Histoire

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Journées d’étude – Mécaniques du vivant. Savoir médical et représentations du corps humain, XVII-XIXe siècles

 

Journées d’étude EXPLORA (CAS – EA 801/Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse) organisées dans le cadre du projet inter-MSH « Savoirs littéraires, savoirs scientifiques »

Programme des Journées

Affiche de la Manifestation

5–6 décembre 2011

Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse/Musée de la Médecine de Toulouse

Le développement des sciences médicales a métamorphosé la vision du corps humain au fil des siècles, un corps qui se dessine et se redessine dans la littérature et les arts visuels, permettant souvent de retracer l’évolution de la pensée et de la recherche médicale. Dans la médecine antique, la théorie des humeurs élaborée par Hippocrate et développée par Galien, qui marquera l’histoire de la médecine, influencera aussi l’art de la Renaissance et le théâtre élisabéthain, comme le montre l’apparition de la Comédie des Humeurs de Ben Jonson. Alors que la physiologie humorale perdure jusqu’à la fin du XVIIIième siècle, étant même défendue par Auguste Lumière au XIXième siècle, le corps humain bascule peu à peu dans une vision mécaniciste. Sang, phlegme, bile jaune ou noire entrent en compétition avec de nouvelles images qui transforment le corps chaudière en divers circuits et pompes, préfigurant déjà la théorie des animaux-machines de Descartes. Bien avant l’avènement des sciences et techniques et la métaphore du mécanisme d’horlogerie de La Mettrie, la révolution de l’anatomie, à la fin du XVe siècle et dans la première moitié du XVIe siècle, ouvre la recherche médicale sur l’étude de l’intérieur du corps humain, offrant au savant une mécanique mise à nu. La figure de l’homme mécanique, directement liée aux progrès en anatomie et physiologie, redéfinissent l’homme comme un assemblage de pièces amovibles. En outre, les planches anatomiques (de celles de Vésale à celle de Léonard de Vinci dans le domaine artistique) témoignent de la façon dont médecins et artistes font de la dissection un moyen d’accès à la vérité cachée. Les mystères du corps cèdent sous la lame du dissecteur ou du chirurgien, dès la naissance de la chirurgie moderne avec Ambroise Paré, et à mesure que le scalpel dévoile des profondeurs jusqu’alors invisibles, faisant disparaître muscles et tendons pour faire apparaître l’ossature, un nouveau rapport au corps humain se fait jour, à la fois dans les traités médicaux et dans les représentations artistiques. Les corps disséqués montrent comment l’exploration des cadavres transforment l’épistémè : la recherche de la vérité semble se situer à l’intérieur, sous les chairs que l’on ne sait encore ôter. Ainsi, le passage des fluides aux viscères se retrouve vite mis en scène dans l’art pictural qui place soudainement l’acte de dissection sous les feux de la rampe, nombre d’enluminures dès le XIVe siècle reflétant les recherches médicales du temps. Entre esthétisme et rigueur scientifique, les gravures anatomiques, à l’instar de celles de Jacques Gautier d’Agoty, ou même les cires de Gaétano Zumbo et du chirurgien Guillaume Desnoues et les écorchés d’Honoré Fragonard, offrent à un public avide d’émotions un nouveau réalisme.

Cette journée d’étude s’adresse aux chercheurs en histoire de la médecine, philosophie des sciences et en littérature. Elle cherchera à retracer les grandes théories qui marquent l’histoire des sciences médicales et leurs représentations du corps et proposera une réflexion épistémologique sur la diffusion et l’impact de disciplines et champs liés aux sciences médicales sur les représentations littéraires des XVIIe–XIXe siècles. Il s’agira de suivre le passage de nouvelles épistémè et découvertes médicales dans les représentations littéraires du corps humain. Les nouveaux modèles de la connaissance induits par les développements de l’anatomie, de l’ostéologie, de la physiologie et de la biologie (avec, par exemple, les études en histologie et cytologie, réduisant l’humain à une somme de cellules) seront au coeur de cette manifestation scientifique interdisciplinaire. On pourra se demander si, au moment où la mécanique du corps semble révéler ses mystères, les représentations littéraires des sciences médicales ne deviennent pas un témoin privilégié de la cartographie du corps, un indice des nouveaux modèles épistémologiques que le texte met constamment en scène à travers ses stratégies narratives et personnages. Le modèle hydraulique, lié à la découverte de la circulation sanguine de l’anatomiste William Harvey, ou bien le modèle anatomique, sont autant de révolutions médicales dont on cherchera à suivre l’exportation dans le discours littéraire. On pourra aussi étudier le voyage de l’iconographie anatomique dans les oeuvres littéraires afin de mesurer comment les transformations d’un corps indivisible à un corps fragmenté ou encore disséqué suivent l’évolution de la pensée médicale. En retraçant le chemin parcouru par le savoir médical dans la littérature, il s’agira également d’évaluer notamment comment le texte se charge souvent d’une émotion que la science refoule, mettant en lumière à la fois la précision grandissante de l’observation scientifique et la peur d’une médecine inhumaine qui transforme l’homme en objet d’expérimentation. Ainsi, la littérature du XVIIe au XIXe siècle deviendrait peut-être un miroir, fidèle ou magique, réfractant ou déformant l’image du savant : à mesure que son accès au corps devient de plus en plus direct, que la distance physique entre le scientifique, médecin, anatomiste ou biologiste et son objet d’étude se réduit, la littérature ne se révèle-t-elle pas la distance psychologique qui sépare chaque jour un peu plus la science médicale de l’humain ?

