Fouilles extensives – Secteur La Glère – Estive d’Anéou (vallée d’Ossau – 64)

Aneou (Commune de Laruns, syndicat pastoral du Bas-Ossau) – E32. C. Calastrenc, Ch Rendu avec la collaboration de D. Cabrol et V. Lemaitre

Les fouilles extensives réalisées en 2009 et 2010 sur ce site ont confirmé le caractère anthropique des différentes composantes de l’E32. Les identifications fonctionnelles faites durant la phase de prospection (en 2004) se sont révélées exactes. Cette Entité est cependant beaucoup plus hétérogène et complexe que ce que laissaient entrevoir l’analyse de surface et les sondages effectués en 2006 avec une occupation discontinue de l’âge du Fer au Bas Moyen-Âge.

Infographie : C. Calastrenc

Infographie : C. Calastrenc

La première occupation, datée du IIème âge du Fer (entre 204 et 91 av. J.-C.), est très discrète car visible que un niveau d’occupation des enclos nord (str. 490) et est (St. 78). Ces enclos apparaissent comme seuls et isolés car aucun site d’habitat, ni aucun niveau archéologique ne peut être relié à cette occupation, à moins que les occupations postérieures de l’’E32 n’aient totalement perturbée et détruit les indicateurs de l’occupation de l’âge du Fer. Avec l’Entité 31 (str. 62), située à environ 100 m à l’ouest, les enclos 78 et 490 de l’E32 sont les seuls sites connus et datés de cette période sur toute l’estive d’Anéou.

 

La seconde occupation de l’Entité 32 se centre autour des IIIème – VIème siècles de notre ère et se traduit par la mise en place d’un grand bâtiment (str. 85) dans le talus oblong qui structure le secteur de La Glère. Il s’agit d’un grand bâtiment de 7 m de long sur 3 m de large (mesures intérieures) ceinturé par des murs ayant une épaisseur maximal de 1,40 m. Aucun enclos lié à cet habitat imposant n’a été identifié. Après les sondages de 2006 réalisé sur les structures 85 et 67, on voyait l’E32 comme l’un des deux pôles centripète de l’activité pastorale sur l’estive d’Anéou à l’Antiquité tardive (avec le site E149 du secteur de Tourmount). Au regard des fouilles extensives réalisées entre 2009 et 2010, ce caractère s’il n’est pas à remettre en cause, est semble t’il a à nuancer. Un autre fait étonnant est la non identification d’enclos associé à cette occupation de l’Antiquité tardive. Que ce soit dans les Alpes ou dans les Pyrénées-Atlantiques, on ne connait aucun enclos en pierres sèches associé aux habitats datés de l’Antiquité tardive[1]. Il faut donc se poser la question, pour cette période et ces espaces, de l’emploi de système de parcage en matériaux périssables, comme des claies ou à l’aide de filets.

 

La période médiévale a grandement marqué l’Entité 32. L’occupation y a été importante et semble t’il plus ou moins continue du VIIIème au XVème siècle. Les observations réalisées durant les fouilles (2009-2010), que ce soit dans le secteur 1 (qui comprend les structure 86 et 87 fouillées par Christine Rendu en 2009) ou sur le secteur 2 (qui comprend les structures 85 et 82 fouillées en 2009 et 2010 par C. Calastrenc), permettent de voir des reprises et des réaménagements de l’espace. La mise en place de la deuxième occupation du bâtiment 85 de l’E32 de l’estive d’Anéou s’est faite par réhabilitation des ruines de l’occupation antérieure (celle de l’Antiquité tardive). Certains murs ont été reconstruit en totalité (US 302) ou partiellement (MR 209 et MR 215). Cette seconde occupation a laissé une empreinte spatiale très marquée, et s’est développée entre la fin du VIIIème siècle et le début du XIème siècle après J-C[2]. D’un point de vu fonctionnel dans le secteur 2 la présence de deux foyers ainsi que la découverte de nombreux artefacts (vaisselle, fragments de faune dont certains éléments présentent des traces de découpe, instrument à vent, outil en os, fragments de verre et de scories de fer) permettent de qualifier la structure 85 est un habitat. L’espace intérieur était structuré par un mur de refend (MR 232) d’axe nord-sud et centré autour d’un foyer (FY 274) situé dans l’angle sud-est. Ce qui intrigue n’est pas la réutilisation d’un espace déjà anthropisé, mais la non présence de mobilier céramique lié à cette seconde occupation, si longue et si prégnante d’un point de vue architectural. Car aucun des 51 tessons mis au jour durant ces fouilles dans le bâtiment 85 n’a été rattaché à l’occupation médiévale du site. Par voix de conséquence, cela interroge sur le possible emploi et usage d’objet en matériaux périssables comme des outils en bois. Il faut cependant prendre en compte la méconnaissance des faciès céramique du Haut Moyen- Âge dans cette région[3].Aux alentours de XIème siècle l’Entité 32[4] est restructurée : on bâtit contre son flanc ouest une structure quadrangulaire, le bâtiment 82. Aucun foyer, ni élément de mobilier n’ait été découvert à l’intérieur de la structure 82. Cela tend à faire voir ce bâtiment comme une annexe à la grande cabane 85, comme un bâtiment plus destiné au gardiennage d’une partie du bétail ou au stockage d’objets et/ou de matériaux. Au Bas Moyen-Âge le centre de gravité de l’E32 a été déplacé vers l’est avec la construction de la structure 86. Les bâtiments 82 et 85 sont abandonnés et c’est ses matériaux de construction sont utilisé pour édifier la structure 86. Peu après une courte période d’occupation inférieure à 50 ans, lui succède la construction 87 (qui a été en partie construite sur ses ruines). Ces différentes reprises ne sont pas datables individuellement. Elles permettent cependant d’envisager une continuité de l’occupation et de possibles évolutions fonctionnelles des bâtiments 86 et 87. La présence d’une banquette (US 122) et de deux foyers successifs (FY 128 et FY 136), laisserait entendre une vocation domestique et/ou d’activité spécialisée. La quasi-absence de matériel archéologique contraste avec le bâtiment 85 du secteur 2, mais rappelle la construction 82 de ce même secteur (même composition, couleur et texture du niveau d’occupation, même absence de mobilier archéologique). La présence d’un placard situé dans l’angle nord-ouest renvoie aux structures observées en prospection n° 347 dans le secteur de Tourmount et n° 349 dans le secteur de Hount de Mahourat. Dans ces deux cas, il s’agit de structures modernes. Cette construction montre donc, dès le Bas Moyen-Âge la mise en place d’infrastructures à l’intérieur de bâtiment ; beaucoup plus précocement que ce que laissait envisager les données issues des prospections de surface et des premiers sondages.

