. La « longue durée » est un concept forgé par l’historien Fernand Braudel pour analyser les faits historiques sous l’angle d’un temps long par opposition à une histoire qui se concentre sur des périodes courtes, que l’on appelait histoire événementielle ou encore l’histoire bataille – en somme une histoire dite « positiviste3». Voici les termes dans lesquels Braudel récusait l’histoire événementielle :
Tout travail historique décompose le temps révolu, choisit entre ses réalités chronologiques, selon des préférences et exclusives plus ou moins conscientes. L’histoire traditionnelle attentive au temps bref, à l’individu, à l’événement, nous a depuis longtemps habitués à son récit précipité, dramatique, de souffle court […] Bien au-delà de ce second récitatif se situe une histoire de souffle plus soutenu encore, d’ampleur séculaire cette fois : l’histoire de longue, même de très longue durée. La formule, bonne ou mauvaise, m’est devenue familière pour désigner l’inverse de ce que François Simiand, l’un des premiers après Paul Lacombe, aura baptisé histoire événementielle. Peu importent ces formules ; en tout cas c’est de l’une à l’autre, d’un pôle à l’autre du temps, de l’instantané à la longue durée que se situera notre discussion4.
Lorsque Fernand Braudel a forgé à l’époque le concept de longue durée, son analyse portait en priorité sur l’histoire économique et sociale pour mettre en valeur les cycles plus lents qui avaient cours en histoire. Il opère une distinction entre les deux types d’histoire et cherche à s’affranchir d’un soupçon attaché à la science historique, sa plus ou moins grande proximité avec la fiction :
Sans doute concerne-t-elle tout particulièrement ces sciences dites humaines ou sociales qui, depuis deux siècles, tentent avec des fortunes diverses de gagner leur place dans le concert des vraies sciences, d’écarter le soupçon interminable d’appartenir encore aux œuvres de la littérature ou de la politique, voire des deux à la fois5.
De ces querelles entre les deux types d’histoire, nous ne retiendrons pour notre travail que la possibilité d’écrire l’histoire sur des temps longs, et cela au regard de ce que proposent Deville et Rolin dans leurs romans. Ils parviennent à situer, dater, les événements historiques dans un temps particulier, ils quantifient le temps. Par leurs modes d’écriture de l’histoire, ils remettent en cause une conception aporétique du temps que l’on retrouve dans le premier tome de la trilogie Temps et récit de Ricoeur. Pour ce dernier, il est difficile, sinon impossible, de mesurer le temps, et il avançait cette proposition : « La question est donc circonscrite : comment le temps peut-il être, si le passé n’est plus, si le futur n’est pas encore et si le présent n’est pas toujours ? […] Comment peut-on mesurer ce qui n’est pas ?6 » Genette semble même aller plus loin dans la conception aporétique du temps, en essayant de montrer que le temps de l’histoire ne pouvait guère être évalué : « On le date parfois, mais on ne le mesure jamais7». Notre travail prend appui sur Nietzsche et Jack Goody qui montrent que se représenter le temps, c’est tourner autour d’un cercle, revenir au même.
2. Les formes du temps : entre la ligne (Rolin) et le cercle (Deville)
La particularité des œuvres de Deville et de Rolin est justement d’échapper à l’aporie du temps, parvenant à entremêler finement les deux conceptions dichotomiques du temps de l’histoire : la longue durée et l’histoire événementielle ou l’histoire bataille. Les historiens ont très souvent traité ces deux aspects en les opposant systématiquement. Analysant les travaux de Fernand Braudel, l’historien Gérard Noirel évoque le traitement du temps sous l’angle d’une bataille des tranchées entre l’histoire longue et l’histoire courte. Il déclare : « Cette matière peut être mesurée car il existe une « échelle unique » du temps à l’aune de laquelle s’évaluent toutes les durées. Le temps long (« longue durée ») s’oppose ainsi au temps court (« événementiel »). Entre les deux, se situe un temps intermédiaire (la « moyenne durée8»). Ces assertions sont présentées comme des évidences. Le but de Braudel n’est pas, en effet, d’entrer dans une discussion théorique sur le sujet, mais de justifier une hiérarchie des formes de savoir conforme aux intérêts intellectuels et institutionnels qu’il défend.
Le pôle répulsif est représenté par « l’histoire événementielle », constamment désignée comme « traditionnelle ». À l’opposé, se situe le pôle attractif, appelé « l’histoire nouvelle », elle-même décomposée en deux ensembles : d’une part l’histoire économique et sociale labroussienne, d’autre part la longue durée braudelienne. Même si elles contribuent toutes les deux à l’innovation, la première est moins pertinente que la seconde car c’est une histoire de « moyenne durée ». Le privilège qu’elle accorde aux cycles et aux conjonctures la rend incapable de s’élever à la « longue durée », qui seule englobe toutes les temporalités de l’histoire. Cette limite explique que l’histoire économique et sociale, qu’on appellera bientôt « l’histoire sérielle », ne parvient pas à s’émanciper complètement de « l’événementiel9» . Histoire événementielle pour Deville, quand il raconte le génocide au Cambodge dans les années 70, et pour Rolin, l’assassinat d’un météorologue pendant la période de la Grande Terreur.
