Appel à communication – Corps et techniques : dépassement, déplacement, distance

Appel à communication – Corps et techniques : dépassement, déplacement, distance

Groupe de Travail  N°41 de l’Association Française de Sociologie
Corps, Techniques et Société

Congrès de l’AFS, 5-8 juillet 2011 – Grenoble

« Corps et techniques : dépassement, déplacement, distance »

Le Groupe de Travail n°41 « Corps, techniques et société », de l’Association Française de Sociologie, rassemble depuis 2007 des chercheurs en sciences humaines et sociales qui abordent de manière transversale la relation étroite et problématique qui lie les corps et les techniques.
Nous traiterons pour ce colloque de la question du déplacement, du dépassement et de la distance des/entre les corps et les techniques – dans la continuité du séminaire des années2009-2011 du GT 41 – à partir de terrains de recherches, mais aussi d’approches plus théoriques. Quels procédés techniques permettent aujourd’hui de déplacer les limites du corps ? Quels sont les déplacements de « frontières » en cours ? Quels types de distances ces procédés engendrent-ils ? Ces questions s’inscrivent particulièrement dans le thème général du congrès « Création, innovation » qui nous servira donc de fil conducteur : innovations techniques, créations des corps ? Créations technologiques, innovations corporelles ?

Axe 1 : Dépassement.
La perspective du dépassement poursuit la réflexion sur les frontières et les limites du corps. Le franchissement des frontières du corps est matérialisé dans les différentes figures du corps augmenté ou modifié à travers des prothèses (implants, prothèses mécaniques ou électroniques) ou des traitements pharmacologiques (dopage, stimulation chimique, contraception ou stimulation hormonale), ou encore par des pratiques médicales, parfois encore exploratoires ou à venir (médecine régénérative, clonage, procréation assistée, nanomédecines, chirurgie esthétique, changements de sexe, modifications transitoires, ponctuelles ou définitives de genre…). Tous ces modelages de la chair, ces améliorations ou augmentations (human enhancement) que la technique rend possible et accompagne, toutes les techniques in corpore qui font des corps des « artefacts techniques » parmi d’autres (J. Wajcman, 2002), révèlent jusqu’à quel point il est désormais impossible de définir les frontières du naturel, du normal, du stabilisé. Si donc les techniques in corpore sont le résultat des processus qui engagent des concepteurs des innovations, des acteurs scientifiques, techniques, professionnels, des usagers, ces processus d’innovation introduisent non seulement de nouveaux dispositifs mais aussi de nouvelles formes de normativité des corps, de nouvelles pratiques, de nouveaux enjeux, de nouveaux jeux qui prennent place dans l’interaction entre les concepteurs et les usagers, ces derniers et leurs représentations du corps. Des usagers qui « font » aussi les techniques avec les usages qu’ils en ont : la manière dont ils usent, détournent, modifient à leur tour ces techniques in corpore est ce qui nous interpelle. Quelles sont les dimensions et les marges de l’appropriation ? Quel est le rôle du loisir, du plaisir et de la mise à distance ou de la gestion de la souffrance dans les pratiques de dépassement des frontières du corps ?

Axe 2 : Déplacement.
Notre interrogation sur l’humanisation des techniques et/ou la technicisation des humains, entre artificialisation des humains et naturalisation des techniques, repose sur l’hypothèse d’une redéfinition anthropologique de l’humain. Les discours sur le posthumanisme, ou la postmortalité, les recherches scientifiques et les activités des laboratoires, les discours prophétiques, les constructions mythologisantes des figures de l’homme hybride, celles de l’homme a-mortel ou immortel, et jusqu’à l’imaginaire de la science fiction, constituent l’horizon idéologique et culturel dans lequel les technologies semblent revisiter la définition de l’humain. Les recherches et les pratiques technoscientifiques actuelles, accompagnées par la réflexion éthique et philosophique, obligent particulièrement à regarder avec attention les dépassements possibles des partitions humain/animal et à considérer la remise en discussion de cette frontière. Sur ce même axe, il est central d’interroger la posture du chercheur, de questionner les manières de travailler et concevoir ces nouveaux objets, de penser ces innovations entre science, technologie et design. Si autre définition de l’humain il y a (réelle ou envisagée), les résistances comme les adhésions à ces « déplacements » devront être questionnées. Qui fait quoi ? Qui suit qui et pourquoi ? Et toujours : comment les innovations entrent-elles dans des processus de redéfinition, d’adhésion ou d’exclusion, de la part des acteurs ?

Axe 3 : Distance.
Ce dernier axe croise les deux précédents pour poser la question générale du lien social, à partir de l’innovation technologique et de son inscription dans la chair. Comment vit-on avec un corps modifiable et modifié ? On interrogera les processus d’étrangeté (distance à soi même, ou aux autres), de recherche de distinction, individuelle ou collective, et de « reconnaissance » sociale. Identité, race, genre sont autant de catégories qui construisent la relation à soi et à l’autre. Le corps fabriqué, re-fabriqué, modifié, augmenté, par les techniques contemporaines crée-t-il de la distance ? Cherche-t-il à l’abolir ? Un corps rendu disponible à la modification pose aussi la question de sa normativité : les pratiques scientifiques et technologiques biomédicales, par exemple, reposent sur la notion d’anomalie, de pathologie, de standards, de moyenne, de mesure. Comment les techniques médicales peuvent-elles être prescriptrices de normes corporelles, et sources de rapports sociaux éventuellement « autres » ? Quels sont les paramètres proposés/imposés – socialement, techniquement, scientifiquement, esthétiquement, éthiquement – qui indiquent ce qui est normal et ce qui doit être amélioré, ce qui est acceptable ou ce qui ne l’est pas ? Quels sont les domaines dans lesquels on expérimente la transformation (art, sport, handicap, santé, vieillesse…) ? Et par quels processus (lobbying, promotion, underground, déviance, etc.) peut-elle se généraliser ou être normalisée ?

