1-11 Sémiotique des interactions langagières en EPS : l’adresse et la réception des savoirs en actes

Nathalie Wallian, professeure, ELLIADD-DIDactiques (EA 4661), ESPE, Université de Franche Comté, France

 

Dans le système enseignement-apprentissage, la complexité des faits éducatifs (Ovens, Hopper & Butler, 2012) suppose une approche croisée des points de vue qui s’intéresse tant à « l’adresse » du dispositif didactique qu’à sa « réception » transformative pertinente pour l’élève. Récursivement, l’activité de l’élève s’adresse à l’enseignant qui l’interprète pour intervenir : de la co-élaboration du projet d’influence va dépendre la satisfaction de l’échange. S’il ne suffit pas d’enseigner pour que l’élève apprenne, l’approche sémiotique des interactions langagières vient questionner la manière dont la dialogique se co-construit aux fins de négocier un horizon d’attentes partagées qui 1) génère une entente mutuelle au sein d’un « rapport au pouvoir », 2) gère un conflit de fondations propice au remaniement des « rapports de place » et 3) autorise l’appropriation de savoirs d’expérience par la transformation du « rapport au savoir ». Le courant de l’interactionnisme socio-discursif (Bronckart, 1996), en droite lignée avec les travaux de Vygotsky et de Rastier, vise à mettre en tension le point de vue extrinsèque (le décours des actes de langage des acteurs impliqués dans la co-construction) et le point de vue intrinsèque de l’élève en activité. Dans les dispositifs didactiques proposés, les décalages/correspondances entre intentions affichées et effets produits représentent le nœud de l’analyse sémiotique. La nature plurimodale des interactions en éducation physique et sportive autorise une analyse fine des degrés de partage des horizons d’attente selon les rapports de place, de pouvoir et de savoir. Il s’agit par une étude de cas de tenter une modélisation des régularités d’ajustement tout en s’interrogeant sur les cas de non satisfaction de l’échange. Les données d’observation (N = 3 leçons extraites de 10h de pratique effective) et d’entretien (ante/post cycle ; 3 enseignants expérimentés) tendent à montrer que la co-construction des interactions suppose un ajustement dynamique préalable des rapports de place. Les rapports de pouvoir enseignant/élève et entre pairs déterminent l’entrée dans les transformations et leur pérennité. Enfin, le rapport au savoir d’expérience est constamment re-questionné à l’aulne des effets attendus/transformatifs, amenant un ajustement constant du système interactif via les productions discursives adressées et (més)interprétées.

 

Références bibliographiques

  • Bronckart, J-P. (1996). Activité langagière, textes et discours. Genève: Delachaux & Niestlé.
  • Ovens, A., Hopper, T. & Butler, J. (eds.) (2013). Complexity thinking in physical education: Reframing curriculum, pedagogy and research. Melbourne: Oxford University Press.
  • Wallian, N., Poggi, M-P., & Chauvin-Vileno, A. (2013). Action, interaction, intervention: à la croisée du langage, de la pratique et des savoirs. Bern: Peter Lang (Collection Transversales).