En admettant que Deville et Rolin écrivent l’histoire à partir d’une durée assez longue, nous relevons néanmoins que leurs approches diffèrent sur la perception qu’ils ont du temps, sa linéarité chez Rolin contre sa circularité chez Deville. Certes les deux termes sont souvent utilisés dans les domaines de la science (physique, mathématiques), mais nous n’en retiendrons que leur usage courant pour notre proposition. En effet, la linéarité désigne le caractère de ce qui a un sens de progression constant et unique, et la circularité, le caractère de quelque chose qui revient à son point de départ, ne progressant donc jamais.
Rolin se propose d’étudier à partir d’un cas particulier, l’histoire du météorologue, dans une période très violente, la Grande Terreur en URSS. Partant de cette histoire personnelle, il cherche à retrouver le fondement de l’espérance révolutionnaire au XXe siècle et le contexte de l’époque :
Il y a quelque chose d’autre, quelque chose de personnel dont il ne me paraît pas indécent d’essayer de parler maintenant, au terme du récit. Qu’est-ce qui m’intéresse, me concerne, dans cette histoire qui n’est pas la mienne, ni celle dont je descends directement – je ne parle pas de l’histoire du météorologue seulement, mais celle de l’époque terrible où il vécut et mourut10?
Retracer cette histoire, c’est d’abord mentionner les différentes étapes qui ont marqué cette époque, passant de l’espérance au désenchantement. Pour ce faire, Rolin procède de manière chronologique en répertoriant les dates importantes de l’histoire du météorologue. Il l’identifie à un double niveau à partir d’un lieu et d’une date symbolique : la Russie actuelle dans laquelle a eu lieu cette deuxième grande révolution mondiale, et dont l’espace englobe à la fois les dimensions politique et historique : « L’espace russe est inévitablement politique, l’histoire y croise, y trame sans cesse la géographie11». Rolin associe à l’espace russe une date qui marquera durablement cette période pour de nombreuses générations, et conclut : « Les habitants du vingt et unième siècle oublieront sans doute l’espoir mondial que souleva la révolution d’Octobre 191712».
Le doute laisse désormais la place au désenchantement, comme l’a relevé François Hartog sur l’analyse du temps : « Vinrent, en effet, les années 1970, les désillusions ou la fin des illusions, le délitement de l’idée révolutionnaire13». Le passé ne permet plus de mieux structurer le présent et l’avenir. Les personnages de Rolin apparaissent toujours dans une période qui vient après un effondrement dont la Révolution avait constitué la matrice, ce que François Hartog a qualifié de régime moderne d’historicité, où le futur dominait l’une des trois catégories qu’il avait construites. Mais le futur se retrouvait lui-même désormais en crise : « Ce futur éclairant l’histoire passée, ce point de vue et ce telos lui donnant sens, a pris avec les habits de la science, tour à tour, le visage de la Nation, du Peuple, de la République, de la société ou du Prolétariat14». Rolin parvient à mettre en évidence deux régimes temporels à travers les deux générations évoquées, comme le souligne François Hartog : « Rolin et ses camarades se découvrent douloureusement exilés de l’Histoire, tandis que le mal placé de Chateaubriand s’impose à lui parce qu’il se trouve brutalement trop placé dans le mille de l’Histoire : entre deux temps, entre deux régimes d’historicité, l’ancien et le moderne15».
Cette posture du « mal placé » ne se réduit pas uniquement à une sorte de décalage de la génération de Rolin. En réalité, cette expression constitue une réflexion plus générale de la part de Rolin sur la littérature et sur l’art. La littérature ne peut pas être cantonnée à un moment donné, car celle-ci est appelée à excéder son temps, son lieu. En somme, il parle ici d’une littérature plus large, universelle. Il l’évoque dans les termes suivants :
Il se peut, après tout, qu’il y ait des littératures ou des arts bien placés, enracinés, et même enterrés, enfouis dans la glèbe comme des tubercules. Mais ce dont je parle ici, c’est d’un art tumultueux, emporté, où travaille et fait œuvre non ce qui fixe et localise, ou enracine, mais au contraire ce qui déplace, dérègle, agite et déracine, bref ce que les régimes totalitaires appellent de l’art « dégénéré » (et à juste titre, en fin de compte : dégénéré, sans genus autre que l’humain, c’est-à-dire universel), et qui est l’art , et notamment de la littérature de ce siècle16.
Rolin développe alors une réflexion sur le progrès : « Parfois, au fond d’une distance immense, la cheminée d’une locomotive rappelle qu’au sein de ce temps apparemment figé quelque chose de neuf est en train de se produire, qui est peut-être le progrès et qui est peut-être aussi une menace17». Il utilise la métaphore d’une locomotive qui suit un chemin dont on ne peut déterminer la destination finale à priori, mais ne tranche pas catégoriquement entre une histoire qui serait considérée comme un progrès et une autre comme une menace. Il essaie d’envisager plusieurs lectures possibles de l’histoire et, à partir des faits relatés dans le récit, il veut scruter la force, progrès ou déclin, qui a triomphé.