Session commune RT 19 et GT 41 :
Lors d’une session conjointe, le RT19 et le GT 41 souhaitent questionner les innovations technologiques en médecine et leurs implications en termes de rapport au corps d’une part, et de nouvelles relations soignants-soignés d’autre part. Les innovations technologiques en médecine sont nombreuses et ne cessent de progresser : imagerie numérique, en 3D, médecine du futur (médecine expérimentale, individu bionique), biotechnologies… L’innovation médicale concerne aussi aujourd’hui le domaine de la bioéthique (cellules souches, dépistage génétique,médecine régénérative) et pose plus largement des questions sur la manipulation des organismes vivants, sur leur statut et le développement de ce que S. Bateman appelle une médecine hors corps. Quels sont les impacts de ces nouvelles technologies sur le corps ? Peut- on parler d’une nouvelle dépendance des corps ? D’autre part, les innovations technologiques concernent également l’information des usagers et la communication entre usagers et professionnels que l’on peut rassembler sous le terme e-santé. Il convient de s’interroger d’abord sur le développement de la télémédecine (télésurveillance, téléconsultation, télédiagnostic) et de son impact sur les relations soignants-soignés et sur les représentations du corps et des organes malades ; l’interrogation porte ensuite, et plus largement, sur l’essor de l’internet qui vient modifier les relations établies entre usagers et professionnels : de nouveaux rapports de connaissances, d’autorité et de pouvoir, d’expertise émergent et demandent de la part des usagers et des patients, des professionnels de la santé et des experts médicaux, mais également des institutions, des ajustements nécessaires. Un thème associé est celui de la pratique depuis quelques années d’un tourisme médical de la part des usagers, généré par l’offre de ces nouvelles technologies, qui peut être également interrogé lors de cette session conjointe.

Session commune RT31 et GT41  (extrait de l’appel à communication du RT31) : Une session commune sera organisée entre le GT41 (« Corps, techniques et société ») et le RT31 (« Sociologie des activités physiques et sportives »). L’axe directeur de cette collaboration se situera à l’interface des orientations développées par ces deux équipes, tout en cherchant à répondre, dans une optique transversale, à la question des créations et des innovations technologiques et/ou corporelles liées au sport et aux activités physiques. Les communications pourront par exemple porter sur le thème du dopage et de ses nouvelles  formes (qu’elles soient médicamenteuses, génétiques, et même mécaniques ou électriques comme ce fut peut-être récemment le cas en cyclisme), ainsi que sur les nouvelles techniques de dépistage qui en découlent. Les interventions pourront aussi aborder la question des innovations en matière de culture matérielle : l’outil sportif envisagé dans l’évolution des formes et des matériaux, qu’il soit considéré comme prolongement du corps (raquette, perche, épée, etc.) ou comme remplacement d’un membre (nouvelles prothèses de course handisport, etc.). D’autres approches relatives à la question des créations et des innovations pourront enfin être traitées, en rapport avec les attentes transversales d’une telle session commune reliant corps, techniques et APS sous l’angle des sciences sociales.

Modalités de soumission des propositions :

Les propositions de communications doivent être envoyées au plus tard pour le 18 décembre 2010, conjointement aux deux responsables du réseau, valerie.souffron@univ-paris1.fr et  caroline.moricot@univ-paris1.fr, afin d’être étudiées par les membres du bureau du GT 41.

Les propositions détaillées de communication devront se conformer aux exigences suivantes :
1- Une proposition de communication, en 7500 caractères maximum, espaces compris, soit environ une à deux pages de texte, précisant les éléments suivants : thème(s) se rattachant à la communication parmi les 3 axes proposés, objet de la recherche, stade de cette recherche, données théoriques et principaux éléments de la problématique, terrain(s), types de personnes interrogées et/ou corpus constitués, méthodes d’investigation et d’analyses mises en œuvres.
2- Un résumé de cette communication, répondant aux exigences de l’AFS, soit en 1400 signes (espaces compris).
Le tout devra être enregistré en fichiers de format Word (2003 ou 2007) ou Pdf.

C’est sur la base de ces textes que les propositions seront sélectionnées, en fonction de l’intérêt qu’elles présenteront pour les diverses sessions de notre groupe, ainsi que des groupes avec lesquels nous nous proposons de créer des sessions communes (RT 19 Santé, Médecine, Maladie et Handicap et RT 31 Sociologie du sport et des activités physiques).
Vous pourrez préciser votre éventuel intérêt pour l’une de ces sessions communes (les programmes complets de nos collègues des RT 19 et 31 sont disponibles sur le site de l’AFS).
Tous les publics de chercheurs, enseignants-chercheurs, doctorants, sont concernés par cet appel. Le GT 41 est composé de sociologues, anthropologues, philosophes et historiens et toutes les disciplines des sciences humaines sont les bienvenues, dans la mesure où les thèmes des communications s’inscriront dans ceux des axes de recherche énoncés ci-dessus.

Nous vous rappelons que vous devrez vous acquitter des frais d’adhésion à l’AFS et de l’inscription au colloque pour pouvoir participer, dès lors que votre proposition aura été retenue.
Le colloque se déroulera du 5 au 8 juillet inclus, sur le campus de Saint Martin d’Hères, à Grenoble

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