Les propositions de communications (500 mots ; document WORD) sont à envoyer à Laurence Talairach-Vielmas (talairac@univ-tlse2.fr) avant le 1 avril 2011.

PROGRAMME PRÉVISIONNEL

LUNDI 5 DÉCEMBRE 2011 (MUSEUM D’HISTOIRE NATURELLE DE TOULOUSE)

8.45–9.00 : Accueil des participants et présentation du projet

9.00–9.30 : Rafael Mandressi (Centre Alexandre Koyré, CNRS) : ‘Espaces et descriptions savantes du corps’

9.30–10.00 : Hélène Cazès (Université de Victoria, Canada) : ‘La fabrique d’une icône : l’invention vésalienne de l’anatomie moderne (1543, 1725)’

10.00–10.30 : Didier Foucault (Université de Toulouse (UTM)) : ‘Système cérébro-nerveux et activités sensorimotrices de la physiologie ancienne au mécanisme des Lumières’

10.30–11.00 : Pause café

11.00–11.30 : Claire Crignon (Université Paris Sorbonne) : ‘La persistance du ‘modèle’ humoral dans le discours philosophique et médical en Angleterre début XVIIe-début XVIIIe siècle : enjeux épistémologiques et anthropologiques’

11.30–12.00 : Nathalie Rivère de Carle (Université de Toulouse (UTM)) : ‘Under the knife, there is no self”: excoriation and the self in Renaissance Drama’

12.00–12.30 : Frédérique Fouassier (Université de Tours, Centre d’Etudes Supérieures de la Renaissance) : ‘Le corps syphilitique dans le théâtre anglais de la Renaissance’

12.30–14.00 : Pause déjeuner

14.00–14.30 : Elena Taddia : ‘Inscrire le corps de l’enfant dans le discours scientifique: la naissance de la médecine légale sur les enfants en Europe et la docimasie hydrostatique pulmonaire (1660-1830)’

14.30–15.00 : Laurence Dahan-Gaida (Université de Franche-Comté) : ‘Du nerf à l’écriture… et retour ! Médecine et anatomie chez Georg Büchner’

15.00–15.30 : Laurence Talairach-Vielmas (Université de Toulouse (UTM)) : ‘“Shapeless dead creatures … float[ing] in yellow liquid” : Dissection, Exposition et Traitement du Système Nerveux dans Armadale de Wilkie Collins’

15.30–16.00 : Pause café

16.00–16. 30 : Ruth Richardson : ‘Modernity and visuality in the imagery of Gray’s Anatomy’

16.30–17.30 : Visite commentée du Mur des Squelettes (MHN Toulouse)

MARDI 6 DÉCEMBRE 2011 (MUSÉE DE LA MÉDECINE DE TOULOUSE)

9.00–9.30 : Hélène Machinal (Université de Bretagne Occidentale, Brest) : ‘Le singe et l’ange : le corps de l’origine dans la littérature de la fin du 19ème siècle’

9.30–10.00 : Gaïd Girard (Université de Bretagne Occidentale, Brest) : ‘Les Corps mesmériques’

10.00–10.30 Gisèle Seginger (Université Paris-Est) : ‘Nerval et Flaubert : corps mystiques, esprits malades »

10.30–11.00 : Pause café

11.00–11.30 : Pierre C. Lile (Centre d’Etudes d’Histoire de la Médecine) : ‘Le « corps invisible » dans le « Secret de Wilhem Storitz » de Jules Verne’

11.30–12.00 : Jean-François Chassay (Université du Québec, Montréal) : ‘Le discours sur la dégénérescence : s’attaquer à la racine du mal’

12.00–13.00 : Visite du Musée de la médecine

13.00 : Clôture des journées d’étude

 