Pour ce faire, Rolin choisit quelques dates symboliques dans la vie de son personnage que nous présenterons selon le schéma suivant : il est arrêté en janvier 1934 alors qu’il était attendu par son épouse pour assister à une représentation théâtrale ; il est déporté en juin 1934 sur les îles Solovki ; il est exécuté très probablement en octobre 1937 après la décision prise par le collège de l’Ouguépéou en mars 1934 de fusiller les condamnés. En août 1956, dix-neuf ans plus tard, l’annulation de sa condamnation est prononcée. Rolin mentionne ainsi le terrifiant paradoxe : « La mort est annulée. L’affaire est close. Pas tout à fait cependant. L’État soviétique n’a pas inventé la Résurrection des morts, mais un autre grand mystère, la multiplication des morts18». L’État soviétique tente de corriger les nombreuses exactions perpétrées par le régime de Staline, à sa mort en 1953. En 1957, il y aura la délivrance d’un certificat de mort pour Alexeï, et sa réhabilitation posthume interviendra en 1997. Lui accorder un certificat de décès revenait sans doute à lui rendre une certaine dignité. Eléonora, la fille d’Alexeï, meurt en 2011 sans que Rolin ait pu la rencontrer comme il le souhaitait.
Il insère dans son récit un aperçu des évolutions de la politique économique en URSS du début des années 30 à la fin du communisme. Dans les années 30 cette économie a connu un changement important, passant de la propriété privée, essentiellement paysanne, à une économie étatique, très centralisée, ce qui engendrera un grand nombre de morts au nom d’une idéologie :
Et Dieu sait qu’elle a besoin qu’on l’aide, l’agriculture socialiste. Conjuguant l’élimination des paysans riches ou supposés tels (il suffit parfois de posséder une vache pour être décrété « koulak » et déporté ou fusillé), la collectivisation à marche forcée et les réquisitions de grain, la politique démente de Staline entraîne en Ukraine une famine atroce. Des millions de gens, trois millions sans doute, meurent pendant les années 1932-1933 sur les terres où Alexeï Féodossiévitch a passé son enfance et sa jeunesse. Quand on a fini de manger les chats, les chiens, les insectes, de ronger les os des animaux morts, de sucer les herbes, les racines et les cuirs, il arrive qu’on mange les morts, il arrive même qu’on les aide à mourir […]19
Il décrit ensuite un temps où nous sommes passés de cette dimension collective de l’économie en vigueur en URSS à une économie de marché, entendue comme un système économique qui consiste à prendre les décisions en fonction de l’offre et de la demande dans le cadre d’un marché libre. C’est peut-être l’un des effets de la fin du communisme en URSS jusqu’à aujourd’hui. Mais ce passé est désormais cerné, conquis par la modernité incarnée par l’industrie du luxe, en témoignent les noms des marques évoqués . Il montre ainsi un changement d’époque, et dans le même temps il parle de la « nouvelle Russie », terme apparu au début des années 1990 après l’effondrement de l’Union Soviétique. Il établit simplement une transition entre l’ancien monde et le nouveau par un processus évolutif.
Rolin présente une approche du temps assez classique, qui se veut fondamentalement progressiste, et plutôt occidentale, judéo-chrétienne, de la conception du temps. Elle est très européocentrique comme l’a vigoureusement critiqué l’anthropologue anglais Jack Goody : « Il est un autre aspect général de l’appropriation du temps qui concerne la caractérisation de sa perception – linéaire en Occident […] Le calcul linéaire fait partie intégrante de l’histoire des individus, qui va inéluctablement de la naissance à la mort20». Dans d’autres cultures, notamment en Orient, en Asie et en Afrique, la conception du temps historique est cyclique, par opposition à la conception linéaire du temps des occidentaux, et incite à croire à un éternel retour des choses : « Toujours menteuse est la ligne droite, chuchota dédaigneusement le nain. Courbe est toute la vérité, le temps même est un cercle21. »
Le roman de Patrick Deville traite le temps sous cette forme cyclique. Nous observerons que la figure du « cercle » est celle qui domine l’écriture de Deville dans le roman et même dans une autre partie de son œuvre, précisément la trilogie22 romanesque publiée au Seuil, dans laquelle il aborde l’histoire des révolutions dans trois régions du monde : Pura vida, Vie & mort de William Walker traitait des révolutions sur le continent américain, dont l’Amérique latine est l’épicentre ; Equatoria était en quelque sorte une traversée de l’Afrique, avec pour point de départ le transfert des cendres de Pierre Savorgnan de Brazza. Dans Kampuchéa, le récit offre plusieurs angles possibles de lecture de l’histoire. Selon le philosophe Michel Meyer :
Que l’Histoire soit la marche du progrès vers une plus grande liberté pour le plus grand nombre (Hegel), qu’elle soit l’avènement d’une égalité démocratique généralisée (Tocqueville) ou alors, qu’elle apparaisse comme le déclin inexorable de civilisations aux jours limités (Spengler), les lectures de l’Histoire sont multiples. Elles ont toutes leur part de vérité et de cohérence, mais elles ne se contredisent pas moins sur le sens qu’il convient d’attribuer à l’évolution historique, qu’elle soit linéaire ou cyclique23.
