Cats On Trees est un duo musical toulousain composé de Nina Goern (chant et piano) et de Yohan Hennequin (batterie et choeurs). Leur groupe se forme en 2007 à Toulouse et est remarqué en 2010 lors du ‘’Printemps de Bourges’’, un festival qui va les mettre en lien avec leur producteur : Pierre Rougean.
Ils sortent ensemble deux premiers albums ‘’Cats On Trees’’ (2013) et ‘’Néon’’ (2018) qui vont tous deux connaitre un agréable succès. Le duo toulousain arrive, dans les deux opus, à créer une véritable ligne artistique solide tout en se permettant d’explorer de nouvelles sonorités.
‘’Alie », leur nouvel album, va encore chercher à agrandir leur univers en gardant une certaine continuité avec les œuvres précédentes. En effet : le premier album éponyme est très accès sur un son purement acoustique, « Néon » va progressivement d’un son acoustique à des ambiances plus électroniques et enfin « Alie » fait une synthèse entre acoustique et électronique.
Ce nouvel opus garde la base du duo, leur deux instruments phares le piano et la batterie. Il va envelopper et mélanger de manière subtile différents timbres entre eux: des guitares acoustiques et électriques, des synthétiseurs et des claviers analogiques (wurlitzer), des batteries électroniques, etc.
Les morceaux sont très doux, nostalgiques, entraînants, remplis d’espoir avec une pointe de tristesse. On retrouve la voix si particulière de Nina, à la fois douce et puissante et le jeu de Yohan : précis et dansant.
Pour ‘’Alie’’ le duo a d’ailleurs changé de producteur. Travaillant maintenant avec Liam Howe, le nouveau producteur et Mark Stent (alias Spike) pour le mixage/montage. L’influence des deux nouveaux acteurs dans le projet se fait sentir grâce aux expériences qu’ils ont eu avec d’autres artistes (Bjork, Lana Del Rey, U2, Depeche Mode). Ce nouveau duo derrière la table de mixage vient parfaitement s’accorder avec les Cats On Trees, rentrant dans leur univers et venant apporter une logique avec le reste de la discographie tout en la faisant avancer.
- Please Please Please
- Wake Up
- Dad On The Moon
- Alie
- Une Nuit Ou Deux
- Took Took
- Nino
- Old Friends
- Lost Found Love
- She Was A Girl
- Tendresse
- Nobody
- Sirens Call – Shaka Ponk Remix
Cliquez ici pour une analyse plus détaillée de chaque morceau.
Cats On Trees : l’interview
Une interview du duo Cats On Trees préparée et réalisée par David Consenza, Ives Robin, Emmy Jourde, Rebecca Lane, Jeanne Richard & Elie Serre-Anne
Des structures musicales types du style Pop
Tout d’abord, pour la durée des titres, nous pouvons constater que les morceaux durent entre trois et quatre minutes (2min55 pour le plus court et 4min11 pour le plus long).
L’album et le groupe répondent aux codes de la musique pop, les morceaux sont sous la forme chanson, donc forme courte. Cette forme chanson se présente souvent sous des structures similaires dans un ordre parfois différent:
introduction/couplet/pré-refrain/refrain/couplet /refrain/interlude/coda.
Nous avons fréquemment des introductions qui ne dépassent pas les 20 secondes. Quelques morceaux commencent directement sur les couplets, à l’exception de Took Took qui démarre par un extrait du refrain presque a capella **(INSÉRER AUDIO TOOK TOOK)**. Les introductions se font souvent sur la grille des couplets ou refrains, avec une accumulation de l’effectif. Ces introductions commençent par un clavier seul, ou guitare, ou des motifs électroniques (motifs que l’on retrouve par la suite dans le morceau). Comme les morceaux suivent la forme chanson, les introductions s’il y en a, ne sont jamais très longues; laissant directement la place au propos de la musique. La durée moyenne des introductions est de 10 secondes.
Nous avons parfois des ponts, ou précédemment appelés interludes. Ils sont principalement instrumentaux. En effet, on retrouve quelques dialogues entre la voix/chœurs (qui répète de manière lointaine des phrases ou des vibes) et des riffs aux autres instruments. Cependant un ou deux morceaux présentent des interludes vocaux, où la dominante est à l’instrumental, souvent électronique. Leur longueur oscille autour des 20 secondes maximum.
Dans cet album, la place principale est attribuée à la voix, mais quelques riffs sont à relever. Chaque morceau a plus ou moins le sien, joué à l’intro pour présenter l’ambiance, et souvent joué également en fond des refrains. Ce sont des motifs à l’instrumental, clavier principalement. Les boucles quant à elles ont plus une fonction d’accompagnement, comme des arpèges au clavier, ou en post production avec des sons électroniques. Nous en avons peu par morceau.