Les différences d’emprise, de polarisation et de structuration de l’espace au cours des 10 siècles d’occupation sont des réponses à des modifications des besoins techniques et sociaux et pratiques pastorales.

 

Avant la fouille, le site de Tourmount avait été rapproché de l’E32 en raison de leurs dates similaires (IIIème – Vème siècle de notre ère), de leur structuration (plusieurs vastes enclos accolés, habitat complexe) et de leur étendue. Au regard de l’ensemble des structures inventoriées sur l’estive d’Anéou, ces deux ensembles (E32 et E149) constitueraient deux pivots qui polariseraient la gestion de l’estive durant l’antiquité tardive. Or, les fouilles et les sondages faits sur l’E32, même si elles confirment l’occupation de l’Antiquité tardive, montre, pour cette période, un ensemble pastoral plus simple (un habitat sans enclos fait en dalles de calcaire non liées au mortier) beaucoup plus réduit spatialement que ce qui était envisagé au départ. Cela ne remet pas en question le caractère centripète de ces deux Entités à l’Antiquité tardive, mais demande de le nuancer. L’E32 est également exceptionnelle par la qualité du matériel mis au jour (par rapport aux structures pastorales de haute montagne en général). La monnaie, la perle, la céramique relativement abondante pour un site d’altitude, l’instrument à vent en os, l’outil en os, les scories de fer contrastent fortement avec l’absence de mobilier des structures qui lui ont été annexées (str. 82) et des constructions du Bas Moyen-Âge (str. 86 et 87). Reste un élément dommageable, qui est la non possibilité que nous avons eu de différencier les niveaux de sol de l’Antiquité tardive et du Haut Moyen-Âge de la structure 85. En effet, un seul niveau de circulation a pu être déterminé dans le bâtiment 85 : l’US 212. Il est très perturbé pas des phénomènes de solifluxion, par les écoulements d’eaux qui l’on rendu palimpseste. Tous les artefacts archéologiques ont été remaniés et dont le positionnement n’est plus que rarement originel. La non possibilité de rattacher ce matériel à l’occupation de l’Antiquité tardive et/ou à celle du Haut Moyen-Âge limite toute analyse sur les pratiques et les gestes.

L’ensemble de ces caractères, taille des bâtiments, nombre et superficie des enclos, complexité du site, spatialité différentes en fonction des périodes d’occupation, empilement chronologique, qualité du mobilier, évoquent des économies pastorales fortement structurées et répondant chacune à des besoins et des spécificités propres.

 

 "Phasage chronologique" - Fouilles extensives - Secteur La Glère - Estive d'Anéou (Vallée d'ossau - 64)

Phasage chronologique de l’E 32 (C. Calastrenc)

 

 

 

 


[1] Maxence Segard, Le pastoralisme dans les Alpes occidentales à l’époque romaine, in : Premiers bergers des Alpes – de la Préhistoire à l’Antiquité, Musée dauphinois, 2008, p. 123

[2] D’après le croisement des résultats des analyses 14C par AMS.

[3] Informations Anne Berdoy

[4] D’après les résultats des analyses 14C par AMS

Analyse spatiale, DGPS, Fouille archéologique, Géophysique, Multi-méthode, Photographie aérienne, SIG , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

Fouilles extensives – Structures pasotrales – Secteur La Glère – Estive d’Anéou (vallée d’Ossau – 64)

Entre 1998 et 2002, le Parc National des Pyrénées, en collaboration avec les Services Régionaux de l’Archéologie d’Aquitaine et de Midi-Pyrénées, s’était engagé dans la réalisation d’un inventaire du patrimoine pastoral archéologique de son territoire dans une perspective de connaissance, de protection et de valorisation (San Juan-Fouché 2001). Après une première phase d’étude documentaire et de prospections sur une zone test, le Val d’Azun (Guédon, 2003), l’année  2004 a permis d’initier un programme plus large, intégrant archéologie pastorale, archéologie minière et études paléoenvironnementales sur différentes zones-ateliers (Ossau, Aspe, Azun). Deux campagnes préliminaires, en 2004 et 2005, ont abouti en 2006 à la mise en place d’un Projet Collectif de Recherche : Le PCR Dynamiques sociales, spatiales et environnementales dans les Pyrénées centrales (SRA Aquitaine) est dirigé par C. Rendu et D. Galop. En juillet 2007 a été achèvée la phase de diagnostic et c’est en 2009 qu’on été commencées les premières fouilles extensives dont les résultats seront exposés ici.

Le choix a été fait de s’axer sur l’Entité 23 déjà approché par un sondage à visée chrono-typologique en 2006.

 

A l’échelle du site :

La vision de surface de la zone fouillée donnait à voir une polarisation de l’espace entre deux secteurs, l’un à enclos (à l’ouest) et un groupe de cabanes/bâtiments (à l’est). Cette zone d’habitat étant elle-même divisée en deux sous-ensembles : un composé de trois bâtiments accolés les uns aux autres (secteur 2) et un structuré autour de deux constructions (secteur 1). Après la fouille, la perception en est bien différente. Les 3 bâtiments accolés sont en fait un grand bâtiment d’environ 70 m² (secteur 2), voisinant à 5 m à l’est avec une construction quadrangulaire (str. 86) à laquelle vient se superposer ultérieurement un nouveau bâtiment (str. 87 – secteur 1).

Infographie : C. Calastrenc

Infographie : C. Calastrenc

Ces fouilles extensives ont confirmé le caractère anthropique des composantes de l’E 32. Cette Entité est cependant, d’un point de vue chronologique, plus hétérogène que ce que laissaient entrevoir les sondages effectués en 2006. Néanmoins, l’essentiel de l’occupation se concentre entre l’Antiquité tardive et le Haut Moyen Âge.