Nous avons le sentiment, par exemple, de revenir au même point de départ avec la révolution en Thaïlande à travers le roman de Patrick Deville, qui semble décliner une vision hégélienne de l’histoire au seuil même du roman : « La planète défile sous la carlingue et j’essaie de surprendre les progrès de la raison dans l’Histoire et sous mon train d’atterrissage 24». Le narrateur s’exprime ainsi à propos des événements en cours, et, à partir d’un seul de ces événements, essaie de généraliser la situation à l’échelle plus globale du monde, utilisant pour cela une « synecdoque généralisante25». Dans le cas précis où le narrateur s’exprime, le progrès peut être considéré à l’instar des événements révolutionnaires qu’il commente depuis son poste d’observation, son petit avion, d’où l’impression pour le lecteur d’être en train de voir des bouleversements s’opérer dans le roman.
La vision hégelienne de l’histoire habite également les jeunes révolutionnaires qui ont un projet précis, réaliser un peuple nouveau, débarrassé de l’influence de la culture occidentale : « On vide les villes de province […] On traque les anciens exploiteurs qu’on extermine avec leur femme et leurs enfants […] On tire la charrue à l’épaule dans la boue. On défriche 26». Il s’agit ici d’un temps dialectique, marqué par l’opposition entre deux types de civilisations dans le roman de Patrick Deville, où la positivité (peuple nouveau, projet porté par les Khmers rouges) doit inéluctablement succéder à la négativité (culture occidentale).
La révolution n’apporte pas toujours de la nouveauté, elle consiste parfois à reproduire des pratiques déjà utilisées par d’autres révolutionnaires habités par la même idéologie. Le narrateur déclare : « Souvent les partis révolutionnaires, après l’effervescence, deviennent bureaucratiques et lents, administratifs, tatillons, aiment les tampons27». L’utilisation du modélisateur « souvent » en début de proposition traduit le caractère répétitif des postures adoptées par les révolutionnaires voulant marquer une césure avec d’anciennes pratiques28, alors qu’elles ne font que les amplifier. Le présent de l’indicatif inscrit cette affirmation comme une vérité générale, appliquée sur l’ensemble des partis dits « révolutionnaires ». Le caractère bureaucratique des Khmers rouges se retrouve dans d’autres partis révolutionnaires sur d’autres aires géographiques et dans d’autres périodes données, d’où l’hypothèse cyclique dans le roman de Patrick Deville que rien ne change vraiment : « […] ce qui a lieu a déjà eu lieu et aura lieu à nouveau, mais très exactement sous la même forme puisque ce qui fut, c’est ce qui sera, ce qui sera, c’est ce qui a été, ce qui est ce qui a été et qui sera, et ce dans les mêmes formes29». Cette réflexion de Michel Onfray résume, malgré la formule alambiquée, la théorie nietzschéenne de l’éternel retour des choses, ou au règne de la fatalité, du déterminisme, où l’homme aura peu de place pour la liberté.
La vision déterministe de l’histoire dans le roman apparaît sous la forme d’un slogan que l’on retrouve dans l’incipit du deuxième chapitre « on ne choisit pas son lieu d’affectation ». Le narrateur en justifie l’usage dans les termes suivants :
Cette phrase avait été prononcée au lever du jour, non loin d’une gare routière, dans une gargote, par l’un des marins assis derrière des bières, marins anglais ou australiens en escale. Si elle fustigeait les usages de la marine, elle prenait isolée un sens universel. Ni le siècle ni le lieu. Des marins sont jetés au hasard sur les océans vers les boucheries maritimes30.
Le narrateur semble inscrire cette phrase comme un principe universel dont les individus auront du mal à se défaire. Elle est reprise une vingtaine de fois dans le roman, et montre des personnages, des marins ici mais aussi des militaires dans d’autres passages, comme des prisonniers du destin. Le lieu d’affectation de ces marins a été décidé de façon accidentelle, aucune rationalité n’est intervenue pour asseoir la décision de les envoyer sur les océans. On est prié de croire que rien n’est à faire pour ses marins, que les choses sont ainsi et inenvisageables autrement. Le narrateur mentionne également que Pierre Loti n’a pas pu choisir son lieu d’affectation.
Le lecteur pourrait être amené à croire, à la lecture du roman, que le narrateur voudrait absoudre les individus des actes qu’ils ont commis, alors qu’il parvient par ailleurs à montrer que l’on peut conjurer cette fatalité qui ôterait tout choix aux personnages. Il mentionne la situation d’un jeune marin français qui a pu échapper à cette fatalité en choisissant lui-même le lieu de sa destination, dans le souci de se distinguer vis-à-vis de son père : « Souvent c’est la crainte de ne pas égaler les pères qui fait les aventuriers. Celui de Marie-Charles David de Mayrena est un officier de marine. Le fils échoue au concours de l’École navale de Brest. Il choisira lui-même son affectation31». Le narrateur met en évidence le choix d’une jeune femme de vouloir une nouvelle vie : « Je penserai souvent à cette grande fille en blouse jaune, à l’humanité, la fraternité de son sourire désespéré, son effort dérisoire et admirable pour ne pas demeurer là où le destin l’avait plantée […] Choisir elle-même son affectation. Vivre sa vie32». Il y a là une forme de volontarisme33 chez cette jeune femme qui entend soumettre le réel à sa volonté. Elle ne veut plus se considérer comme victime, en refusant de croire à l’irréversibilité du destin tragique de l’existence, et en adoptant une éthique de la vie essentiellement optimiste marquée par le sourire.