Une instrumentation et un arrangement atypique et touche à tout
Chant et Mixage
La voix est très reconnaissable par son timbre feutré et doux. Nina la chanteuse, se démarque dans sa façon d’interpréter et de donner vie à ses paroles. En effet, elle nous a confié dans l’interview que pour elle chanter c’est comme raconter une histoire. Ce côté narratif accentue son timbre envoûtant et lui confère une identité unique.
En terme de mixage la voix est toujours devant, les consonnes sont accentuées ce qui clarifie la prononciation. Les paroles sont rarement noyées par l’instrumental, même si celui-ci devient parfois « fort » ou “très important » en particulier lors des refrains. Il y a également certains moments, plus rares, uniquement instrumentaux (comme dans She was a girl). Le chant est mit en valeur grâce à l’équilibre des volumes : Nina est fréquemment plus forte que les instruments.
Au-delà de la voix principale, on entend également beaucoup de chœurs avec de la reverbe et des backs dans l’arrière du mix. Les backs font parfois écho, dialogue ou question/réponse avec le chant principal. Ce choix musical et esthétique évoque l’aspect narratif dont parlait Nina : elle chante telle une conteuse d’histoire, entourée de murmures et de chuchotements. On peut d’ailleurs entendre dans certains morceaux, la voix de Yohan qui se fond imperceptiblement dans le décor musical.
Le chant subit à certains moments des traitements électroniques comme dans Nino sur le refrain : est-ce une voix avec un vocodeur ou bien un instrument avec un effet ? A 2’42 il y a aussi un petit passage avec un sample de voix découpé (vocals chops) et « pitché » dans l’aigu (insérer audio Nino 2’42). Took Took nous donne une impression de cette technique de voix découpée avec la première syllabe du chant qui se répète. (To-To-Two Kids)
Paroles et instrumentation
Dans ce nouvel album, pas mal de chansons sont en anglais mais aussi en français: Tendresse, Une nuit ou deux et Nino. Le choix de chanter en deux langues sous-entend un public international et français.
« Please, please, please
Oh, please, you can sleep another day, my love » – Please Please Please
« Ce n’est que leur tendresse
Qu’à la fin je te laisse
Je t’en fais la promesse
Ce n’est que leur tendresse » – Tendresse
En dehors de paroles, si l’on devait dégager des caractéristiques notables à propos de l’instrumental ce serait la quasi omniprésence du piano, de la batterie et des synthés. Il y aussi parfois de la guitare (Took Took, Lost Found Love). Les sonorités restent assez similaires tout au long de l’album avec beaucoup de « nappes sonores », créées par les différents synthés, pads etc… Ces nappes donnent naissance à une sorte de “masse musicale”, reconnaissable dans tout l’album.
Combinaison Acoustique/Electronique
On ressent dans ce projet le fruit d’une réelle cohabitation acoustique et électronique, le piano, la batterie, la guitare et la basse donnent le côté acoustique tandis que le coté électro est donné par :
-des effets : écho et ou delay sur les instruments, par exemple le piano dans Nino.
-des « codes électro » : un kick tous les temps dans Took Took (techno etc…).
Et bien sûr par les nombreux synthés.
Arrangement / Déroulement des morceaux
Concernant le schéma des morceaux on retrouve la forme traditionnelle : couplets/refrains. L’arrangement entre les différentes parties reste assez identique entres les chansons : des couplets épurés avec la voix en avant, puis une progression de l’intensité qui débouche sur le refrain. Celle-ci est créée par l’intention vocale de Nina, par l’accumulation des instruments et/ou par les contrastes d’effectifs. En effet, l’effectif instrumental devient toujours plus important lors des refrains.
Il n’y pas vraiment de virtuosité instrumentale, Cats on Trees témoigne d’une intention de simplicité du discours. Les différents titres vont donc s’articuler et prendre vie de manière assez similaire malgré quelques différences : certains morceaux ont des intros et des parties instrumentales tandis que d’autres n’en n’ont pas.
Peu d’accords, des modes courants
La plupart des morceaux sont construits sur un petit nombre d’accords basés sur des triades principalement à l’état fondamental. Très peu d’accords enrichis sont utilisés, le langage reste propre aux musiques actuelles. On trouve environ 4 à 8 accords par morceau et l’harmonie varie la plupart du temps en fonction des structures (entre les couplets et les refrains, ou sur un pont lorsqu’il y en a un).