Les observations faites durant la fouille, que ce soit dans le secteur 1 ou le secteur 2, permettent de voir des reprises et des réaménagements durant la phase d’occupation : différences de niveaux de la base du mur ouest (MR 232) et construction postérieure d’un mur de refend (MR 205) dans le secteur 2 ; possibles reprises des murs, présence de deux foyers successifs (FY 128 et US 134, FY 136), peut être recharge en galet d’un sol (US 125) et installation d’une banquette (US 122) dans le secteur 1. Ces différentes reprises ne sont pas datables individuellement. Elles permettent cependant d’envisager une continuité de l’occupation et de possibles évolutions fonctionnelles de ces bâtiments.

D’un point de vu fonctionnel, dans le secteur 2 la présence d’élément de vaisselle, de faune, d’une monnaie et d’un instrument de à vent en os  oriente l’interprétation vers une occupation domestique malgré l’absence de foyer avéré pour l’instant.

Pour le secteur 1, la présence d’une banquette (US 122) et de deux foyers successifs (FY 128 et FY 136), laisserait entendre une vocation domestique et/ou d’activité spécialisée. La quasi absence de matériel archéologique contraste avec le secteur 2. Si les dates à venir confirment la contemporanéité de ces deux secteurs, cette différence pourrait orienter vers une complémentarité des deux ensembles.

D’un point de vue architectural, les deux secteurs présentent des parallèles.

Les constructions fouillées ont été installées sur une légère butte d’axe ouest-est. Elles sont parallèles et ont été bâties perpendiculairement à la pente. Le décaissement amont est plus important dans le secteur 2 où il a permis une meilleure conservation du mur ouest (MR 232). Pour le secteur 1, ce décaissement est très faible en raison d’un adoucissement de la pente à son emplacement.

Dans les deux cas, les murs sont hétérogènes et ce caractère n’est vraisemblablement pas lié à des différences de chronologies, mais plutôt à des différences structurelles. Si les murs amonts (ouest) sont dans les deux cas constitués de dalles de calcaire superposées (MR 123 du secteur 1 et le MR 232 pour le secteur 2), les autres murs sont, pour les mieux conservés, à double parement de gros blocs avec un emploi majoritaire de grès (MR 121 et US 145 pour le secteur 1 ; MR 209 pour le secteur 2).

Alors que le secteur 2 ne présente aucun indice de réoccupation tardive, la structure 86 du secteur 1 a probablement été en grande partie épierrée pour la construction d’une cabane sans doute bien postérieure. Cet épierrement a probablement également touché les vestiges du secteur 2. Cette structure relativement récente (str. 87) se distingue de l’occupation de la structure 86 par le caractère beaucoup plus fruste de la construction (pas de blocage interne à l’appareil des murs, pierres empilées, boutisses très rares et effondrement des murs sur eux-mêmes) et une anthropisation moindre du sol d’occupation. Il y a en outre une absence totale de mobilier. La présence d’un placard situé dans l’angle nord-ouest renvoie aux structures observées en prospection n° 347 dans le secteur de Tourmount et n° 349 dans le secteur de Hount de Mahourat. Dans ces deux cas, il s’agit de structure moderne. Le fer à cheval retrouvé sous la base de l’un mur (MR 110) pourrait, en première approche, dater du XIIIème siècle. On ne peut donc inscrire pour l’instant cette occupation que dans une fourchette large : fin du Moyen Âge – Epoque Moderne.

Fouille extensive - Programme Ossau (Laboratoire FRAMESPA - UMR 5136) Crédit photo : Carine Calastrenc

Fouille extensive – Programme Ossau
(Laboratoire FRAMESPA – UMR 5136)
Crédit photo : Carine Calastrenc

 

 

A l’échelle de l’estive et plus largement :

On avait, avant la fouille rapproché ce site de celui de Tourmount en raison de leurs datations similaires (faite d’après sondage), de leur structuration (plusieurs vastes enclos accolés, habitat complexe) et de leur étendue. D’après les données de surface, néanmoins, l’E32 pouvait correspondre à une série de petits habitats groupés ce qui la distinguait de l’E 149 de Tourmount.

La fouille en ayant révélée à la place des structures 83, 84 et 85, un seul grand bâtiment de 70 m² marqué par des murs de refend internes rapproche beaucoup plus nettement les deux sites.

L’E32 et l’E149 apparaissent donc comme deux centres à priori contemporains. Au regard de l’ensemble des structures inventoriées sur l’estive d’Anéou, ces deux ensembles constituent les plus grands centres toutes périodes confondues. Ils paraissent comme deux pivots polarisant la gestion de l’estive.

L’E32 est exceptionnelle par la qualité du matériel mis au jour (par rapport aux structures pastorales de haute montagne en général). La monnaie, la perle, la céramique relativement abondante pour un site d’altitude, l’instrument à vent en os contrastent fortement avec l’absence de mobilier des structures modernes (str. 87 et plus largement l’ensemble des structures sondées comme la structure 101).

L’ensemble de ces caractères, taille des bâtiments, nombre et superficie des enclos, complexité du site, qualité du mobilier, évoquent une économie pastorale fortement structurée. Il est pour l’instant impossible de se prononcer sur le cadre de cette exploitation qui peut ressortir soit à des pratiques collectives dans le cadre de communautés rurales fortes et organisées, soit à des infrastructures de type « grand domaine ». Plus largement, cela pose la question des liens entre ces sites d’altitude, les espaces intermédiaires de la vallée d’Ossau et les aires du piémont aux environs de Pau.

La fouille du secteur 2 n’ayant pu être menée jusqu’à son terme, devrait être poursuivie en 2010. La prochaine campagne devrait également permettre la fouille de la structure 82 directement attenante au secteur 2 et à la réalisation de sondage à visés chronologique dans les enclos de l’Entité 32.

 

Auteur : C. Calastrenc, Ch. Rendu

Analyse spatiale, DGPS, Fouille archéologique, Géophysique, Multi-méthode, Photographie aérienne, SIG , , , , , , , , , , , , , , , , ,

Chantier Histoire

Cette année, le chantier d’histoire a rassemblé étudiants et chercheurs de Terrae autour des « Compoix et terriers d’Odars ». Les travaux se sont axé sur l’enregistrement, le traitement, l’analyse et l’exportation sous SIG des données.