Quant aux Khmers rouges, le caractère répétitif de leurs pratiques façonne leur conception du temps et de l’histoire. Ils en ont une vision réactionnaire. Le mot n’est pas employé ici dans un sens purement péjoratif, il doit être compris dans son sens étymologique, c’est-à-dire comme l’opposition à toute évolution politique ou sociale, par contraste avec une vision progressiste : ils veulent fondamentalement rétablir un ordre ancien fondé sur les valeurs de leur civilisation. Le narrateur expose leur projet sous la forme d’une phrase nominale : « Le retour au village et à la pureté khmère34». Dans cette phrase une accentuation porte sur les mots « le retour », pour montrer la nécessité de restaurer ce passé khmer, qui n’est plus seulement un projet mais un impératif. Patrick Deville offre dans son roman une littérature soucieuse de restaurer ce qui a disparu, et qui se conçoit comme un travail de remémoration, de réactualisation.
Ajoutons que la vision réactionnaire du temps et de l’histoire des Khmers rouges est imprégnée de la mélancolie qui habite ce peuple : « Derrière le sourire des Khmers se dissimule l’abîme de la mélancolie. Il est l’héritier d’un trône nostalgique35». Nostalgie d’un passé qui n’est plus, dont les Khmers rouges se sentent en quelque sorte orphelins. Par-delà la violence de leurs actions, un profond malaise les hante : celui d’avoir été dépossédé de leur passé et même de leur territoire. Ils éprouvent un sentiment d’inadaptation entre l’idéal qu’a été leur terre natale et le pays qu’ils contemplent aujourd’hui. Le retour au village peut s’interpréter comme une forme d’exil36 motivée par un sentiment nostalgique : il leur faut retourner au village, qui se confond avec l’espace originel où s’est construit le peuple d’antan, et qui a fait la fierté du Cambodge. D’autant que ce village, pour les Khmers rouges, agit comme l’antidote qui doit neutraliser la nuisance de la ville sur les individus. La méfiance affichée de la ville peut commencer à s’étendre.
Le roman de Patrick Deville propose, à partir du concept de la longue durée que nous avons déterminé, une lecture vitaliste de l’histoire, qui est une variation de la conception cyclique du temps. Cette perception vitaliste met en évidence un thème auquel le narrateur fera allusion, la décadence, et montre à la fois l’effondrement et la renaissance de certaines civilisations, en partant de l’assertion de Paul Valéry énoncée en 1919 au lendemain de la Première Guerre mondiale : « Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles37». La mort des civilisations fait partie du cycle normal des choses qui suivent ce schéma : la naissance, la croissance, l’acmé et la disparition, et la civilisation khmère n’échappe pas à ce principe vital. Le narrateur en fait le constat lucide et tragique : « Les civilisations à leur apogée aiment contempler l’apogée des civilisations disparues et frissonner devant l’avenir38». Au Cambodge, le constat de la mort de la civilisation khmère est fait par Henri Mouhot lorsqu’il découvre les vestiges d’une civilisation disparue :
Il entreprend cependant d’arpenter, puis de relever les vestiges irrécusables d’un empire écroulé et d’une civilisation disparue. Au hasard de ses marches en forêt, et sur des distances considérables, il est peu à peu bouleversé par tous ces temples abandonnés, mangés de lianes et de racines, envahis par les singes, et prend conscience de découvrir éparpillée, une œuvre qui n’a peut-être jamais eu son équivalent sur le globe. Que ces pierres parlent éloquemment ! Comme elles proclament haut le génie, la force et la patience, le talent, la richesse et la puissance des Khmerdôm ou Cambodgiens d’autrefois39!
Le langage employé pour décrire sa découverte d’une civilisation engloutie est élogieux, voire apologétique. L’expression « mangés de lianes et de racines » raconte à la fois l’emprise du temps sur ces temples et la force de la nature qui reprend ses droits et préempte un territoire que les hommes et le temps lui ont laissé. Nous sommes là en face de ruines, qui peuvent être considérées comme un principe explicatif de la déliquescence d’une civilisation.
Si les civilisations naissent et meurent, des explications sont nécessaires, et le roman de Patrick Deville propose une hypothèse : selon le narrateur, l’une des raisons est à chercher dans les conflits qui opposent les civilisations entre elles, où la plus forte d’entre elles cherche inexorablement à triompher des autres : « […] sur les ruines de Numance, et pendant qu’autour d’elles les villes ont changé de maîtres et de nom, que plusieurs sont rentrées dans le néant, que les civilisations se sont choquées et brisées, leurs paisibles générations ont traversé les âges et se sont succédé l’une à l’autre jusqu’à nous40. »
Les conflits entre civilisations seraient comme soumis à une loi immuable au cours des siècles. Les mots du narrateur entrent en résonnance avec la théorie de Samuel Huntington sur le choc des civilisations où il dépasse les analyses totalisantes telles que le marxisme ou le libéralisme. Le présent doit être pensé sous l’angle de conflits entre blocs antagonistes, et cette bataille se joue désormais sur le terrain culturel : « La culture, les identités culturelles qui, à un niveau grossier sont des identités de civilisations, déterminent les structures de cohésion, de désintégration et de conflits dans le monde d’après-guerre froide41». Le narrateur insiste davantage sur les facteurs externes, tels que la culture, qui menacent une civilisation au détriment de l’autre, et essaie de situer la confrontation entre civilisations dans une perspective historique, en montrant que le triomphe de l’une sur l’autre a eu lieu par l’appropriation des objets culturels par la civilisation dominante. Cette dépossession a déjà eu lieu dans le passé et aura encore lieu dans l’avenir : « Lui s’en fout de ces blocs de pierre, il connaît l’Histoire, il en a vu d’autres […] Que les vivantes à leur apogée pillent les perdantes. C’est ainsi. Bonaparte son obélisque égyptien, les Anglais les frises du Parthénon42».
