Médias contre-hégémoniques: des éditions cartoneras à la cyberculture

Étiquette : Street Art

Urban Art Mapping : le street art contre les violences policières

Page d’accueil du site Urban Art Mapping

Urban Art Mapping est un site internet visant à répertorier et cartographier les œuvres de street art issues des évènements autour du meurtre de George Floyd par un policier en Mai 2020. Ce site provient du travail d’un groupe de chercheurs et d’étudiants multidisciplinaire de l’Université de Saint Paul, ville jumelle de Minneapolis. Ce collectif cherche à documenter et analyser les œuvres des artistes et militants rattachés au mouvement Black Lives Matter. Urban Art Mapping veille à prendre en compte une grande diversité de productions de la plus petite à la plus grande : stickers, tag, graffiti, peintures murales, installations.

Pour le collectif de chercheurs, le street art est une façon artistique et militante de répondre rapidement et efficacement à une situation de crise. Le but est d’enregistrer les voix qui se sont soulevées au cour du temps. On obtient alors une vision diverse et nuancée des moments historiques comme l’ont été les révoltes post-George Floyd. Le street art est une manière de s’approprier et de transformer l’espace public pour créer un dialogue, des débats et appeler une audience plus large que d’ordinaire. Le grand intérêt d’inventorier ces différentes œuvres est de garder une trace de cet art éphémère. En effet, il faut en général seulement quelques heures avant qu’un tag ou un grafitti ne soit enlevé.

« Street art captures the complexity of the experiences shaping the world today. »

Dr. Heather Shirey, co-director, Urban Art Mapping

Le site propose ainsi une carte permettant de repérer chaque production repérée par le groupe depuis Mai 2020. On dénombre aujourd’hui plus de 1500 œuvres répertoriées sur cette carte. On remarque que les projets artistiques de rue en soutien à Black Lives Matter ont largement dépassé les Etats-Unis avec des œuvres au Brésil, au Canada ou en Europe. Celles-ci s’adaptent en général aux contextes locaux et aux victimes de violences policières des différents pays. Le projet Urban Art Mapping est ainsi un projet qui se base sur une collaboration collective nationale et internationale.

Carte extraite du site Urban Art Mapping

Contexte : l’été 2020 pic du mouvement Black Lives Matter

Le projet Urban Art Mapping est né à partir du meurtre de George Floyd, un homme noir tué par un policier blanc, Dereck Chauvin, le 25 Mai 2020. Cet évènement a engendré le pic du mouvement Black Lives Matter qui devint la plus grande mobilisation de l’histoire des Etats-Unis. Cette énième violence policière est venue frapper une population déjà exaspérée par le racisme policier qu’a parfaitement mis en lumière le mouvement Black Lives Matter depuis 2013. Cette épisode marque un tournant au sein de ce mouvement avec une nouvelle radicalité atteinte et de nouvelles revendications. La proposition Defund the Police a notamment été très mise en avant. Elle sous-tend une baisse des budgets de la police au profit des services sociaux (logement, alimentation, éducation…) et du milieu associatif. Une partie plus marginale s’est radicalisée vers l’abolitionnisme qui part du principe que la police serait irréformable car intrinsèquement raciste, classiste et sexiste et vise ainsi à la remplacer par d’autres dispositifs de justice et de contrôle social.

L’épicentre de ce grand mouvement national fut Minneapolis, ville où est advenu le meurtre de George Floyd. Si la grande majorité des manifestations du pays furent pacifiques, la colère dans cette ville a débouché sur des émeutes, des pillages et de nombreux affrontements avec la police. Ce déchainement est représenté par l’incendie d’un des commissariats de la ville qui a marqué le pays. Ce rapport de force gagné par les manifestants Black Lives Matter a contraint le Conseil Municipal de la ville de déclarer le démantèlement du service de police de la ville.

Le street art post-George Floyd à Minneapolis

Etant donné le dynamisme du mouvement social de Mai 2020 à Minneapolis, il n’est pas étonnant de retrouver cette vitalité au sein des arts de rue. La carte fourni par Urban Art Mapping montre en effet un très grand nombre de productions réalisées lors des évènements soit en mémoire de George Floyd soit en tant que message politique.

La collection d’œuvres de rue proposée par Mapping illustre parfaitement le spectre d’opinions qui existe au sein de BLM. On retrouve ainsi des mentions aux positions modérées réformistes ou de réconciliation avec la police et des opinions plus radicales notamment abolitionnistes. Les rues de la ville étaient alors remplies des traditionnels slogans BLM comme « I can’t breath », ou des nouveaux comme « Defund the Police » et aussi de nombreux formules plus bien plus fortes que d’habitude « Abolish the Police », « ACAB ».

