La montagne évoque immédiatement un sentiment de défi et d’aventure : l’écrivain Paolo Cognetti le sait bien, qui dans son livre de la collection « Lezioni d’Autore » (Feltrinelli Education) intitulé Breve corso di letteratura : il racconto inedito di tre montagne vicine, raconte quelques-unes des montagnes de sa vie à travers les mots de grands maîtres de la littérature (Natalia Ginzburg, Primo Levi, Mario Rigoni Stern, Antonia Pozzi, parmi d’autres).
Ce récit de souvenirs et de découvertes évoque surtout la puissance des montagnes, un thème qui domine la vie de tous les grands auteurs cités, façonnant leur caractère et marquant leur destin. Paolo Cognetti soutient que chacun de nous a une montagne : celle de son enfance, qui renferme son histoire. Pour l’auteur, cette montagne est le Monte Rosa, la montagne des étés de son enfance, où il a appris à la connaître, devenant le lieu où il se sent bien et où il a maintenant choisi de revenir vivre.
Il explique que « le Monte Rosa n’a pas toujours été appelé ainsi, Léonard de Vinci l’appelait Momboso, probablement une contraction de Monte Boscoso, et que sur les cartes anciennes, il apparaît également sous le nom de Mons Silvius, couvert de forêts. Le rose est un mot qui en ancien franco-provençal a un rapport avec la glace : il ne s’agit donc pas de la couleur de la montagne au coucher du soleil mais d’une montagne couverte de glace. C’est ainsi qu’on peut le voir de la plaine, y compris depuis Milan. J’ai longtemps vécu à Bovisa et ce que j’aimais dans ce quartier, c’est que de certains endroits on peut voir le Mont Rose : je pouvais ainsi soigner ma nostalgie en allant au Ponte della Ghisolfa ».
Cognetti raconte ensuite l’histoire du plateau d’Asiago, la montagne qui a connu la guerre de 15-18, et il le fait à travers les mots de Mario Rigoni Stern, dont il explore la vie et les œuvres dans la deuxième de ses conférences. « Stern est un surnom, Mario s’appelait Rigoni, et comme cela arrive dans les villages de montagne où beaucoup portent le même nom de famille, les familles ont des surnoms. Stern signifie étoile. Ces deux noms ont marqué deux destins, deux vies : pour les chasseurs alpins, il avait été le sergent Rigoni, tandis que sur le plateau, il était Mario Stern ».
Le plateau d’Asiago, le lieu de Rigoni Stern, également connu sous le nom de « dei Sette Comuni », est un endroit très spécial, il ne ressemble pas à une montagne mais à une sorte de grand Nord. Située en Vénétie, à 1000 mètres d’altitude, dans la province de Vicenza, c’est un riche bois de sapins et il a été le théâtre de violents combats pendant la première guerre mondiale ».
L’écrivain nous guide ensuite vers la ville de Milan, dont les rues laissent entrevoir des sommets enneigés, depuis la Grigna, jusqu’au Monte Stella, la montagne de Milan, où se trouve le Jardin des Justes d’Italie. Il y a toujours eu une relation étroite entre Milan et la montagne, entre deux opposés, presque une relation de nostalgie. « Dino Buzzati, né à Belluno mais Milanais d’adoption et amoureux de la ville, a peint le Duomo de Milan comme une montagne ».
Les rochers artificiels des jardins de Porta Venezia constituent un autre lien entre la ville de Milan et les montagnes. À Milan, les rochers ne sont pas là, ils ont été apportés. Dans les années 1960 et 1970, ces mêmes rochers ont été historiquement le premier terrain d’entraînement des grimpeurs milanais : ils s’y rendaient pour s’entraîner et s’en allaient ensuite en montagne le dimanche. Paolo Cognetti, parle aussi dans ce contexte de deux grands personnages milanais de la culture de la première moitié du XX siècle : l’alpiniste Ettore Castiglioni, également rédacteur des guides du Touring Club Italiano, et la jeune poétesse Antonia Pozzi.
Les « Lezioni d’Autore » sont des cycles de leçons en vidéo d’environ 30 minutes chacune avec lesquelles Feltrinelli Education, une plateforme hybride de culture et d’éducation, donne le sens du livre et crée un lieu de rencontre et de dialogue avec les auteurs et leurs références littéraires.
article original (La Repubblica Cultura)