Deep Kelins, de son vrai nom Antoine Mario Theiler, est un rappeur originaire de Toulouse. Il a déjà à son actif trois albums : Malabar vol.2, sorti en 2020, FLASH en 2021 et son dernier opus, « JDSLP« , paru en octobre 2023. Depuis 2020, il a également produit plusieurs EP, notamment en 2021 et 2022. Sa notoriété a commencé à s’épanouir sur la scène musicale toulousaine, notamment au sein des événements comme le Connexion Live.
Deep Kelins : l’interview
Biographie
Depuis son plus jeune âge, Antoine a apprit les percussions auprès de son père, musicien. Cependant, c’est à la fin de ses années de collège qu’il s’est véritablement passionné pour le rap. Animé par un profond désir d’expression et une soif de liberté, il a commencé à écrire des textes et à se lancer dans le rap. Antoine a appris à jouer du piano, de la basse, de la batterie et de la guitare sans suivre de formation. Dans le but d’acquérir une meilleure compréhension théorique avant de se consacrer pleinement au rap, il a décidé d’intégrer le conservatoire de musique actuelle de Toulouse. C’est là qu’il a rencontré certains de ses futurs collaborateurs pour son dernier album en date. Après trois années d’études, il a décidé de mettre fin à son cursus pour se consacrer entièrement à sa carrière musicale. Deep Kelins puise ses influences dans divers horizons artistiques tels qu’Isha pour l’écriture des textes, Laylow, Akhenaton, Oxmo Puccino, mais aussi des artistes hors du domaine du rap, à l’instar de Richard Bona et de -M-.
JDSLP incarne la volonté de créer un album existentialiste abordant trois thématiques majeures : la spontanéité, la sensation de néant et la prise de conscience. L’album se compose de 9 titres où le rappeur collabore avec plusieurs artistes, pour une durée totale de 30 minutes. On y retrouve une prédominance d’instruments acoustiques tels que la guitare, le saxophone et diverses percussions.
- 1. prélude
- 2. l’ANIMAL HUMAIN aka jeune singe
- 3. ANYWAY
- 4. O FREVO
- 5. FILTRÉ X3
- 6. DÉSERT GLACIAL
- 7. BARQUE EN BOIS
- 8. TROP PETIT
- 9. JE DANSE SOUS LA PLUIE
Des paroles en introspection
L’album explore une palette émotionnelle complexe, allant de l’animalité intérieure à la lutte contre soi-même. Les thèmes de l’instabilité, de peur du temps qui passe, et de la volonté de changer d’histoire créent une introspection profonde. L’ego trip et l’emo rap viennent enrichir cette exploration en permettant à l’artiste de partager ses sentiments, parfois négatifs, avec le public.
Deep Kelins fait parler ses émotions dans ses textes. Ses mots sont le prolongement d’un cri, d’un sentiment d’une humeur sincère et spontanée. En utilisant sa musique et ses paroles comme un exutoire, il extériorise son âme artistique. Le rappeur revendique son « animal humain », une formulation récurrente dans l’album. En laissant place à sa spontanéité, il recherche un équilibre entre le contrôle de ses émotions et son impulsivité. Ainsi, sa plus grande crainte est de devenir stoïque et de perdre de son authenticité. Il dévoile donc dans son album, une palette de sentiments complexes et différents. A travers des enregistrements introspectifs, il évoque plusieurs pensées intimes et personnelles, fait allusion à ses interactions aux autres, mais également son rapport à lui-même, sa place et sa condition dans le monde qu’il habite. Le rappeur aime également se confier sur ses imperfections et ses doutes. Trouver et prendre sa place sont deux pensées importantes dans l’album. Deep Kelins, a la volonté de « prouver », montrer au monde et à lui-même que sa place est légitime que ce soit dans l’industrie ou bien dans ce monde. Il n’hésite pas à se mettre en avant via de l’ego-trip. On retrouve par exemple ce procédé dans ANYWAY « Je recompte mes billets dans un café classe » ou bien dans BARQUE EN BOIS : « tous les rappeurs c’est les mêmes, je me dois de défourailler tout le game ». Le rappeur se questionne également sur ses interactions avec les autres. En effet, l’artiste peine à se faire comprendre, et accepter dans son entourage et dans son monde. Il semble évoluer avec difficultés dans ses relations, notamment dans le morceau O FREVO nous entendons les paroles : « On est tous les deux dans un univers imaginaire ; souvent on se fight mais on ne se parle pas », « je deviens parano même avec mes copines et mes copains » Enfin, Deep Kelins se confie sur ses peurs et ses doutes, il se questionne sur son comportement spontané, sur ses émotions puissantes pouvant être incontrôlables. « Trop petit pour ce désert glacial (..) je m’envole, je m’envole » On retrouve ces doutes et ces questionnements dans le dernier morceau JDSLP (Je Danse Sous La Pluie), apothéose de l’album, l’artiste se révèle pleinement, pour assumer ses émotions, ses imperfections. Le rappeur souhaite ainsi continuer d’évoluer avec elles, assumer ses peines et ses peurs tout en leur rendant hommage, continuer à danser sous la pluie.