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Journée d’étude – Pudeurs des souffrant·e·s et pudeurs médicales (XVIe-XIXe siècle)

 

Université Toulouse II le Mirail

Journée d’étude de la thématique Santé et société

Atelier 3 – Corps, santé, représentations

 

Jeudi 3 novembre 2011

9h – 17h, Maison de la Recherche, salle B431

 

Organisée par le laboratoire Framespa sous la responsabilité scientifique de Nahema Hanafi, Didier Foucault et Pierre C. Lile

 

9h. Présentation de la thématique émergente Santé et Société

Didier Foucault, Université Toulouse II- Le Mirail

9h30 Introduction

Nahema HANAFI, Université Toulouse II- Le Mirail / Université de Lausanne

10h. Pudeurs du discours médical au 16e siècle: splendeur et misères des figures de style

Dominique BRANCHER, Université de Bâle

11h. Face aux cancers féminins : dévoiler et porter le fer (1800-1880)

Elsa NICOL, Université Toulouse II- Le Mirail

12h-14h Pause déjeuner

14h. Pudeurs et manipulations médicales du cadavre (France, XIXe siècle)

Anne CAROL, Université d’Aix-en-Provence

15h. Les vaines pudeurs de corps souffrants à l’hôpital, XIXe siècle

Claire BARILLE, Université Paris Ouest Nanterre La Défense

16h. Conclusion. La pudeur dans la pratique médicale contemporaine

Pierre Lile, CEHM/Université Toulouse II-Le Mirail

 

Télécharger le programme (pdf)

 

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Séminaire – Approches historiques des sexualités, XIXe-XXe siècles

Erotisme et pornographie

 

7 Octobre 16-18h

Attention changement de lieu


Responsables : Sylvie Chaperon (FRAMESPA et Centre d’histoire sociale du XXe siècle) et Christelle Taraud (Centre d’histoire du XIXe siècle et NY University)

Séminaire mensuel (Vendredi, 16h00-18h00) à NYU Paris :

56 rue de Passy, 75016 Paris (métros Passy sur la ligne 6 ou La Muette sur la ligne 9).

7 octobre 2011: Annie Stora-Lamarre, « La pornographie dans les ouvrages de l’Enfer au XIXe siècle ».

Annie Stora Lamarre est Professeure émérite d’histoire contemporaine à l’Université de Franche Comté. Elle est notamment l’auteure de L’enfer de la IIIe République, censeurs et pornographes, Paris, Imago, 1990 ; de La République des faibles : Les origines intellectuelles du droit républicain 1870-1914, Paris, Armand Colin, 2005 ; et de Les âmes mal nées, les origines intellectuelles du droit républicain, Paris, Armand Colin, 2005.


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Parution – Journal of the history of medicine and the allied science


Journal of the history of medicine and the allied science, vol 66, n°4, octobre 2011

 

Justin Barr, A Short History of Dapsone, or an Alternative Model of Drug Development


Jeremy A. Greene, What’s in a Name? Generics and the Persistence of the Pharmaceutical Brand in American Medicine


Penelope Gouk and Ingrid Sykes, Hearing Science in Mid-Eighteenth-Century Britain and France


Laurence Esterle and Jean-François Picard, Between Clinical Medicine and the Laboratory: Medical Research Funding in France from 1945 to the Present

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Appel à contribution – Corps héroïque, corps de chair dans les récits de vie de la première modernité

 

Date limite : 1 décembre 2011

Colloque International à l’Université de Reims Champagne-Ardenne, organisé par Christine Sukic au sein du CIRLEP (EA 4299), avec le soutien de PRISMES / Epistémè (EA 4398), 31 mai-1er juin 2012.

 

Le corps moderne s’invente, pour reprendre le titre de l’ouvrage de Nadeije Laneyrie-Dagen (L’Invention du corps : la représentation de l’homme du Moyen Age à la fin du XIXe siècle, 1997), pendant la première modernité, comme le montre en particulier le développement des anatomies : la Fabrica de Vésale, publiée la même année que Des révolutions des sphères célestesde Copernic (1543) est une véritable révolution corporelle qui se reflète dans la perception du corps humain de cette période. Le système galénique des humeurs continue néanmoins à dominer la vision du corps, sans doute parce que le corps mélancolique s’accorde avec cette période de crise de la pensée, de perte des repères et de redéfinition des normes. Les théories des passions, nombreuses aux XVIe et XVIIe siècles, sont également caractéristiques d’une vision instable du corps, à laquelle elles apportent mouvement et versatilité.