Chantier Histoire 2010

Organisateur : Marc Conesa, Jean-Loup Abbé, Florent Hautefeuille

Etude documentaire, SIG , , , , ,

Themis (Targassonne – 66)

juin 2009 :

Opération d’archéologie préventive

Méthodes : DGPS, Prospection géophysique électrique, Prospection géophysique magnétique, photographie aérienne au cerf-volant, Tranchées mécaniques
Direction : Olivier Passarrius (Pôle Archéologique – Conseil Général des Pyrénées-Orientales) et Pauline Ilhes
Collaborations :
* Archéologie – CNRS – Laboratoire FRAMESPA (UMR 5136) : Christine Rendu, Carine Calastrenc
* Géophysique – Observatoire Midi-Pyrénées – Laboratoire GET (UMR 5563) : Muriel Llubes, Clara Jodry, Pauline Bréard
* Géomorphologie – CSIC – Instituto de Ciencias de la Tierra Jaume Almera : Ramon Julia

 

Depuis plus de deux décennies, la Cerdagne française (Fig 1) constitue un terrain de recherche expérimental sur la structuration des terroirs agro-pastoraux de montagne du Néolithique à nos jours.

(Fig.1 – Localisation Cerdagne française)

Ces recherches s’articulent autour des questions de l’établissement des grandes séquences d’anthropisation, de leurs chronologies, sur l’étude des formes et des fluctuations des parcellaires et des relations entre les terroirs et les habitats proches (Bal et al., 2011 ; Conesa, 2012 ; Galop, 1998 ; Mazier et al, 2009 ; Rendu 2003 ; Rendu 2009). En 2009, un projet d’extension de la centrale solaire de Targasonne (Pyrénées-Orientales, France) a été lancé et a impliqué une opération de diagnostic archéologique. Comme le montre la Figure 2, le secteur étudié est une vaste zone herbeuse de 10 hectares, située entre 1650 et 1700 mètres d’altitude, sur les pentes du pic dels Moros. Elle est divisée en deux ensembles : une partie relativement plane au sud et une zone terrassée au nord. Quatre devèses (espace de pâtures, mis en défend, utilisés en automne et au printemps, voir Conesa, 2010) la structurent : les devèses sud (2 hectares) et centrale (3 hectares) au sud ; la devèse nord, qui a la particularité de paraître actuellement ouverte à l’ouest (5,7 hectares) et est (0,3 hectare) centrées sur les terrasses.

Fig2_TIFF

(Fig. 2 – Site étudié)

Dans la partie sud se trouvent les vestiges d’un village médiéval connu dans la documentation historique sous le nom de Vilalta, dont les ruines et une partie du finage ont été réaménagées en zone agro-pastorale après son abandon. Ce site a été inventorié et étudié en 1979 par Pierre Campmajo et l’équipe du GRAHC lors du projet de création de la centrale solaire de Targasonne (Campmajo, 1979).

Alors que le finage du village a été approché suivant une méthode un peu plus classique pour ce genre d’opération archéologique (prospection de surface au DGPS -Differential Global Position System- suivie d’un sondage mécanique systématique), le Service Régional d’Archéologie Languedoc-Roussillon a prescrit d’avoir un impact le moins invasif possible sur la zone du village. Cette obligation a imposé la mise en place d’une planification du travail en deux grandes phases : prospection et ouverture de tranchées mécaniques.

La prospection a opéré par une combinaison d’approches spécifiques : un relevé systématique des indices de structures anthropiques visibles en surface à l’aide d’un DGPS, une cartographie électrique permettant le repérage des structures enfouies, et enfin l’étude d’une photographie aérienne de 1977 qui laissait voir des substructures.

En croisant les interprétations, et en confrontant les indices archéologiques, on bénéficie d’un effet de synergie méthodologique qui permet d’affiner le diagnostic de la zone étudiée, par rapport à l’utilisation d’une seule technique. Les informations utilisées sont donc issues de sources très diversifiées, ayant chacune ses propres spécificités.

A la fin de l’étude, ce qui est obtenu est une carte qui permette de visualiser la qualité de l’information et de s’interroger sur la qualification des structures aperçues au moyen des différentes méthodes mises en pratique. Le résultat donne aussi une estimation de la fiabilité avec laquelle une structure a été détectée.

Themis - sondage mécanique - crédits photo : O. passarrius (Pôle archéologique - CG66) Thémis - sondages mécanique - - crédits photo : O. passarrius (Pôle archéologique - CG66) Thémis - prise de vue aérienne au cerf-volant - crédits photo : O. passarrius (Pôle archéologique - CG66)

Analyse spatiale, DGPS, Etude documentaire, Fouille archéologique, Géophysique, Multi-méthode, Photographie aérienne, SIG , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

Themis (Targasonne – 66)

juin 2009 :

Opération d’archéologie préventive

Méthodes : DGPS, Prospection géophysique électrique, Prospection géophysique magnétique, photographie aérienne au cerf-volant, Tranchées mécaniques
Direction : Olivier Passarrius (Pôle Archéologique – Conseil Général des Pyrénées-Orientales) et Pauline Ilhes
Collaborations :
* Archéologie – CNRS – Laboratoire FRAMESPA (UMR 5136) : Christine Rendu, Carine Calastrenc 

Une campagne de prospection pédestre au DGPS a été ralisé sur le site du village médiéval de Vilata (Targasonne – Pyrénées-Orientales – 66)

Prospections terrasses Vilalta

 

Analyse spatiale, DGPS, prospection, SIG , , , , , , , , , , , , , , ,

Chantier Histoire

Cette année, le chantier d’histoire a rassemblé étudiants et chercheurs de Terrae autour des « Compoix et terriers d’Odars ». Les travaux se sont axé sur l’enregistrement, le traitement, l’analyse et l’exportation sous SIG des données.

Chantier Histoire 2009

Organisateur : Marc Conesa, Florent Hautefeuille, Jean-Loup Abbé

Etude documentaire, SIG , , , , ,

Cortal de Llo

Une campagne de prospection pédestre au DGPS a été réalisé sur la zone située entre village et estive (zone des cortals) de la commune de Llo (66 – Pyrénées-Orientales). L’objectif a été de relever tous les indicateurs d’anthropisation visibles ne surface quelque soient leur état de conservation.  Ces relevés ont été réalisé au DGPS.