Ainsi, grâce à ses textes, JDSLP est un album, authentique et personnel, réel exutoire pour l’artiste. Deep Kelins, nous propose d’évoluer dans son univers intime, en nous faisant découvrir sa vision du monde qui l’entoure.
Créativité sans contraintes et vibrations authentiques
Deep est un artiste expérimenté aux inspirations multiples : de la bossa nova, qu’il écoutait quand il était petit, jusqu’à Laylow, en passant par Akhénaton, Oxmo Puccino, -M- ou Richard Bona. Il préfère laisser libre cours à sa créativité plutôt que de se borner à une méthode unique. Son processus créatif débute par l’apport de « matière », des idées brutes qu’il sélectionnera ensuite. Ses idées peuvent emprunter différents chemins avant de prendre forme, allant de l’expression d’un « cri du cœur » dans son studio à s’inspirer d’une ligne mélodique. Il privilégie de manière générale la spontanéité plutôt que la réflexion dans son écriture, car, pour le citer, « si les rimes deviennent une contrainte au texte, c’est que le texte manque de saveur ».
Deep fonctionne avant tout avec le cœur. C’est à partir de ce qu’il ressent qu’il choisira les artistes qui participeront à son projet. Bien qu’il ait une certaine vision à laquelle il souhaite rester fidèle, il se laisse parfois influencer par d’autres idées que les siennes, pour peu qu’elles lui plaisent. Il dirige les instrumentistes qui l’accompagnent à la manière dont il aime être dirigé quand il participe à un autre projet que le sien : donner des pistes, des grandes lignes, mais en laissant tout de même de la place aux inspirations de chacun, surtout quand il s’agit d’un instrument qu’il ne maîtrise pas.
Même si notre artiste fait lui-même son mix et son mastering, ses compétences informatiques sont limitées, et cela résulte d’un choix : selon lui, les instruments « réels » ont un meilleur son. Ainsi, il préférera jouer de la basse, de la guitare ou du piano pour créer ses instrus. Également amateur de percussions, notamment de congas, Deep tient ce goût de son père, qui occupe une place importante dans sa musique.
« JDSLP » de Deep Kelins est bien plus qu’un album, c’est une plongée authentique dans l’univers complexe de l’artiste. À travers neuf titres et trente minutes d’exploration musicale, Deep Kelins nous offre un voyage émotionnel intense, allant de l’animalité intérieure à la lutte contre soi-même. L’artiste, animé par une spontanéité sans contraintes, exprime ses émotions avec une sincérité captivante. Les paroles introspectives dévoilent un artiste en quête d’identité, confrontant ses peurs, ses doutes et ses relations tumultueuses. Deep Kelins revendique son « animal humain » et défie la contrainte, privilégiant l’authenticité à travers son ego-trip et son emo rap. En conclusion, « JDSLP » se révèle comme un exutoire pour Deep Kelins, un voyage introspectif où l’artiste danse sous la pluie de ses émotions. Cet album transcende les frontières du rap, offrant une expérience musicale riche et sincère, ancrée dans la créativité sans limites de son créateur.
Préparé et rédigé par Mathis Lemarchand, Gabriel Lecuziat, Dounia Moukag Boussougou, Raphaël Couillard, Gianni Mermer, Emma Stameschkine, Jules Ruffin