Ce colloque propose une réflexion spécifique sur la représentation du corps dans les textes biographiques de la première modernité, qui revendiquent souvent une forme d’objectivité, voire de vérité historique. A cet égard, le corps joue dans ces textes un rôle primordial parce qu’il établit une sorte de preuve à cette « vérité » affirmée – preuve décrite dans le texte et parfois illustrée par un portrait du sujet.

Cette « preuve par le corps » prend plusieurs formes. Le corps peut, par exemple, révéler un aspect hors du commun du sujet de la biographie et en faire alors un être héroïque ou saint. Ainsi, dans sa « vie » de Michel-Ange (1568), Giorgio Vasari consacre plusieurs pages aux funérailles de l’artiste, qui ont lieu vingt-cinq jours après sa mort. Le cercueil est brièvement ouvert pour permettre à tous de contempler le corps : « nous le vîmes intact, sans aucune puanteur, suggérant plutôt le repos d’un sommeil doux et tranquille. Outre le fait que les traits étaient restés identiquement ceux du vivant sauf un peu de couleur cadavérique, aucun membre n’avait de pénible altération ; la tête et les joues s’offraient au toucher comme s’il n’était mort que depuis quelques heures ». Le corps inanimé fait l’objet d’une véritable transfiguration, selon l’un des topoï de l’hagiographie.

Mais le corps du sujet peut aussi être investi d’une forme de vérité physique, matérielle, révélant cette fois un être de chair. C’est la conception qu’en a John Dryden dans la « Vie de Plutarque » qui précède la traduction des Vies de Plutarque de 1683. Reprenant les catégories de l’Histoire élaborées par Francis Bacon (commentaires ou annales ; Histoire proprement dite ; biographie), Dryden indique qu’avec la biographie on touche aux « circonstances minuscules, et à la dimension banale de la vie » : « Ici, on vous conduit dans les appartements privés du héros : vous le voyez en vêtements d’intérieur, et on vous montre ses actions et ses conversations privées […]. Vous voyez ce pauvre animal raisonnable, aussi nu que la nature l’a fait ; et vous prenez connaissance de ses passions et de ses folies, et voyez en ce demi-dieu un homme ». Le corps du héros biographé apparaît ici dans une nudité impudique, source d’intimité avec le lecteur et le biographe. Pour Vasari, le corps de Michel-Ange est celui d’un saint ; pour Dryden, le corps du héros est celui d’un homme.

Le colloque permettra donc aussi, on l’espère, une réflexion sur le rôle de la représentation du corps dans le développement du texte biographique pendant la première modernité. Les textes ou documents étudiés seront des biographies, avec le sens large que ce mot peut avoir lorsqu’on le rapporte à la première modernité  : vie, « vie et mort », hagiographie, panégyrique, éloge, oraison funèbre, biographie de poète, de prince, de peintre, de criminel(le), de personnage historique, mais aussi autobiographie.

Toutes les aires géographiques de l’Europe de la première modernité peuvent être couvertes. La langue du colloque est le français ou l’anglais et les communications ne devront pas excéder 25 minutes. Certaines communications du colloque seront publiées dans la revue Imaginaires(université de Reims Champagne-Ardenne), après examen par un comité de lecture. Les frais d’inscription (50 euros, 30 euros pour les doctorants) couvriront cette publication, ainsi que les repas de midi et les pauses du matin et de l’après-midi.

Envoyez votre proposition de communication sous format Word (300 mots environ), accompagnée d’une brève notice biographique à Christine Sukic (christine.sukic@univ-reims.fr)avant le 1er décembre 2011.

 

Centre Interdisciplinaire de Recherches sur les Langues Et la Pensée (CIRLEP EA 4299)

Directeur : Thomas Nicklas

Université de Reims-Champagne Ardenne

Campus Croix Rouge

Bâtiment 13

Rue François Mauriac

51096 Reims Cedex

http://www.univ-reims.fr/CIRLEP

 

 

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Appel à contribution – Le corps empoisonné. Pratiques, savoirs, imaginaire de l’Antiquité à nos jours


Poitiers, les 3, 4 et 5 octobre 2012.

Colloque organisé par le CESCM (UMR 6223), le CRHIAM (Gerhico-Cerhilim) (EA 4270), HeRMA (EA 3811) et la MSHS, avec le soutien du Conseil scientifique de l’Université de Poitiers.