(C. Rendu – C. Calastrenc)

Prospection pédestre au DGPS

Prospection pédestre au DGPS

 

oscillation_temporelle [Converti] oscillation_spatiale [Converti] HabitatCortal des Pou (LLo - 66)

Analyse spatiale, DGPS, prospection, SIG , , , , , , , , , , , , , ,

Chantier Histoire

Cette année, le Chantier d’Histoire change de thème et s’oriente sur l’études des compoix et terriers de la commune d’Odars en Haute-Garonne. Les futurs chantier d’Histoire vont s’orienter autour de l’enregistrement dans une BDD dédiée, le traitement, l’analyse et l’exportation sous SIG des informations contenues dans ces documents.

Chantier Histoire 2008

Organisateur : Mac Conesa, Florent Hautefeuille, Jean-Loup Abbé

 

Etude documentaire, SIG , , , , ,

Prospection pédestre et sondages – estive d’Anéou (vallée d’Ossau – 64)

* Aneou (Commune de Laruns, syndicat pastoral du Bas-Ossau). C. Calastrenc et M. Le Couédic (coordination au sein du PCR : C. Rendu)

Les travaux d’archéologie pastorale entrepris à Anéou depuis 2004 sont inclus dans le PCR « Dynamiques sociales, spatiales et environnementales dans les Pyrénées centrales » co-dirigé par Ch. Rendu et D. Galop (CR au CNRS). Ils visent à saisir, à partir d’une zone atelier restreinte (l’estive d’Anéou), l’histoire et les transformations des systèmes d’estivage de la haute vallée d’Ossau dans la longue durée. La première étape de cette recherche comprend la prospection exhaustive des 1256 ha de ce quartier de pâturage (débutée en 2004) et la datation, par sondage, des principaux types de sites observés à partir des relevés de surface (entrepris depuis 2005).

Fin 2006, 11 sondages avaient été réalisés qui documentaient principalement, l’âge du Bronze, la transition Antiquité/Haut Moyen âge  et l’époque moderne. Les travaux 2007 se sont structurés sur les bases des deux campagnes précédentes (2005 et 2006). 18 sondages archéologiques ont été réalisés en première partie de campagne ; la deuxième partie a permis l’achèvement des prospections pédestres systématiques de l’estive avec GPS différentiel.

 

Principaux résultats des sondages

Les 18 sondages réalisés visaient essentiellement à documenter le hiatus du VIIe au XVIIe siècle de notre ère. La difficulté à repérer, d’après les images de surface des sites, une catégorie d’arasement intermédiaire entre les structures à micro-relief et celles conservées sur plusieurs niveaux d’assises a contraint à choisir les constructions apparaissant comme les plus anciennes des structures en élévation. Ces dernières ont fait l’objet de 10 des 18 sondages réalisés. Les 8 autres sondages ont été consacrés à des structures à l’état de micro-relief et visaient à compléter l’approche diachronique des entités et des secteurs abordés.

 

 Cabane La Glère

L’entité 20, un ensemble pastoral homogène et monophasé, est composée de trois structures : la structure 40 (une cabane), la structure 41 (un enclos), la structure 42 (un couloir de traite). La structure 40 a fait l’objet d’un sondage en 2005. En 2007, un nouveau sondage a été réalisé sur la face sud de la structure 42 (structure très arasée, visible par un micro-relief et un alignement de pierre). Tout comme le sondage de 2005, le caractère anthropique de la structure 40 a pu être observé, mais aucun niveau d’occupation n’a été identifié avec certitude.

L’entité 36, hétérogène et polyphasée, comprend 6 structures présentant des états de conservation différents. D’après les observations faites en surface, ces structures pourraient se regrouper en trois ensembles : les structures 101 (une cabane) et 103 (un enclos) ; la structure 102 (un enclos) ; les structures 104, 105 et 106 (sans détermination fonctionnelle sur les seules données de surface). Deux sondages ont été réalisés : un sur la face nord-est de la structure 101 (une structure de 17 m² intérieurs dont les murs à double parement faits par empilement de dalles de calcaire et de pierres boutisses sont conservés sur 6 à 7 niveaux d’assisses) et un sur la face sud de l’enclos 102 (construction de 36 m² intérieurs dont le parement externe est constitué d’une superposition assez frustre de blocs de calcaire ; la face interne étant réalisée avec des dalles posées de chant). Le sondage entrepris dans la structure 101 a permis d’identifier un seul niveau d’occupation (un foyer) sans qui n’ai été possible de percevoir le niveau de circulation associé. Le sondage fait dans la structure 102 a également révélé un seul niveau d’occupation.

L’entité 186, qui se trouve à environ 50 m à l’ouest de l’entité 36, est monophasée. Elle est constituée de la seule structure 487, de 18 m² intérieurs dont les murs sont conservés sur trois niveaux d’assisse et qui a été identifiée en prospection comme un enclos. Un seul niveau d’occupation a été perçu non pas par la présence de mobilier archéologique ou de résidus carbonés, mais par l’étude des relations stratigraphiques.

 

Caillaoulat

L’entité 181 est un ensemble vaste et complexe de 9 structures qui se répartissent sur 1200 m² : un groupe de 3 enclos accolés (str. 442 à 444) ; un deuxième groupe de 3 autres enclos et d’une cabane imbriqués (str. 445 à 448) ; une quebe légèrement excentrée (str. 441). Les limites nord-est et sud de cet ensemble sont formées par des murs effacés (str. 440 et 449). Un sondage a été réalisé à l’intérieur de la structure 446 (une construction de 6 m² dont les murs sont conservés sur 3 à 4 niveaux d’assise). Un niveau d’occupation y a été identifié dans lequel a été mis au jour du mobilier archéologique (fragments de céramique).

L’entité 182 est monophasée. Elle comprend une seule structure (structure 450) visible par un micro-relief et quelques pierres affleurantes qui délimitent un espace intérieur de 7 m². Le sondage effectué sur sa face sud a permis l’identification d’un seul niveau d’occupation.

 

 La Gradillière

L’entité 38 se compose de trois structures accolées dont les états de conservation sont différents : la structure 113 (un enclos long et étroit), 114 (un possible abri ou annexe inclus dans le périmètre intérieur de la structure 113) et 115 (un alignement de pierres qui laisse entendre la présence d’un possible enclos antérieur aux deux précédentes structures). Un sondage a été entrepris sur la face nord de la structure 113 et a révélé deux niveaux d’occupation, reconnus pour le plus récent par l’étude des relations stratigraphiques et pour le plus ancien par la présence de matériel archéologique (fragments de céramique non-tournée, éclats de silex et des résidus carbonés).