Le roman de Patrick Deville explore certaines périodes de l’histoire où la culture occidentale a étendu son hégémonie sur le reste du monde, bâtie sur les grandes réalisations du XIXe siècle, comme l’affirme Jack Goody : « Les Européens d’aujourd’hui fondent leur ethnocentrisme sur les grands accomplissements du XIXe siècle43». Sa domination ne pouvait être éternelle, et l’on finit par se rendre compte que toute civilisation court le risque d’une « décadence ». Une forme de pessimisme habite le narrateur qui s’inquiète pour le présent et pour l’avenir : « À la lecture de ces phrases, au cœur de l’Europe prospère et éclairée, au centre du monde, peut-être éprouve-t-on déjà le vertige de la chute, pressent-on le déclin, l’autodestruction des guerres mondiales, le gouffre de l’oubli. Que restera-t-il de cette civilisation-là44? » On perçoit dans ces propos bien plus qu’un simple pessimisme : on y découvre une forme d’angoisse existentielle à propos de la civilisation occidentale qui semble vaciller après avoir connu la prospérité. Pour le narrateur les guerres ont contribué à affaiblir et à remettre en cause sa toute-puissance, et le terme de « vertige » renforce l’idée d’une perte de repères. Plus inquiétante pour elle est la possibilité d’être oubliée, l’hypothèse de ce moment où les ruines montreront qu’elle n’est plus.
Le narrateur pose une question majeure, à laquelle il n’apporte pas pour le moment de réponse catégorique, sur ce qui restera de cette civilisation. Il invite chaque lecteur à y apporter sa propre réponse, mais puisque l’histoire se pense en termes de cycles, le narrateur formule l’hypothèse d’une prochaine civilisation qui succèdera à celle des occidentaux dans une perspective de conflits. Il voit dans le continent asiatique, notamment la Chine, la prochaine civilisation dominatrice. Pour cela, il cherche à voir dans le passé comment les choses se sont déroulées pour pouvoir penser le futur, anticiper à partir de modèles ce qui peut advenir. Peut-être est-il dans le fantasme, mais il imagine que les Chinois finiront par prendre le symbole de la France, la tour Eiffel, tout en restant évasif sur le moment de cette prise. Il ne peut mesurer cela dans le temps, il propose simplement une piste de réflexion, mais il ne précise pas le mode opératoire par lequel elle sera prise un jour. Peut-être fonde-t-il cette future domination chinoise sur la puissance économique à partir de laquelle elle pourra également dominer la sphère culturelle. Or la puissance de la Chine ne date pas du XXe siècle, étant déjà à l’œuvre à l’époque très éloignée où la Chine supplantait l’Occident sur le plan économique dans un contexte de concurrence45. Le roman de Patrick Deville interroge ainsi les phases de domination qui ont cours dans l’histoire, dont le processus n’est pas statique, mais se renouvelle à mesure que la puissance s’élève ou décline.
L’inachèvement d’un mécanisme, c’est aussi de cette manière que le narrateur conçoit la révolution à partir de l’histoire des Khmers rouges. Les choses se passent comme si elles avaient déjà eu lieu dans le passé, et le narrateur le mentionne à propos des révolutions : « La vie suit son cours et les révolutions échouent. Les peuples passent, comme la houle du vent dans le riz en herbe46». Le présent de l’indicatif ici illustre le constat post-révolutionnaire : les révolutions se soldent toujours par des échecs, et le roman de Deville en propose un exemple parfait à partir de la révolution des Khmers rouges, dont le procès s’interprète comme la fin d’un cycle : « Le procès des Khmers rouges est l’aboutissement d’une histoire vieille d’un siècle et demi 47». Vers la fin du roman, on constate que d’autres révolutions sont en gestation et annoncent peut-être d’autres espérances, dans d’autres espaces géographiques. Les nouvelles de ces révolutions lui parviennent par des correspondants :
Les envoyés spéciaux ont quitté le Cambodge pendant ces temps d’accalmie entre deux procès. Certains m’adressent leurs papiers depuis des hôtels en Tunisie, Égypte, au Yémen, en Lybie. Dans ces pays où les révolutions de ce début 2011 bousculent les vieux sphinx. Hosni Moubarak au pouvoir au Caire depuis 81. Ben Ali à Tunis depuis 8748.