De l’Antiquité à nos jours, le corps empoisonné a toujours été enveloppé de mystères qui plongent, plus encore que les autres actes criminels et accidentels, l’historien, l’enquêteur, le médecin, parfois même la victime et ses proches, les contemporains comme les observateurs postérieurs dans une perplexité peu commune. Le poison est par essence une arme de la discrétion pour qui veut se défaire d’un ennemi ou d’un concurrent dans la sphère publique comme privée ; ses effets à retardement et ambigus dans leurs manifestations (fatigue, douleurs, symptômes qui renvoient autant à la maladie qu’à l’acte criminel) jouent aussi en faveur de qui veut éveiller les soupçons sur un entourage dont il craint la malveillance et sur lequel il veut attirer l’attention. En effet, l’imaginaire du poison renvoie immanquablement à la ruse, à la lâcheté, au complot et à la trahison, mais aussi au faible : arme de l’ombre elle vient à bout de celui qu’on ne peut atteindre et terrasser directement parce que son statut le protège, sa puissance effraie, parce qu’il est si proche que le risque d’être démasqué est trop grand.

Première séance – Soupçons et certitudes

Le poison crée le doute et le doute autorise la supposition pour expliquer les états de malaise, des disparitions suspectes, des mortalités inattendues et exceptionnelles, des stigmates spectaculaires. Bien entendu, les outils du scientifique, la connaissance ancestrale des fabrications et des capacités vénéneuses de nombreuses plantes et autres substances, les capacités médicales à identifier les effets secondaires de l’empoisonnement depuis la plus haute Antiquité ont permis souvent de passer du soupçon de l’empoisonnement à la certitude de faits prouvés après qu’ils aient été dénoncés, confortés par des témoignages et mis au jour dans le cadre d’enquêtes. Cependant, ce processus total n’est pas toujours réalisable et il ne conduit pas toujours à une réponse claire : la pratique d’autopsies invasives, inconnues en occident avant les derniers siècles du Moyen Âge, et les aveux obtenus dans le cadre d’investigations sont souvent les seuls moyens d’aboutir à la certitude sans faille. Les sources relatant des cas d’empoisonnements (historiographiques, littéraires, judiciaires), les accusations et les craintes d’avoir été empoisonné qui émaillent les correspondances, les rumeurs qui traversent les récits (biographies, histoires, chroniques), pour ne citer que quelques exemples, ne reflètent souvent que la crainte que le poison suscite dans une opinion, un groupe identitaire, une société ou un temps. Les accusations d’empoisonnement, comme le fantasme du poison qui fait naître des soupçons envers certaines catégories de personnes, qui conduit à une prudence déraisonnée et à voir sa trace partout sont aussi dignes d’intérêt pour le chercheur en sciences humaines et sociales que les empoisonnements avérés.

Il s’agit donc non pas de démêler le vrai du faux pour dénoncer quelques légendes d’empoisonnements, mais bien d’attirer l’attention sur les raisons inscrites dans les corps qui font naître de façon spécifique et à une période donnée les soupçons d’empoisonnement, à comprendre les ressorts qui les sous-tendent et à saisir les mécanismes qui conduisent de l’hypothèse à la certitude de l’action du venin.

Deuxième séance – Les lieux et les moments

Près du lit, à proximité de la cuisine, à côté du salon, voire dans le cabinet du médecin, les lieux où du poison est versé ou bien des substances toxiques avalées, donnent le sentiment d’être des plus variés. Malgré tout, ils semblent appartenir, dans la majorité des cas, à l’espace intime. Certes empoisonneurs et empoisonneuses peuvent choisir des espaces publics comme des auberges ou des cabarets, des lieux plus retirés comme les couloirs d’un palais, mais le plus souvent se sont bien des antichambres, des salles à manger, voir la chambre de celui qui est tombé subitement malade. Les lieux ce sont donc les espaces où les substances délétères et funestes sont préparées, achetées, échangées. Ce sont aussi les endroits où les victimes agonisent et trouvent la mort. Ce sont encore les espaces où les cadavres sont examinés, parfois longuement, d’autres fois furtivement.

Pour comprendre l’histoire des empoisonnements, il convient de s’intéresser précisément au passage à l’acte. En effet, si certains crimes peuvent être spontanés, s’inscrire dans l’instant, il n’en est pas de même de l’empoisonnement qui, dans l’imaginaire collectif et dans les pratiques, relève de la préméditation. Les intoxications criminelles nécessitent de choisir un moment particulier, de détourner l’attention et souvent requiert la réitération du geste. Juste avant les repas, au lever, ou bien juste avant de s’endormir semblent constituer des instants privilégiés. Pour s’en assurer, il importera de croiser les sources et d’examiner le phénomène dans la longue durée.

Troisième séance. Les gestes, les objets et les substances

Verser avec régularité de l’arsenic dans la tisane du soir, vider le contenu mortifère d’une bague dans un met raffiné, dissimuler de la mort-aux-rats dans le poulet du dimanche, les gestes, les objets et les substances caractérisent immanquablement celui ou celle qui commet le forfait. Arsenic ou venin, strychnine ou champignons, cocktail médicamenteux ou cigüe, les matières qui vont entrainer la mort ne sont pas indifférentes car cela va déterminer leur action sur le corps. Commune et recherchée, provoquant une mort foudroyante ou alors dans d’innommables souffrances : du choix de la substance dépend l’acte.