L’entité 41, composée de 5 structures, est complexe et hétérogène. Le premier groupe est constitué de deux structures accolées (les str. 120 et 121 : un enclos et son annexe) et le deuxième groupe, situé à 3 m à l’est du premier groupe se compose des 122, 123 et 124 (de possibles enclos accolés, visibles par un micro-relief et des alignements de pierres). Un sondage a été réalisé au niveau du mur mitoyen des structures 120 et 121. Il a montré, pour chacune d’entre elle, un seul niveau d’occupation.

L’entité 171, située sur un léger « monticule », s’organise autour de deux agencements en connexion, visibles par un micro-relief et quelques pierres affleurantes : la structure 403 (un enclos de 98 m²) et la structure 404 (petite construction de 2 m² imbriquée dans la face nord-est de l’enclos 403). Elles ont livré du mobilier archéologique (fragments de céramique non-tournée et éclats de silex), mais les indices sont trop tenus pour affirmer la présence d’un niveau de fonctionnement. Afin de mieux appréhender l’enchaînement stratigraphique observé pendant la fouille, confirmer et/ou infirmer le caractère anthropique des dépôts, un deuxième sondage a été réalisé à 2,50 m au sud-est de ces deux structures : le sondage 489. Il a confirmé la présence d’un épais niveau de colluvions/alluvions, sans doute à l’origine du « monticule » sur lequel sont établi les structures 403 et 404. La répartition du mobilier archéologique confirme le caractère non structuré des dépôts qui pourrait alors provenir du démantèlement, par le cours du ruisseau, d’un ou de plusieurs site(s) proche(s).

L’entité 172 présente une superposition de structure : la 488 (très arasée visible par un micro-relief et une légère dépression centrale) et la structure 405 (une cabane de 12 m² dont les murs sont conservés sur deux niveaux d’assise). Un sondage a été réalisé dans ces deux structures (sur leurs faces est) et a livré, pour chacune d’elle, un niveau d’occupation. De plus, dans le sondage de la structure 488, une concentration de charbon qui pourrait être le cendrier d’une structure de combustion proche a été identifiée.

 

Tourmont

L’entité 140, monophasée, comprend un abri sous falaise (la structure 333) de 6m² dont les murs sont conservés sur deux niveaux d’assise. Le sondage qui y a été réalisé a révélé un niveau d’occupation et du mobilier archéologique (verre, fragments de toile goudronné, métal).

La structure 334 de l’entité 141, située à 20 mètres au sud-ouest de l’entité 140, est du même type que cette dernière : un abri sous falaise. Trois phases d’occupation y ont été reconnus : les phases 1 et 2, qui ont chacune livré un niveau d’occupation et du mobilier archéologique (verre, métal, céramique, mobilier osseux) ; quant à la troisième phase, il a été impossible de faire la part entre niveau de fonctionnement et niveau de nivellement.

L’Entité 149 complexe et polyphasée, se compose de sept structures de conservation identique (micro-reliefs) dont deux enclos, mitoyens de trois alvéoles, et d’une structure en élévation (une cabane, postérieure à ce premier ensemble, qui a fait l’objet d’un sondage en 2006). La structure 350 (l’une des 3 alvéoles) avait livré en 2006 un niveau de sol bien marqué avec des fragments de céramique non tournée. Ce sondage, poursuivit en 2007, à confirmer la présence d’une seule et unique phase d’occupation. Un autre sondage a également été ouvert sur la structure 348 (une alvéole de 6 m de diamètre) qui a livré un niveau d’occupation (un sol et de nombreux éléments de mobilier archéologique -céramique non tournée, verre, matériel osseux, métal-).

 

Les datations obtenues en 2007

Les 22 niveaux d’occupation repérés lors de ces 18 sondages ont été, à 76 % (soit 17 niveaux) datés. 14 niveaux d’occupation l’ont été par analyse au 14C (les entités 36 et 186 du secteur de La Glère ; les entités 38, 41 et 172 du secteur de La Gradillière ; la phase 3 de la structure 334 et l’entité 149 du secteur de Tourmount ; les entités 181 et 182 du secteur de Caillaoulat) et 3 d’après l’étude du mobilier archéologique (la structure 333 et les phases 1 et 2 de la structure 334 du secteur de Tourmount). 5 structures n’ont pas été datées soit par manque de résidu carboné soit parce-que la détermination du niveau d’occupation a été trop litigieuse.

Ces datations commencent à éclairer la transition Moyen âge/Epoque Moderne. Outre, la structure 334 dont l’occupation moderne repose sur un niveau datée des XVe-XVIIe siècles qui peut être soit une occupation, soit un remblai, cette transition est essentiellement documentée par les entités 36 de La Glère (dont la structure 102 datée du XIIIe siècle et la structure 101 datée des XVIIIe-XXe siècles) et 172 de La Gradillière (la structure 488 datée des XVe-XVIIe siècles et la structure 405 datée des XVIIe-XXe siècles). Quant aux structures de l’époque Moderne/contemporaine (XVIIe-XXe siècles), elles sont de mieux en mieux cernée : entité 38 (1er phase de la structure 113), l’entité 41, l’entité 140 et la structure 446 de l’entité 181.

Les occupations anciennes ont également été documentées : à La Gradillière (2ème phase de la structure 113 datée des XVIIIe-XVIe siècles avant notre ère ; le mobilier archéologique découvert céramique non-tournée et fragments de silex d’allure protohistorique dans le sondage effectué dans les structures 403 et 404 et le sondage 489), à Caillaoulat (la structure 450 de l’entité 182 datée des XVIe-XIVe siècles avant notre ère) et à Tourmount où la reprise des sondages de 2006 ont confirmé l’occupation du site aux IVe-VIIe siècles de notre ère.

 

Principaux résultats des travaux  2005-2007

Au terme de l’année 2007, il est possible de considérer que la phase de prospection-inventaire d’Anéou est achevée. Les 40% restant du territoire à parcourir (soit les zones les plus hautes et les plus pentues) n’ont livrée aucun site ou indice de site.

Les trois campagnes de sondage 2005-2007 auront permis de sonder 27 structures appartenant à 17 entités et de documenter 29 niveaux d’occupation qui éclairent trois périodes principales : l’âge du Bronze (5 dates), Antiquité-Haut Moyen âge (4 dates) et époque Moderne/contemporaine (13 dates). Reste une date pour la fin de l’âge du fer, une date pour le Moyen âge central et deux dates correspondant à la transition Bas Moyen âge/époque Moderne. La date néolithique appartient à un contexte a priori remanié. Les deux dates obtenues sur les structures 40 (III-Ve siècles de notre ère) et 487 (IX-VIIIe siècles avant notre ère) ne caractérisent pas une occupation mais donne simplement des terminus post-quem.