Au regard de l’actualité récente, les lendemains de ces révolutions ne sont pas forcément à la hauteur des espérances. Quelques années plus tard, Enzo Traverso semble répondre à Deville, en proposant une hypothèse quant à l’échec des révolutions. Pour lui, elles sont le fruit de l’incapacité des populations à trouver la personne idéale pouvant être capable de traduire les aspirations : « En 2011, une nouvelle vague révolutionnaire a balayé le monde arabe. Cependant, celles et ceux qui ont affronté et déposé les dictatures de Ben Ali et de Moubarak ne savaient pas très bien comment ni par quoi les remplacer […] Les soulèvements du printemps 2011 n’avaient ni modèle ni horizon ; ils ne pouvaient ni s’inspirer du passé ni imaginer le futur pour lequel ils luttaient49».
Conclusion
Pour finir, nous dirons que Le météorologue et Kampuchéa mettent en scène le temps qui apparaît par moment sur une ligne droite avec une série de dates précises avec un début et une fin. Nous y avons vu par ailleurs une perception du temps cyclique avec l’idée d’un éternel retour des choses. Nous avons pensé qu’il y avait des visions occidentales et non-occidentales sur la façon de représenter le temps. Les romans de Patrick Deville et d’Olivier Rolin actent en quelque sorte la fin d’une certaine forme de modernité, en crise permanente parce qu’elle serait de moins en moins créative, comme l’avait identifié le philosophe italien Gianni Vattimo, qui, en 1987, nous parlait de « l’époque du dépassement, de la nouveauté qui vieillit et se voit immédiatement remplacée par une nouveauté encore plus nouvelle, dans un inépuisable mouvement qui décourage toute créativité ».
Notes
1 ROLIN (O.), Le Météorologue, Paris, Seuil/Paulsen, 2014.
2 DEVILLE (P.), Kampuchéa, Paris, Seuil, 2011.
3 CARRARD (P.), Poétique de la Nouvelle Histoire. Le discours historique en France de Braudel à Chartier, Paris, Payot, 1998, p. 13.
4 BRAUDEL (F.), « Histoire et Sciences sociales : La longue durée » In Annales : Economies, sociétés, civilisations, 13e année. 4, 1998, p. 725-253, p. 726-727.
5 RANCIERE (J.), Les mots de l’histoire. Essai de poétique de savoir, Paris, Seuil, 1992, p.20.
6 RICOEUR (P.), Temps et récit. Tome 1. L’intrigue et le récit historique, Paris, Seuil, 1983, p.26.
7 GENETTE (G.), Figures III, Paris, Seuil, 1972, p. 234.
8 NOIRIEL (G.), « Comment on récrit l’histoire. Les usages du temps dans les Écrits sur l’histoire de Fernand Braudel », Revue d’histoire du XIXe siècle [En ligne], 25 | 2002, mis en ligne le 07 mars 2008, Consulté le 01 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/rh19/419 ; DOI : 10.4000/rh19.419.
9 Ibid.
10 ROLIN (O.), Le Météorologue, op.cit., p. 168.
11 Ibid., p. 171.
12 Ibid., p. 172.
13 HARTOG (F.), Régimes d’historicité. Présentisme et expérience du temps, Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », 2003, p.155.
14 Ibid., p. 147.
15 HARTOG (F.), « Ce que la littérature fait de l’histoire et à l’histoire », Fabula/Les colloques, Littérature et histoire en débats, URL : http://www.fabula.org/colloques/document2088.php, page consultée le 19 novembre 2016.
16 ROLIN (O.), La langue; suivi de Mal placé, déplacé, Lagrasse, Verdier, 2000, p. 77.
17 Ibid., p. 23.
18 Ibid., p. 136.
19 Ibid., p. 30-31.
20 GOODY (J.), Le vol de l’histoire. Comment l’Europe a imposé le récit de son passé au reste du monde, Trad. par Fabienne Durand-Bogaert, Paris, Gallimard, coll. « folio histoire », 2009, p.198-199.
21 NIETZSCHE (F.), Ainsi parlait Zarathoustra. Un livre qui est pour tous et qui n’est pour personne, Trad. de Gandillac, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1997, p.197.
22 DEVILLE (P.), Sic transit. Romans : Pura Vida, Équatoria, Kampuchéa, Paris, Seuil, coll. « Fiction & Cie », 2014.
23 MEYER (M.), Qu’est-ce que l’Histoire ? Progrès ou déclin ?, Paris, PUF, Coll. « L’interrogation philosophique », 2013, p.9.
24 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 12.
25 La synecdoque est une figure de style qui consiste à prendre le tout pour la partie ; et la partie pour le tout. La synecdoque généralisante consiste, à partir d’un cas particulier, à faire de la généralisation. Elle confère ainsi au discours une allure abstraite. Cf CHARAUDEAU (P.), MAINGUENEAU (D.), Dictionnaire d’analyse du discours, op.cit., p.564-565.
26 Ibid., p. 34.
27 Ibid., p. 33.
28 Nous pouvons admettre l’idée qu’il y a un paradoxe dans l’attitude des Khmers rouges : on peut voir une sorte de modernité dans leur attitude, entendue comme « ce qui rompt avec la tradition. » Cf COMPAGNON (A.), Les cinq paradoxes de la modernité, Paris, Seuil,1990, p.7. Ils opèrent une rupture certaine avec un ancien mode de gestion du Cambodge.