Le titre Alie par exemple est composé de six accords, ils sont utilisés différemment dans chaque partie du morceau: F# / G# / A#m / C# pour les couplets, G# / A#m / A#m / G# / A° – F# pour les pré-refrains et C# / G# / A#m / F# / C# / G# / D# / D# pour les refrains. (insérer l’audio couplet prérefrain refrain)
On retrouve plusieurs types d’échelles dans cet album, notamment le mode mixolydien (très fréquent en musiques actuelles). Ce mode peut être rattaché à des émotions: la balance entre le côté mineur du début de l’échelle et le côté mélodique de la fin de celle-ci pourrait être associée au caractère nostalgique et solaire du titre Une nuit ou deux.
Nous avons aussi trouvé des gammes peu fréquemment utilisées dans le langage des musiques actuelles. La gamme de sol mineur harmonique est mise en évidence dans le morceau Lost found Love. En effet, le mode mineur harmonique par sa 7ème majeure peut souvent paraître « oriental » ou « arabisant ». C’est le fa dièse qui donne cette nouvelle couleur plutôt originale: cela accentue le caractère mystique et envoûtant de la chanson. Celui-ci apparaît dans la phrase « I walk In the Desert », il peut être vu comme un figuralisme pour souligner le désert et son caractère oriental. (insérer l’audio 0’30)
Pour composer, on se laisse respirer
De la création d’une mélodie, à la chanson finale sur le disque, Cats On Trees nous ont ouvert la porte à leur monde en décrivant leur processus de composition pour l’album « Alie ». On nous explique tout d’abord que leur groupe est basé sur une relation d’équilibre. Les rôles ne sont pas préétablis, et ils sont égaux en termes de droits mais aussi tout au long de la création.
Ce processus de composition peut varier selon la chanson. En effet, avec le confinement, Yohan et Nina ont passé plus de temps chacun de leur côté pour composer « Alie ». Les deux Cats ont un processus de composition similaire.
Pour Yohan, la composition peut commencer par une mélodie enregistrée en mémo vocal dans son téléphone. Il est ensuite transformé en guitare ou piano/voix puis arrangé. La première version terminée, ils le laissent poser et s’il plaît toujours après un certain temps, c’est là où commence l’écriture des paroles.
Nina part d’une mélodie qu’elle accompagne avec des instruments acoustiques en posant des accords, puis l’arrange. Pour les deux, le cadre dans lequel ils se trouvent lors de l’écriture est très important. Un environnement calme, sans pression est indispensable. Pour Yohan c’est en marchant ou sous la douche que ses idées arrivent. Au contraire, le fait d’être dans un gros studio en voyant l’heure filer, est un processus anti-créatif qui leur bloque les idées.
“Tous les moments où j’ai décidé de faire de la musique, il n’y a rien qui sort. C’est quand j’ai fini ma journée, que j’ai bien travaillé, que j‘ai bien rien trouvé que ça décante et que ça se passe”
Yohan Hennequin
Cats On Trees ne cherchent pas à reproduire des sons déjà en circulation, ils s’en servent au contraire comme références pour trouver le son qu’ils recherchent, un “mashup éloigné”. En effet, en cherchant à construire des chansons plus organiques, inconsciemment ils se sont remis à écouter des artistes dans ce style (Simon and Garfunkel par exemple). Pour Yohan, cette inspiration n’est pas seulement musicale, mais il touche aussi leur motivation, et leur donne envie d’aller plus loin dans leur recherche musicale.
A cause du contexte de la pandémie, »Alie » a été “fait maison”. En effet, avec les restrictions, Cats On Trees et leur producteur, Liam Howe, ont dû déplacer leurs setups dans leurs maisons. Yohan et Nina, ayant des bases de production, ont créé leurs premières maquettes à partir d’une batterie, chant, basse et synthé. Ce processus de production, plus organique, a donné lieu à des accidents heureux qui n’auraient sûrement pas eu lieu dans l’ambiance des gros studios. Ce n’est que par la suite que Liam a rajouté sa touche (synthés, boîtes…), permettant de créer un vrai mashup moderne d’acoustique et électronique ce qui crée le relief de l’album. Ce moyen de création leur a permit de se rendre compte que ce n’est pas la qualité du matériel qui compte mais l’intention et la sensibilité de l’interprète.
Le directeur du label Tôt ou Tard, Vincent Frèrebeau, a une grande implication dans la création des albums de Cats On Trees. Vincent, musicien, directeur artistique et producteur lui-même, est considéré comme le 3ème Cat. Son investissement, sa qualité d’écoute et sa grande connaissance de la musique, ont donné lieu à un lien de confiance fort avec le groupe.