C’est le geste qui détermine l’action et celui-ci n’a rien d’anodin. Car une gradation existe entre l’injection par piqure d’une dose mortelle par un malfrat qui élimine un complice et une ration versée quotidiennement dans les mets préparés par une ménagère consciencieuse pour occire son mari. Absorbé dans un plat ou noyé dans une boisson, dissimule dans le chaton une bague ou ingurgité sous forme de médication ou encore apposé dans un vêtement, les gestes qui déterminent l’intention sont autant d’indices de la proximité avec le corps de celui qu’on souhaite supprimer, de sa familiarité aussi. Mais assurément les gestes, les objets comme les substances vont atteindre l’intégrité corporelle avec plus ou moins de sauvagerie et de cruauté ; ils déterminent aussi le genre, le sexe, le statut social et économique mais aussi motivent l’intention comme la préméditation.

Quatrième séance- Les ressorts et les effets

Saisir et comprendre le crime d’empoisonnement impose de restituer les mentalités et l’atmosphère d’une époque. Il s’agit de s’interroger sur ce qui rend possible le crime, de suivre les logiques du geste, de se demander pourquoi des hommes et des femmes décident de se débarrasser d’un mari, d’une maîtresse, d’un rival, d’un supérieur, d’un « gêneur » en usant d’une arme considérée pendant longtemps comme indécelable. Certains crimes d’empoisonnement ont presque été aussitôt oubliés, d’autres sont passés à la postérité et ont bénéficié d’un effet mémoriel certain.

Des crimes de ce type ont donné lieu à une importante production discursive, mais aussi à des savoirs neufs. Légendes, poèmes, complaintes, romans, dramatiques, films lui ont donné une dimension nouvelle. Toutefois, ils ont aussi suscité des peurs et des paniques. Des hommes et des femmes du passé ont ainsi été saisi d’effroi à l’idée de périr en ayant ingurgité une « substance maléfique », pour autant le début du XIXe siècle voit naître une science nouvelle : la « toxicologie ». Dorénavant les batailles d’experts prennent un relief singulier tandis que la peur des « poisons invisibles » reste importante. Le corps est tantôt « âcre, chaud, brulant », tantôt « insensible et immobile ».

Colloque organisé par le CESCM (UMR 6223), le CRHIAM (Gerhico-Cerhilim) (EA 4270), HeRMA (EA 3811) et la MSHS, avec le soutien du Conseil scientifique de l’Université de Poitiers.

● Les propositions de communications (entre 1500 et 3000 signes) sont à envoyer avant le 7 octobre 2011 simultanément aux trois organisateurs dont les courriels suivent :

– lydie.bodiou@wanadoo.fr

– chauvaud.frederic@wanadoo.fr

– myriam.soria@univ-poitiers.fr

● Les organisateurs vous préciseront le 7 novembre 2011 les communications retenues.

● Les frais d’inscription sont de 100 euros (à établir à l’ordre de l’agent comptable de l’Université de Poitiers)

● L’organisation du colloque prend en charge les nuitées, les transports (à l’intérieur de l’espace franco-français) et les repas.

● Les actes du colloque seront publiés sous la forme d’un véritable livre aux éditions Garnier.

 

 

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Parution – Les corps dans le taoïsme ancien


Romain Graziani, Les corps dans le taoïsme ancien, Paris, Les Belles-Lettres, 2011, 360 p.

Les textes du taoïsme ancien ne dissertent pas dans l’abstrait du corps humain. Sous la forme de fictions et de fables, ils mettent en scène ses usages possibles, ses ressorts et ses ressources : un ancien condamné, amputé d’un pied pour ses crimes, rudoie le Premier ministre au sortir de leur cours de méditation, et lui en remontrer sur la notion de vertu. Un ermite malicieux rembarre un aspirant à la sagesse, en se piquant de refuser les « gueules cassées » produite en série par l’éducation confucéenne. Le maussade et concupiscent seigneur de Wei retrouve soudain le sourire à l’écoute des propos d’un reclus des montagnes, venu l’entretenir de chiens et de chevaux galopant librement « dans les steppes du non-être ». Les prouesses de l’archer Lié-tseu sont réduites à rien par Comte Obscur, qui lui enseigne « le tir du non-archer ».  On voit défiler dans les premiers écrits taoïstes, le Tchouang-tseu et le Lié-tseu, les figures les plus admirées et les plus détestées de la société chinoise, du gentleman plein de prestance, rompu aux civilités d’apparat, jusqu’au paria hideux et querelleur. Comment l’éthos taoïste parvient-il à discourir du sage en se dispensant de notions morales, en pensant la sagesse comme un régime de puissance, en l’associant à l’ampleur de l’espace, au travail de l’imagination, à l’œuvre du Ciel? Par une apparence de paradoxe, ce sont les corps infirmes, les créatures informes, les êtres les plus infâmes qui jouissent d’une affinité de fond avec le Tao, le Principe qui régit le cours des êtres et des choses.