Le référentiel chronotypologique issus de ces sondages archéologiques est maintenant suffisant pour clôturer cette première phase et envisager le passage à des fouilles extensives.

Analyse spatiale, DGPS, Fouille archéologique, Multi-méthode, prospection, SIG , , , , , , , , , , , , , , , , , ,

Programme Collectif de Recherches – « Dynamiques sociales, spatiales et environnementales dans les Pyrénées centrales »

Programme Collectif de Recherches – « Dynamiques sociales, spatiales et environnementales dans les Pyrénées centrales »

(Dir. Ch. Rendu -Laboratoire Framespa (UMR 5136) et D. Galop – Laboratoire Geode)

  Ce PCR succède aux deux années d’études préalables entreprises en 2004 et 2005 sur les vallées de Béarn et Bigorre. Il vise à poursuivre ces recherches dans un cadre pluriannuel et avec un véritable croisement des données acquises sur les différents chantiers. L’ensemble des travaux se place dans une perspective résolument interdisciplinaire et a pour objectif, à partir de transects réalisés à des échelles spatio-temporelles adaptées à chaque source (archéologique, historique, paléoenvironnementale), d’appréhender les processus et les logiques de transformation des paysages et des systèmes d’exploitation montagnards dans la longue durée. Le PCR repose sur 3 ateliers thématiques : paléoenvironnement et dynamiques de l’anthropisation (sous la direction de D. Galop) ; archéologie pastorale et systèmes d’estivage (C. Rendu, C. Calastrenc et M. Le Couédic) ; archéologie minière et métallurgique (A. Beyrie et E. Kammenthaler). Le quatrième atelier est un atelier de confrontation des données, dont la première session est programmée à Pau en juin 2007.

Les questions communes à l’ensemble de ces ateliers concernent en premier lieu les rythmes d’exploitation des ressources agro-sylvo-pastorales et minières, qu’il faut établir et dont il faut mesurer la généralité ou la singularité  par des comparaisons entre vallées. Une fois ces rythmes identifiés, la démarche consiste à détecter les seuils, chronologiques et spatiaux, susceptibles d’indiquer un basculement d’un système à un autre : où et quand ces basculements se produisent-ils, quelles nouvelles formes de complémentarités mettent-ils en place ? En d’autres termes, de quelles trajectoires, singulières ou globales, résulte l’étagement que les géographes du début du XXe siècle ont appréhendé dans les termes d’une conquête progressive des versants ? Passer de ces rythmes et de ces seuils à une vision spatiale et sociale est l’enjeu final du programme. C’est ici que le croisement des sources s’impose plus particulièrement. Mais il faut procéder par étapes, ou en tout cas de façon sectorielle, c’est-à-dire construire d’abord des séquences autonomes par discipline. Les relations à interroger sont alors celles qui unissent formes de l’impact anthropique sur les paysages, systèmes agro-sylvo-pastoraux d’exploitation, réseaux de peuplement, organisations territoriales et hiérarchies sociales (autour de la question clé des formes d’accès aux ressources collectives).

Les recherches paléoenvironnementales, d’archéologie pastorale et d’archéologie minière s’effectuent selon des logiques de terrain différentes, qui entraînent des calendriers décalés. Pour prendre les deux extrêmes, les temps de terrain et de laboratoire sont à peu près inverses en paléoenvironnement et en archéologie pastorale. Si la prospection des tourbières est assez rapide et permet à court terme l’enregistrement des principales archives sédimentaires au long de plusieurs transects valléens, en archéologie, la prospection systématique, la nécessité d’une approche systémique pour une compréhension des relations entre sites, enfin les impératifs d’un raisonnement chronotypologique et fonctionnel, imposent des interventions plus longues sur des espaces plus réduits. L’un des objectifs de l’atelier 4 est de parvenir à combiner ces différentes échelles.

D’un point de vue paléoenvironnemental, deux transects auront été réalisés  au terme du programme, qui documenteront sur toute leur étendue les vallées d’Ossau et du Gave de Pau. Ils s’appuient en vallée d’Ossau sur les tourbières de Gabarn (300 m d’altitude), Benou (881 m), Piet (1150 m), Portalet et Anéou (2000 m) ;  et pour le Gave de Pau  sur les  tourbières de Lourdes et Col d’Ech en piémont, du col de Bordères (1170 m) en Val d’Azun , de Saugué (1600 m), La Holle (1545 m, dans une zone de granges) et Troumouse (2120 m).

En archéologie pastorale, l’essentiel des recherches s’est centré sur l’estive d’Anéou en haut Ossau, avec pour objectif fin 2007 l’achèvement des prospections – relevés systématiques et la réalisation d’une série de sondages suffisante (une vingtaine) pour permettre un premier tri chronologique des sites à partir de leur image de surface. C’est sur la base de ces diagnostics que l’on passera aux fouilles en extension.

 

En archéologie minière, les deux premières années ayant permis la prospection et l’inventaire de 28 sites sur la vallée d’Ossau, les recherches de cette première année de PCR se sont consacrées à la vallée d’Aspe.

 

Résultats

Les premiers résultats paléoenvironnementaux concernent les tourbières de Gabarn et de Piet en vallée d’Ossau, et de Saugué et Troumouse en vallée du Gave.

L’enregistrement de Piet remonte aux premiers stades de la déglaciation de la vallée et documente d’une manière fine les étapes successives de la reconstitution végétale depuis le Dryas ancien (14000 BP). Du fait de la compacité du sédiment, il est par contre encore difficile d’y déceler avec précision les dynamiques d’anthropisation. Toutefois, les premières manifestations d’activités agro-pastorales y sont notées discrètement vers 2500 av. J.-C. Elles s’intensifient considérablement durant la période médiévale (vers le  X° s.) où combinées à des incendies importants, elles occasionnent une déforestation importante de la hêtraie sapinière tandis que l’exploitation  de la forêt aux abords de la tourbière semble localement atteindre  son apogée durant les XVI-XVII° siècles.