Cet élan artistique et militant s’est principalement fait autour du mémorial consacré à George Floyd qui a été réalisé à l’intersection de la 38th Street et de Chicago Avenue. Cet espace est devenu un lieu de rassemblement et une zone d’autogestion dirigée par les communautés locales et interdite à la police. Elle est protégée par des barricades qui constituent des installations à la fois pragmatiques, politiques et artistiques. Le travail de Urban Art Mapping de définir ces barricades comme œuvre à part entière vient souligner la division floue entre l’art et l’activisme et les liens forts qui les relient.

Bibliographie

Buchanan, Larry, Bui, Quoctrung et Patel, Jugal. K. « Black Lives Matter may be the largest movement in U.S History », New York Times, 3 Juillet 2020.

Collectif Matsuda. Abolir la police – Echos des Etats-Unis. Péronnas, 2021.

Lundimatin, « MINNEAPOLIS : RÉCIT DE LA PRISE DU COMMISSARIAT », Lundimatin, 2 juillet, 2020.

Keeanga-Yamahtta, Taylor. Black Lives Matter : le renouveau de la révolte noir américaine. Marseille : Contre-feux, 2017.

Ricordeau, Gwenola. 1312 raisons d’abolir la police, Montréal, Lux, 2022.

Colectivo Dexpierte : Un réveil historique à coup de peinture?

Ne pas oublier : la Colombie face au conflit

Comment réécrire l’histoire ? Comment avancer sans pour autant oublier ? La Colombie a fait face à des décennies de guerre civile , mais tente tant bien que mal de s’en sortir. Les discours créent l’Histoire, crée la mémoire. Mais le récit découpe, simplifie, efface et laisse de côté nombre de victimes dont la reconstruction est doublement difficile. Donc que faire ?

Le Colectivo Dexpierte propose d’immortaliser les disparus, les assassinés, les victimes dont on tente d’oublier, parfois pour ne pas souffrir, parfois pour ne pas chercher à savoir de qui est la faute.
Photographier des street arts qui font parlés les disparus, c’est ce que propose le Colectivo Dexpierte : ne pas perdre de vue ceux qui ont soufferts à travers un premier acte : le street art. Visible par tous les passants puis transmis à tous à travers le monde grâce au cyberespace. Faire mémoire de la mémoire, contre les diffamations, contre ceux qui veulent faire taire, contre des discours hégémoniques et écrasants. Voilà Continue reading

B a s t a r d i l l a : la street artiste qui envahit le monde de fresques féministes

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source: http://www.bastardilla.org/hogardepapel/*lxssnm

En Colombie, le street art explose dans les années 2000 envahissant les rues de couleurs, cet art est souvent un outil de dénonciation du système politique ainsi que de la violence régnant dans le pays. Bastardilla est une street artiste venant de Bogota, elle tapisse la capitale colombienne d’images de femmes, mais on retrouve aussi son travail dans d’autres pays tels que la Belgique, l’Allemagne ou l’Italie où elle travaille avec de nombreux artistes.

Le blog

Le blog de Bastardilla est une arme poétique et un hommage à la résistance et à l’empoderamiento des femmes, on y retrouve des dessins revendiquant la place de la femme dans la société colombienne ; comme sur ce dessin ou une femme déracine des godets de pelleteuses dont les racines sont des crânes humains, tandis que sa fille porte dans ses bras un arbre à replanter. Les femmes et la nature sont des thèmes récurrents de ses œuvres et marquent notamment son opposition au machisme, au capitalisme et ici à l’exploitation de la terre.

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Le graff, entre histoire et controverse

Cette vidéo parle de MAL CREW (El Movimiento Artistico Libre), un collectif de Bogota de huit artistes graffeurs créé en 2009. Les œuvres sont spécifiques de part leur grandeur, on parle d’illustrations murales. Ce collectif souhaite intégrer des messages dans ces graffs, alliant un parfait mélange entre le sens des illustrations explicites ou évocatrices et des problématiques politiques et sociales, aussi bien passées que présentes.

Le graff est leur moyen pour intégrer la mémoire de l’histoire (fait historique) dans l’espace public.

« Nous utilisons le passé pour préparer le futur » – MAL Crew

En effet, l’espace public est un lieu où le sens de la controverse d’un graff peut agir comme un révélateur de la situation sociale du pays. Leurs graffs sont tournés autour de la corruption du système politique, mais aussi autour d’autres thèmes tels que l’écologie ou les cultures ethniques.

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