Introduction

Convention de lecture

Chapitre 1 : Corps olympique, corps taoïste
L’apathie toute puissante du coq de combat
L’athlète ès insectes
Le despotisme occidental
L’archer sur la falaise
Nageur de piscine, nageur de cataractes
La fabrication industrielle des athlètes

Chapitre 2 : La complétude des amputés. Réflexions sur la loi, le rite et les parias en Chine ancienne
Quand les amputés empiètent
La protection vigilante de l’intégrité physique
L’exploitation politique de la valeur d’intégrité du corps
La mise à parité des corps dans le Tchouang-tseu
L’entorse au rituel de l’unipède
Dramatis personae
Au fond du conflit
Nouvelle scène de la vie des châtiés : Mont-Paisible Sans-orteils morigène Confucius
L’amputé de la face tenant tête à l’ermite
Conclusion : Mutation et Mutilation

Chapitre 3 : Persuasion à la pointe de l’épée : l’imagination thérapeutique en action
La trame du drame
Personnages en présence
La rêverie exaltante sur l’arme absolue
L’épée du seigneur et la puissance moralisée
Et le roi tomba des nues : de la séduction à la réduction
Le final tragi-comique
Un essai d’interprétation. Défense et illustration de la ruse
Le rôle thérapeutique de l’imagination
Deux modèles concurrents de persuasion
Conclusion
En guise de colophon

Chapitre 4 : Deux ermites en miroir ou la poétique au service du politique
De l’audience à l’écoute
Parade de chiens et de chevaux
Les vertus curatives de l’imagination
Le cogito imaginant
L’allégorie de l’exilé
Quatre leçons de ténèbres
Chasse aux démons, ruses poétiques
Apostille sur l’art des images et le storytelling.

Chapitre 5 : Chaos ou Cosmos
L’envol de la fiction
L’éloge de la libre échappée et son ressort éthique
Les vertus thérapeutiques de l’espace
L’orthodoxie confucéenne et les lettrés rebelles. Réflexions sur la descendance du Tchouang-tseu au cours de l’antiquité tardive

Épilogue
Annexe. Portrait de Confucius en taoïste
Bibliographie des œuvres en langues occidentales
Bibliographie des œuvres en langue chinoise, ancienne et moderne
Glossaire des termes et des noms mentionnés
Résumé des cinq chapitres et de l’annexe

Index des notions
Index des principales histoires du Tchouang-tseu et du Liè-tseu traduites et commentées
Index des principaux auteurs et personnages cités

 

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Parution – Le corps du chercheur. Une méthodologie immersive

 

Bernard Andrieu (dir.), Le corps du chercheur. Une méthodologie immersive, Presses universitaires de Nancy, 2011.


Ce livre établit que le corps du chercheur(euse) est à comprendre à la fois en 1er et en 3e personne sans pour autant prétendre réduire l’écart méthodologique entre les deux et plaide, en épistémologie du corps, pour une anthropologie engagée dans le monde des autres.

La stratégie immersive est ici décrite de manière théorique par le philosophe Bernard Andrieu et sur le terrain des pratiques corporelles par l’anthropologie sociale d’Eric Perera, Sylvain Rouanet et Éric de Léséleuc.

Les stratégies de visibilisation et de stigmatisation des acteurs et actrices, comme les décrivent par les sociologues Natacha Chetcuti et Maxime Cervulle démontrent comment les lesbiennes et les femmes sont également minorées du fait de leur appartenance ethnoraciale.

Le savant lui-même, dès l’interaction objet-sujet comme l’analyse l’historien des sciences Sébastien Poinat, écrit à travers sa corporéité. L’épistémologue des Staps Matthieu Quidu accomplit un pas supplémentaire en envisageant l’expérience corporelle vécue des scientifiques.

 

Première partie : stratégies d’immersion

Bernard ANDRIEU — Introduction

Bernard ANDRIEU — Mon corps, projecteur ou immerseur ?