C’est sans aucun doute la séquence de Gabarn qui, en raison de sa dilatation, livre les informations les plus pertinentes sur les principales étapes de l’anthropisation de la vallée d’Ossau. Si les premières manifestations locales d’activité humaine, enregistrées vers 5800 av. J.-C., méritent des vérifications en raison de leur précocité, la tourbière révèle, selon des rythmes impossibles à détailler ici, une anthropisation de plus en plus nette à partir de 4300 av. J.-C. avec des signaux récurrents d’essartages ou de cultures sur abattis-brûlis. Ces pratiques connaissent une intensification durant le Bronze ancien et le Bronze moyen. Le développement des forêts secondaires post-culturales indique alors un système forestier à jachères longues, qui perdure jusque vers 1100 av. J.-C. Il s’efface durant l’Âge du Fer, mais sans disparition complète des essartages, au profit d’un système à jachères herbeuses voire à prairies permanentes. Après un épisode antique relativement atone, les IV°-V° siècle de notre ère marquent un redémarrage qui se poursuit durant le haut Moyen-Âge et jusqu’aux IX-X° siècles. Dès lors, l’augmentation constante des marqueurs polliniques de l’anthropisation indique une pression agro-pastorale continue et croissante jusqu’au XVI° siècle. A partir du XVII° siècle, les taxons forestier et en particulier le hêtre sont éliminés des environs du plateau. La disparition du signal incendie au même moment indique un arrêt des défrichement dans une espace désormais totalement anthropisé.

 Les enregistrements sédimentaires étudiés en vallée du Gave — Saugué et Troumouse — constitueront, avec les séquences à venir de Bordères, du Col d’Ech, de la Holle  et du lac de Lourdes, le transect paléoécologique le plus pertinent acquis sur la chaîne pyrénéenne.

Saugué et Troumouse ne couvrent pas en continu les mêmes périodes. Le début de Troumouse est daté de 2130 av. J.-C. et seul Saugué documente le Néolithique. Un hiatus de près d’un millénaire interrompt en revanche cette dernière séquence, entre le 5e s. av. J.-C. et le début du 6e s. de notre ère. Les données livrées par ces deux tourbières permettent néanmoins,  sur de longues plages temporelles communes, une lecture étagée des processus d’anthropisation. Elles mettent en évidence l’existence d’une construction progressive des paysages agro-pastoraux démarrant dès l’Âge du bronze par un déboisement et une utilisation avant tout pastorale des zones intermédiaires et par la création des estives d’altitudes. Ce processus s’amplifiera graduellement par paliers successifs jusqu’au IXe siècle, mais cette dynamique est entrecoupée de périodes de replis durant l’Âge du fer et les VII-VIIIe siècles, périodes pour lesquelles les données paléoenvironnementales reflètent des épisodes de ralentissement des activités, d’enfrichement, voire de reforestation, dont les causes pour le plus ancien de ces évènements semblent reposer sur l’installation de conditions climatiques défavorables.

Les résultats des ateliers archéologiques sont présentés dans ce Bilan Scientifique aux communes d’Accous pour l’archéologie minière et de Laruns pour l’archéologie pastorale. Nous y renvoyons le lecteur.

Concernant l’exploitation pastorale de l’estive d’Anéou, les données se concentrent pour l’instant sur les deux périodes du Bronze final et de l’Antiquité tardive. Pour le Bronze final, les trois structures datées, qui participent d’un ensemble visiblement important, s’inscrivent dans un schéma très général d’intensification du pastoralisme à haute altitude, que l’on observe désormais à l’échelle de toutes les Pyrénées ainsi que dans le massif alpin. Le caractère très structuré des occupations de l’Antiquité tardive, qui correspondent toutes deux à des sites de plan complexe, est plus inattendu mais s’accorde au redémarrage précoce des activités agro-pastorales dont témoignent les données polliniques, pour l’instant un peu lointaines toutefois, de la séquence de Gabarn. Au regard de la documentation écrite de la vallée d’Ossau, comme des enregistrements sédimentaires de Piet et de Gabarn, la difficulté à saisir les implantations du plein Moyen Âge est en revanche étonnante, aucun sondage n’ayant pour l’instant documenté cette période. Ce sera l’un des objectifs prioritaires de la dernière campagne de sondages, en  2007, que de tenter de l’appréhender.

Les prospections minières et métallurgiques sur la vallée d’Aspe ont mis en évidence, à partir de la recension de 26 sites et de la documentation précise de 12 d’entre eux, une exploitation  variée (cuivre, argent, plomb, manganèse, fer…), mais sans mines de grande envergure, et qui repose plutôt  sur une kyrielle de recherches et de travaux faiblement développés sur des gisements métallifères peu étendus. Comme pour l’Ossau, les seules phases d’exploitation datables par la prospection et le relevé se concentrent sur les périodes moderne et contemporaine. La nécessité de combiner cette approche qualitative fine des derniers siècles avec une perspective de plus longue durée conduit à s’orienter, en 2007, vers des sondages à visée chronologique sur les sites présentant des indices d’exploitations potentiellement plus anciennes. C’est le cas de Baburet en vallée d’Ossau, où des traces d’ouverture au feu sont associées des ferriers situés à l’écart des cours d’eau, et de Cauziat en vallée d’Aspe, où l’exploitation du 18e s. semble avoir recoupé des travaux antérieurs, ouverts au feu et démarrés à l’affleurement. Ces données pourront être corrélées avec les résultats des mesures géochimiques effectuées sur la tourbière de Gabarn, dans le but d’évaluer, grâce aux concentrations et aux variations des signaux isotopiques de plomb, les paléopollutions atmosphériques liées aux activités minières et/ou métallurgiques.

La deuxième année du PCR permettra d’engager les premières comparaisons entre ces nouvelles données acquises sur la montagne et les données archéologiques et historiques disponibles à l’échelle régionale. Elle devrait aboutir à la mise en place d’ateliers transversaux, centrés sur des corpus documentaires restreints, visant à affiner la question des modèles sociaux et territoriaux envisageables pour chaque période.

Christine Rendu, Didier Galop, Argitxu Beyrie, Carine Calastrenc, Carole Cugny, Eric Kammenthaler, Mélanie Le Couédic.

 

Analyse spatiale, DGPS, Etude documentaire, Fouille archéologique, Multi-méthode, Photographie aérienne, SIG , , , , , , , , , , , , , , ,