29 ONFRAY (M.), Cosmos : Une ontologie matérialiste, Paris, Flammarion, 2015, p.120.
30 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 14.
31 Ibid., p. 74.
32 Ibid., p. 239.
33 SCHOENTJES (P.), « Les beaux hasards de Patrick Deville. Kampuchéa et la terreur », p.31-57, p.52, in Deville & Cie. Rencontres de Chaminadour, Paris, Seuil, 2016.
34 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 32.
35 Ibid., p. 47.
36 Pour Barbara Cassin, l’exil ne peut se penser sans l’intégration de la question de la nostalgie : celui qui s’exile est nécessairement nostalgique de la terre natale. Cf La nostalgie. Quand donc est-on chez soi ? Ulysse, Enée, Arendt, Paris, Fayard, coll. « Pluriel », 2015, p.63.
37 VALERY (P.), « La crise de l’esprit », pp. 13-51, in Variété I, Paris, Gallimard, Coll. « folio essais », 1924, pp.13-14.
38 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 60.
39 Ibid., p. 57.
40 Ibid., p. 79.
41 HUNTINGTON (S.P.), Le Choc des civilisations, Trad. de l’anglais par Jean-Luc Fidel et al., Paris, Odile Jacob, Coll. « Poches », 2005, p.17.
42 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 71.
43 GOODY (J.), Le vol de l’histoire, op.cit., p. 20-21.
44 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 60.
45 Jack Goody dessine cet affrontement entre une Chine en croissance et l’Occident en déclin. Il prédit « un effondrement de l’Europe occidentale, contemporain d’une lente mais constante croissance de la Chine » Cf Le vol de l’histoire, op.cit., p.184.
46 DEVILLE (P.), Kampuchéa, op.cit., p. 128.
47 Ibid., p. 129.
48 Ibid., p. 252.
49 TRAVERSO (E.), Mélancolie de gauche. La force d’une tradition cachée, Paris, Éditions La Découverte, 2016, p.13.
Bibliographie
CARRARD (P.), Poétique de la Nouvelle Histoire. Le discours historique en France de Braudel à Chartier, Lausanne, Editions Payot, coll. « Sciences Humaines »,1998.
CASSIN (B.), La nostalgie. Quand donc est-on chez soi ? Ulysse, Enée, Arendt, Paris, Fayard, coll. « Pluriel », 2015.
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COMPAGNON (A.), Les cinq paradoxes de la modernité, Paris, Seuil,1990.
DEVILLE (P.), Kampuchéa, Paris, Seuil, coll. « Points », 2011.
– Sic transit. Romans : Pura Vida, Équatoria, Kampuchéa, Paris, Seuil, coll. « Fiction & Cie », 2014.
GENETTE (G.), Figures III, Paris, Seuil, coll. « Poétique », 1972.
GOODY (J.), Le vol de l’histoire. Comment l’Europe a imposé le récit de son passé au reste du monde, Trad. Fabienne Durand-Bogaert, Paris, Gallimard, coll. « folio histoire », 2010.
HARTOG (F.), Régimes d’historicité. Présentisme et expérience du temps, Paris, Seuil, 2003, rééd., coll. « Points Histoire », 2012.
HUNTINGTON (S.P.), Le Choc des civilisations, Trad. de l’anglais par Jean-Luc Fidel et al., Paris, Odile Jacob, coll. « Poches », 2005.
MEYER (M.), Qu’est-ce que l’Histoire ? Progrès ou déclin ?, Paris, PUF, Coll. « L’interrogation philosophique », 2013.
NIETZSCHE (F.), Ainsi parlait Zarathoustra. Un livre qui est pour tous et qui n’est pour personne, Trad. de Gandillac, Paris, Gallimard, Coll. « Folio », 1997.
ONFRAY (M.), Cosmos : Une ontologie matérialiste, Paris, Flammarion, 2015.
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– Le Météorologue, Paris, Seuil/Paulsen, 2014.
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VALERY (P.), Variété I, Paris, Gallimard, coll. « folio essais », 1924.
VATTIMO (G.), La Fin de la modernité. Nihilisme et herméneutique dans la culture post-moderne, Trad. de l’italien par Charles Alunni, Paris, Seuil, Coll. « L’ordre philosophique »,1987.
Articles
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HARTOG (F.), « Ce que la littérature fait de l’histoire et à l’histoire », Fabula/Les colloques, Littérature et histoire en débats, URL : http//www.fabula.org/colloques/document2088.php, page consultée le 19 novembre 2016.
NOIREL (G.), « Comment on récrit l’histoire. Les usages du temps dans les Écrits sur l’histoire de Fernand Braudel, Revue d’histoire du XIXe siècle [En ligne], 25 | 2002, mis en ligne le 07 mars 2008, Consulté le 01 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/rh19/419 ; DOI : 10.4000/rh19.419.
SCHOENTJES (P.) ,« Les beaux hasards de Patrick Deville. Kampuchéa et la terreur », p.31-57, p.52, in Deville & Cie. Rencontres de Chaminadour, Paris, Seuil, 2016.
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