Eric PERERA, Sylvain ROUANET, Eric DE LÉSÉLEUC — Comprendre par corps le phénomène étudié ? Stratégies d’immersion dans un groupe de body-builders

Deuxième partie : le corps du savant

Sébastien POINAT — Le corps du physicien et le savoir

Matthieu QUIDU — L’aventure du corps dans la philosophie des sciences au XXesiècle : trois thèses sur la valeur épistémologique de la corporéité du savant

Troisième partie : modes de subjectivation

Natacha CHETCUTI — La sexualité comme mode de subjectivation politisée du genre ?

Maxime CERVULLE — La couleur des épistémologies. Race, politique des savoirs et Critical White Studies


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Parution – Le Troisième sexe. Etre hermaphrodite aux XVIIe et XVIIIe siècles

 

 


Patrick Graille, Le Troisième sexe. Etre hermaphrodite aux XVIIe et XVIIIe siècles, Arkhe éditions, 2011, 215 p.

Du XVIIe au XVIIIe siècle, période où la répression judiciaire côtoie l’aube de libérations sexuelles, l’hermaphrodite est perçu à l’image de sa dualité corporelle.
Pour les uns, il incarne la neutralité, la perfection, voire un idéal ; pour les autres, il figure l’altérité, la violation des bonnes moeurs, l’équivoque dans l’excès. Disséqué, au sens d’analyser minutieusement, du latin dissecare, couper en deux, cet être incertain engendre de nouveaux rapports aux fables du passé, d’insolites utopies inspirées d’Ovide ou de la Bible, ainsi que des textes scientifiques, souvent normalisateurs et moralisateurs, derrière lesquels sévit une législation coercitive, source d’éclatants procès. Entre savoirs et fantasmes, son  » sexe paré d’ombre « , pour reprendre la formule d’Empédocle, offre ainsi le paradoxe d’affirmer et d’infirmer, de fissurer la raison de ces époques.

 

  • AFFABULATIONS
  • Salmacis et Hermaphrodite, ou la passion
  • Adam sans Eve, ou l’autosuffisance
  • Australiens et Mégamicres, ou la fantaisie
  • MEDICALISATIONS
  • La tranchante clarté
  • L’irréductible ambiguïté
  • Les oniriques possibilités
  • INQUISITIONS
  • L’histoire ancienne dévoilée
  • Les procès Marcis, d’Apremont Rafanel et Malavre
  • Anne-Jean-Baptiste Grandjean

Patrick Graille est enseignant aux universités de Vassar-Wesleyan (Paris) et historien des idées, ses recherches portent sur la marginalité et la monstruosité des corps, des esprits et des arts, de la Renaissance aux Lumières.

 

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Parution – Le corps du chercheur. Une méthodologie immersive


ANDRIEU Bernard (dir.), Le corps du chercheur. Une méthodologie immersive, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 2001, 178 p.

 

Ce livre établit que le corps du chercheur(euse) est à comprendre à la fois en 1er et en 3e personne sans pour autant prétendre réduire l’écart méthodologique entre les deux et plaide, en épistémologie du corps, pour une anthropologie engagée dans le monde des autres. La stratégie immersive est ici décrite de manière théorique par le philosophe Bernard Andrieu et sur le terrain des pratiques corporelles par l’anthropologie sociale d’Eric Perera, Sylvain Rouanet et Éric de Léséleuc. Les stratégies de visibilisation et de stigmatisation des acteurs et actrices, comme les décrivent par les sociologues Natacha Chetcuti et Maxime Cervulle démontrent comment les lesbiennes et les femmes sont également minorées du fait de leur appartenance ethnoraciale. Le savant lui-même, dès l’interaction objet-sujet comme l’analyse l’historien des sciences Sébastien Poinat, écrit à travers sa corporéité. L’épistémologue des Staps Matthieu Quidu accomplit un pas supplémentaire en envisageant l’expérience corporelle vécue des scientifiques.

 

Première partie : stratégies d’immersion

Bernard ANDRIEU — Introduction

Bernard ANDRIEU — Mon corps, projecteur ou immerseur ?

Eric PERERA, Sylvain ROUANET, Eric DE LÉSÉLEUC — Comprendre par corps le phénomène étudié ? Stratégies d’immersion dans un groupe de body-builders

Deuxième partie : le corps du savant

Sébastien POINAT — Le corps du physicien et le savoir

Matthieu QUIDU — L’aventure du corps dans la philosophie des sciences au XXe siècle : trois thèses sur la valeur épistémologique de la corporéité du savant

Troisième partie : modes de subjectivation

Natacha CHETCUTI — La sexualité comme mode de subjectivation politisée du genre ?

Maxime CERVULLE — La couleur des épistémologies. Race, politique des savoirs et Critical White Studies

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